coluche suite ...
-A
l’époque, Bernard Rideau est un personnage qui compte a l’Elysee. Il s’occupe
des sondages pour le président. 5 mois avant la présidentielle, ..mettent
Coluche sous surveillance et montent un dossier. La police établit sur fiches le
moindre incident. Le portrait dépeint est celui.. ..
d’un personnage indiscipliné avec un caractère
contestataire. A propos de ses obligations militaires, ..les RG rapportent des
actes d’indiscipline. est persuadé que derrière Coluche, ..il y a une opération
de déstabilisation organisée.. ..et plus ou moins rattachée avec le Parti
socialiste. Et les communistes peut-être, les gauchistes certainement. La
gauche.
-La désignation de Georges Marchais comme candidat
communiste...
-La police politique imagine un complot communiste.
Elle se trompe. Coluche ne roule pour personne. D’ailleurs, Georges Marchais le
regarde d’un oeil noir.
-Pour ne pas le citer, G. Marchais a dit que comme
candidat, ..j’étais un rigolo. Mais c’est pas moi qui ai commencé.
-Le dirigeant communiste va être l’un des premiers à
comprendre. ..que la candidature de Coluche n’est pas anodine. Pour tester la
popularité.. ..de leur champion parmi les ouvriers, ..P. Juquin et C. Fiterman,
ses éminences grises, ..commandent un sondage.
-Je me revois avec C.
Fiterman en tête-a-tête avec G. Marchais. Et les
résultats nous sidèrent. Coup de tonnerre ! Coluche est devant. Devant G.
Marchais. Et c’est inquiétant. Ca lui paraît invraisemblable. Georges Marchais
médite ce sujet un moment avec nous. Et décide... De ne pas faire part du résultat
du sondage.. ..au Bureau politique.
-L’existence de ce sondage est dissimulée à
l’ensemble.. ..des militants communistes. G. Marchais refuse de prendre la
mesure de ce qui arrive au Parti.
-Cette intention de voter Coluche signifiait un
désaveu. Ou au moins un doute sur la capacité du Parti communiste, ..à cette
époque-là, de répondre aux vraies questions.. ..que se posaient le monde du
travail, les pauvres... Nous ne sommes plus jugés crédibles. Alors, on rejette
tout. Coluche ? Va pour Coluche !
-Coluche le clown devient un candidat sur mesure..
..pour les Français fâchés avec la politique. Ils sont de plus en plus nombreux
à rester sur le bord de la route. A 6 mois de l’élection présidentielle, la
France va mal.
C’est le début du chômage.. ..de masse. En mars 79,
..à Paris, des sidérurgistes. ..et des chômeurs d’extrême-gauche avaient..
..pris le contrôle de la capitale. Une insurrection urbaine jamais.. ..vue
depuis 1968. Les politiques, eux, ne semblent préoccupés que par leur destin.
V. Giscard d’Estaing ne se voit pas perdre l’élection. Loin du peuple, il s’est
enfermé sous les ors de la République. J. Chirac ne pense qu’à remplacer
Giscard. Et pour le peuple.. ..de gauche, Mitterrand n’incarne pas encore
l’espoir d’alternance. Alors, le message de Coluche fait mouche.
-On est dans la merde.. ..en France. Moi,
personnellement, ça va, j’ai gagne du pognon. Et je vais me tirer. Mais pour
ceux qui sont obligés de rester, c’est le bordel. Il y a une pyramide sociale
avec un mec en haut, tout seul. En ce moment, y a du vent. Et plus on descend,
plus on est nombreux. Et quand on est en bas, on est vraiment dans la merde.
Moi, je voudrais qu’on remue la merde.. ..et que l’odeur monte jusqu’au nez des
mecs qui dirigent. Qu’ils regardent vers l’intérieur du pays.. ..et qu’ils se
disent : il faudrait leur laisser un peu de pognon.
-Suivi par la caméra de Romain Goupil, ..Coluche
met en scène ses déplacements de campagne. En gardant son style très décalé, il
fait passer un message. Il ira jusqu’au bout, il va falloir compter avec lui.
