Création des comités sociaux d’entreprise[modifier | modifier le code]
Le seul bémol au pouvoir patronal dans l’entreprise consiste en la création des Comités sociaux d’entreprise (CSE). L’Office des comités sociaux est chargé de la mise en place de ces comités et de convaincre patrons, cadres et ouvriers de leur utilité. L’historien Jean-Pierre Le Crom (directeur de recherches au CNRS) considère que ces comités « seront la seule véritable réussite de la Charte, du fait principalement de leur utilité sociale, notamment dans le domaine du ravitaillement27. » On les avait donc affublés du surnom de « comités patate ».
Selon le juriste Maurice Cohen (directeur de la Revue pratique de droit social), « Leurs attributions, purement sociales, excluaient toute immixtion dans la conduite et la gestion des entreprises. Les employeurs composaient eux-mêmes à leur guise ces comités »28, du moins à l’origine. Le principe de l’élection est ensuite valorisé et les membres du comité sont élus. Le directeur de l’entreprise préside néanmoins le comité.
L’historien du droit social Jean-Pierre Le Crom (CNRS) estime que « l’institution des comités sociaux d’entreprise va connaître un développement impressionnant. En 1944, entre 8 000 et 9 000 comités sont constitués, rassemblant 80 000 délégués et environ 200 000personnes dans des commissions spécialisées. Cette réussite s’explique avant tout par leur utilité sociale. Les cantines, les coopératives de ravitaillement, les jardins ouvriers permettent d’atténuer les effets dramatiques de la pénurie et les crèches et colonies de vacances de faire face à l’augmentation du travail féminin. Dans certaines entreprises, les dépenses sociales des entreprises par salarié, gérées par des commissions spécialisées des comités sociaux d’entreprise, peuvent représenter jusqu’à la moitié du salaire direct. Pour les employeurs, confrontés à la fixation autoritaire des salaires par l’État, il s’agit aussi d’un moyen détourné d’augmentation des rémunérations, nécessaire pour fixer sur place une partie des ouvriers attirés par les salaires nettement plus élevés offerts par l’organisation Todt, notamment dans les zones côtières. L’utilité des comités sociaux d’entreprise est si évidente que le commissariat aux Affaires sociales du GPRF envisage dès le début 1944, à Alger, de les pérenniser après la Libération. Malgré l’abrogation de la Charte du travail, la grande majorité d’entre eux continuera d’ailleurs à fonctionner jusqu’à la mise en place des comités d’entreprise. » 29
Les comités d’entreprise actuels, créés par l’ordonnance du 22 février 1945 vont bien plus loin que les CSE du régime de Vichy : ils donnent à la fois un droit de regard ouvrier sur les entreprises et des rôles économiques aux CE. Mais, pour leurs activités sociale, ils sont les héritiers des CSE. Selon le juriste Jean-Marie Bergère, avec les Comités sociaux d’entreprise, « se trouve l’origine des activités sociales et culturelles de nos CE contemporains, au service d’une vision paternaliste de l’entreprise »30.