@BA
Nietzsche, l’inventeur de la « grande santé, était d’abord un grand malade, au sens propre du terme. Toute sa vie, il aura été valétudinaire, et il n’aura quitté ce triste état que pour entrer à la fin dans une démence dont il ne sortira que par la mort.
J’avais pas mal de sympathie pour Onfray, encore que je n’aie jamais compris cette fascination pour Nietzsche et encore moins une thématique hédoniste qui n’a pas beaucoup de rapport avec la philosophie. Quand des »philosophes« se préoccupent de la question du bonheur plutôt que de celle de la connaissance, qu’il s’agisse des épicuriens ou des stoïciens dans l’antiquité ou d’Onfray à notre époque, ils deviennent de simples bricoleurs et se ravalent à peu près au niveau de ces magazines que le Français moyen apprécie tant et qui lui prodiguent mille conseils sur la bonne manière d’augmenter son confort, de se divertir, de voyager, de se soigner ou même de faire sa tambouille.
Nietzsche aura été le philosophe préféré des nazis. Sans doute ses derniers écrits auront-il été un peu manipulés dans les publications posthumes, mais si l’on considère ne serait-ce que »Jenseits von Gut und Bôse« , on y trouvera bien des assertions propres à justifier à l’avance les exactions du IIIe Reich. Ce n’est donc pas tout à fait un hasard si, comme Wagner, il a été tant apprécié dans l’Allemagne des années 30. Cela me fait penser à ces braves naïfs qui, comme encore hier le mufti de la Maison Blanche, vous expliquent que les attentats qui ensanglantent le monde n’ont rien à voir avec l’islam : le Coran les justifie, et il n’y a pas une seule horreur perpétrée par l’Etat coranique qui ne soit éclairée, si j’ose dire, par quelque verset bien choisi dans le livre de la révélation islamique.
Onfray a beaucoup lu, pas toujours très attentivement. il excelle dans la doxographie, mais sa »philosophie« personnelle manque d’audace. Tout cet été je l’ai entendu sur France culture répéter qu’il était encore vraiment »de gauche« à une époque où il n’est décidément plus possible de l’être. Partant, il n’a plus qu’à réciter la doxa traditionnelle de cette vieille crèmerie en faillite : nous sommes d’anciens colonisateurs, de parfaits salauds. Et vive les jeunes barbares qui vont écraser enfin au marteau notre civilisation ramollie. Vive l’énergie, la violence même, vive ce »Tiumph des Willens" qu’illustrait en 1935 Leni Riefenstahl. Il n’en est pas encore là, certes, mais s’il continue dans cette voie, il y arrivera nécessairement.