-Le pire : rester coincé dans la voiture. Nous
voici arrivés dans une municipalité.. Qui s’apprête à me fournir une signature.
-C’est la 1re.
-ll s’agit d’une des premières signatures, en
effet. Grâce à nos amis qui nous attendent, monsieur le maire... Je suis ravi
de vous rencontrer.
-Moi de même.
-Ces hommes politiques qui s’intéressent a ma
candidature. ..me prouvent que je peux avoir 500 signatures. Eux savent que le
gouvernement n’a jamais rien fait.. ..pour les petits maires. Et pour améliorer
le sort des gens, il faut cavaler après l’argent. Ce qui est formidable dans
l’histoire, “c’est qu’ils ont mis la barre des 500 signatures.. ..pour éviter
les rigolos et c’est le pire des rigolos qu’ils auront.
-La royauté avait. ..son bouffon qui disait des
vérités. Si Coluche veut dire des vérités, je lui donne ma signature.
-16 décembre 1980. Deux mois seulement après sa
déclaration de candidature, ..le Journal du Dimanche fait sa une sur Coluche.
-Beaucoup tombent de leur chaise, quand même. Vous
imaginez Charlot se présentant aux Etats-Unis contre Roosevelt..
..et faire 16 %, vous voyez ? C’est une première
inimaginable. Il imite une sirène.
-Merde, arrêtez là ! Mais, alors !
-Dès lors, tout change. Les journaux titrent..
..sur Coluche. Un peu partout, des comités de soutien se mettent en place.
-C’est pour qui ? François ?
-Pour Coluche.
-L’élection présidentielle en France est la
rencontre.. ..entre un homme et un pays à un certain moment, oui.
-Ca ne pourra pas être pire que ce qu’on a vu. Ca
sera la Vle République.
-On va aussi monter un comité en Auvergne,
j’espère. “cette candidature pour rire cristallise autour d’elle.. ..toutes
sortes de sympathies.
-Les amis, les soutiens prennent désormais la
parole publiquement. LJn vent, de
-Je ne vote jamais mais si Coluche a ses 500
signatures, ..j’irai voter pour lui, c’est certain.
-Le risque de voir Coluche fausser complètement,
..par sa seule présence, ..devient une hypothèse réaliste, envisagée, ..qui
affole le monde politique.
-En France, depuis, toujours, les élections se
jouent à 4 points. Encore, je suis large, 2 points. C’est 47, 48 entre la
droite et la gauche. Il suffit qu’il appelle. ..à voter pour un côté ou pour
l’autre, ..sur les 16 points, il y en a bien 2 qui vont le suivre. Et là, ça
devient éminemment politique.
-Qui sont donc ces électeurs prêts à voter pour un
clown ? Le camp socialiste sait que la France de Coluche.. ..risque d‘empiéter
sur celle de F. Mitterrand. Le futur président est encore perçu comme un
apparatchik.
-Enormément de gens n’ont aucune envie de voter
Mitterrand. Même en se pinçant le nez. Il est resté très en retrait en 68, ..il
a eu maille à partir avec des gens de la guerre d’Algérie. Mitterrand est un
chiffon rouge. Ils trouvent que Coluche... Pourquoi pas. Et puis, au premier
tour, on s’en fout, on verra au second. Il faut mettre un grand... Un pavé dans
la mare, quoi.
-J. Séguéla s’occupe alors de l’image de F.
Mitterrand. Comme tout le camp socialiste, il s’interroge.
-Au début, tout le monde rit. Et puis, les
socialistes rient jaune. Ils avaient ri rose en pensant que ça apportait du
mouvement, ..que c’était créatif. ça commence à faire 10-12 %. Et là, attention
: « Va-t-on seulement être au second tour ? » Le phénomène qui se
passera après avec Le Pen.. ..aurait pu se passer avec Coluche.
-Ces légendaires 16 % attribués à Coluche..
..n’enlèvent pas 3 voix à Giscard. Ce n’est pas l’électorat UDF, ni Neuilly, ni
Passy. Ce ne sont pas les gens raisonnables qui voteront pour lui.