@JMBerniolles
J’ai aussi lu cette information mais je vois les choses sous un autre angle.
- L’Etat islamique (DAECH) est né quand l’Etat islamique d’Irak (EII est né sous l’occupation étasunienne) a étendu ses activités sur le sol syrien.
-L’EII était formé de salafistes (sunnites) qui combattaient à la fois le gouvernement irakien dominé par des chiites et les occupants de la coalition internationale.
- L’EII recevait le soutien de Saoudiens pour lutter contre le gouvernement Maliki qui avait exclu les sunnites des rouages de l’Etat.
- L’EII a été renforcé par plusieurs dizaines de milliers de soldats et d’officiers de l’armée de Saddam Hussein, ceux qui se sont à un certain moment évaporés en 2003 et qui étaient exclus de la nouvelle armée irakienne.
- L’EII commettait quasiment tous les jours des attentats terroristes meurtriers contre la communauté chiite d’Irak.
- Comme les Etats-Unis n’ont pas pu s’entendre avec le gouvernement irakien (chiite) pour garder une présence militaire en Irak, cet EII arrangeait bien les Etats-Unis pour faire pression sur le gouvernement irakien.
- Les populations sunnites irakiennes se sentaient frustrés par la perte du pouvoir en Irak et ils accueillaient assez favorablement l’EII.
- A partir de 2012, il étend ses activités en Syrie. En avril 2013 : il prend le nom d’Etat islamique en Irak et au Levant. EIIL en français, ISIS en anglais ou DAECH en arabe. En juin 2014, il prend Mossoul, il proclame le califat sur tous les territoires qu’il occupe et il prend le nom d’Etat islamique.
- Pour comprendre la défection de l’armée irakienne à Mossoul et dans les provinces sunnites d’Irak, il faut prendre en considération les liens tribaux régionaux et interrégionaux. C’est une dimension qui n’est jamais évaluée dans les approches occidentales sauf très récemment par les Etats-Unis et par la Russie.
- Les métastases de l’Etat islamique se dispersent ensuite dans tout le monde musulman.
- L’Etat islamique attire alors une partie des djihadistes syriens grâce à ses victoires militaires. C’est surtout le Front al-Nosra qui verra une grande partie de ses effectifs se diriger vers l’Etat islamique.
- L’Etat islamique perd alors le soutien de l’Arabie saoudite qui voit avec le califat sa juteuse protection des lieux saints de l’islam mise en cause.
- L’Etat islamique garde le soutien de la Turquie qui bénéficie de tous les trafics réalisés via son territoire par l’Etat islamique : pétrole, coton, antiquités etc.
- Les Etats-Unis gardaient une certaine retenue contre l’Etat islamique jusqu’en septembre 2015. Une situation où tous les belligérants s’entre-tuent leur convenait très bien.
- L’intervention surprise russe de septembre 2015 est venue perturber tous leurs plans. Une défaite militaire rebelle devenait possible.
- Une reprise de l’Est syrien et de ses champs de pétrole et de coton par l’Armée arabe syrienne suivra immanquablement la défaite militaire rebelle à l’Ouest. Les Etats-Unis voudraient bien empêcher ce scénario mais ils n’ont pas la main.
- Ils ne contrôlent totalement aucun de leurs alliés : ni la Turquie, ni l’Arabie saoudite, ni les Kurdes, ni les rebelles syriens etc.
- Les Etats-Unis ont besoin de motifs pour intervenir directement dans le conflit. Pour le moment, le contrôle de la situation générale leur échappe.
- Ces gesticulations humanitaires sont destinées à donner à Barack Obama un incitant pour une intervention plus musclée en Syrie. L’Etat islamique est devenu une menace pour les principaux alliés dans la région. Il est partiellement composé de soldats de Saddam Hussein que les Etats-Unis ne veulent en aucun cas voir à la tête d’un Sunnistan qui fait partie de leur projet de redécoupage régional des frontières.
- Je ne pense pas que Barack Obama va engager massivement les Etats-Unis dans la région. Je pense qu’il va essayer de geler la situation sur le terrain et qu’il veut laisser son successeur gérer le dossier.
- Les Russes sont à l’initiative en Syrie et il ne semble pas qu’ils veuillent ce gel de la situation. Ils ont besoin d’une grande victoire diplomatique (et surtout pas d’un enlisement). On voit la diplomatie russe s’activer sur tous les terrains pour obtenir une pacification de la Syrie qui serait suivie d’élections présidentielles triomphantes pour Bachar al Assad.
- C’est pas gagné. Les bâton dans les roues vont se multiplier.
- Dernier point concernant votre information. Je pense que vous êtes conscient que la défense des chrétiens d’Orient est le cadet des soucis des Etats-Unis. Il s’agit tout simplement d’une opération psychologique destinée à obtenir une aussi large adhésion que possible des Américains en cas d’intervention militaire plus importante dans la région.