@ philouie
Lis les livres plutôt que les commentaires sur ceux-ci.
Le procès est grotesque, on nage en plein ethnocentrisme. En aucune façon, la sexualité chez les Trobriandais est libre, isoler quelques phrases qui arrangent n’y changent rien ; elle n’est pas criminalisée mais comme partout où il y a société organisée, cette sexualité est canalisée et orientée. A preuve, Il y a des incestes, des tabous, des interdits explicites ou implicites, etc. Une société à sexualité libre, sans entrave, serait une société où il n’y aurait nul inceste, nul tabou, nul interdit, implicite comme explicite*.
(explicite, c’est via un interdit type commandement ; implicite, c’est lorsqu’on construit un système qui fait que la chose ne pourra se produire, comme dans le totémisme, par exemple).
L’objet est le même, le mode diffère et on peut déterminer les conséquences sans cependant déduire comment cela marche. La réalité est qu’au final la société trobriandaise est une société de type harmonieuse, où la violence, intrinsèque à toute société humaine, a peu l’occasion de se manifester (’vices’, guerre, querelles), etc.
Cela ne signifie aucunement qu’il s’agit d’une société idéale, dont il faudrait importer le mode, car elle possède de nombreux travers et constitue elle aussi une aliénation. A travers la connaissance de ce genre de sociétés différentes, organisées autrement, ce sont ce genre de connaissances que l’on retire : toute société humaine s’organise autour de la canalisation et de l’orientation de la sexualité ; toute société est aliénation (elle repose sur le sacrifice de l’individu au profit de la communauté, le sacrifice du Désir pour celui de l’Obligation), etc.
Salir l’air de ne pas y toucher Malinovski est évidemment déloyal. M, lecteur de Nietzsche, de Freud, des philosophes grecs, qu’il cite de loin en loin ; croire qu’il est victime de lui-même et n’a pas d’interrogation sur lui-même, d’autant plus qu’ils est dans une démarche de type scientifique et rationaliste, c’est risible. A cet effet, tu peux lire son ’journal d’un ethnologue’, publié par sa femme après sa mort, où l’on a accès à l’homme privé.
L’ethnocentrisme est aussi ton problème, cette incapacité à t’affranchir de ce point de gravité que tu appelles vérité.
Ex : ’nous autres monothéistes, nous pensons qu’Abraham fonde la civilisation’. Non, la civilisation, c’est lorsque tu trouves canalisation et orientation de la sexualité, et non pas sa simple criminalisation qui est une perception tardive et étroite. Je pourrais te citer des centaines de peuplades, te recommander quantité de livres ; chaque fois une m^me idée mais un mode différent, une gestion différente ; et des résultats variables, uniques, singuliers.
Ou bien encore, cette sornette que l’étui pénien, c’est comme la circoncision. Alors que le mardi tu me sors que l’objet de cette mutilation est une sorte de châtrage (circonscrire la volonté de puissance). Le sens de l’étui pénien est forcément autre puisque la sexualité n’est aucunement criminalisée ; souvent c’est autre chose d’externe qui va donner le sens (par exemple, la communauté te juge digne ou suffisamment mature pour participer à la Kula, cf. une sorte de joute nautique, et l’étui pénien symbolise cela.
Et ce sera toujours le cas, tu vas toujours ramener la chose à ta vérité. Chez les Trobriandais, du fait de la présence de deux modes sexuels (polygamie et monogamie), le sens de l’adultère est forcément différent d’ailleurs. Ce n’est pas le multipartenariat qui est criminalisé, celui-ci est possible ; c’est autre chose.
Dans la Théogonie, si je me souviens bien, Hésiode parle d’Eros comme celui qui ’rompt les membres’ et dit qu’Aphrodite l’a mis à la chaîne. Cela peut-être signifie qu’en fait la libido est facteur de chaos et de dissolution si on lui laisse libre cours.