Ohh, comme je partage votre analyse et celle de Claude Imbert, qui décrit avec justesse les véritables causes (selon moi) de l’inadmissible immaturité démocratique et l’ignorance économique de beaucoup de français
L’éditorial de Claude Imbert http://www.lepoint.fr/edito/document.html?did=177264
Education : le mal court
Après la pitoyable déconfiture du CPE - et de l’Etat -, nous voici abreuvés de conseils sur l’art de réformer. Accueillons-les de bonne grâce puisqu’on y tient pour acquise la nécessité de réformes encore impossibles. Mais ne croyons pas que la nouveauté des méthodes suffira à dissiper la crispation dépressive de la société française. Il suffit de mesurer l’irréalisme de la révolte universitaire pour voir que le modèle français d’enseignement ne vaut pas mieux que le « modèle social ». C’est le même climat mental qui les inspire et les condamne. Ils sont fils de la même dérive collective : celle de la peur, celle de l’évitement du réel que l’on conjure à la fois par l’assistance et l’utopie.
De cette utopie l’enseignement, en France, reste encore la place forte. Et le dernier conservatoire de l’illusion marxiste. Une institution impotente, un appareil colossal, autogéré par la bureaucratie syndicale et qui oppose sa masse compacte à toute réforme. Il asphyxie les ministres que le pouvoir dépose comme des éphémères sur son incurable marais. Gouverné par la vulgate égalitariste qui nie la diversité des milieux et des savoirs - celle de la vie -, le système produit le même effet pervers que le « modèle social ». Rêvé pour unifier, pour égaliser sans la sélection qui départage, il ressuscite en fait la plus criante des inégalités : celle de l’argent ou de la naissance substituée à l’inégalité du mérite et du talent. De même que, dans le modèle social, les « avantages acquis » consentis aux salariés à emploi garanti pénalisent les chômeurs et accroissent leur déréliction, de même le mythe égalitariste du « bac pour tous » et la dévalorisation des diplômes laissent, sur le carreau des universités, une masse de jeunes désespérés. Tandis qu’à son écart resplendit le carré doré des grandes écoles, où triomphe une sélection impitoyable. Un carré aristocratique, performant, mais issu d’un milieu social étroit. Pendant ce temps, les universités paupérisées déclinent : la première française est au 46e rang mondial. 90 000 bacheliers désertent l’enseignement supérieur et embarquent dans les galères de la précarité. Jacques Marseille a dit ici l’urgence de rompre avec ce gâchis, peut-être le pire de tous pour l’avenir de la nation. Car les dégâts, bien sûr, ne se limitent pas à la débâcle universitaire. En amont, les 160 000 élèves qui sortent sans diplôme du secondaire, les naufragés qui ne maîtrisent ni la langue orale ni l’écrite, bref, toute une génération sacrifiée exige qu’on en finisse, là aussi, avec le « modèle français ». Il y a bientôt vingt ans, j’écrivais ici que ce modèle fabrique des culs-de-jatte pour consoler les unijambistes. Rien n’a changé depuis, sinon plus d’argent et plus d’effectifs pour un nouveau record d’inefficacité. Le mal court.
Si l’on observe le paysage de plus haut, c’est en vérité tout le cycle éducatif, depuis l’enfant jusqu’au jeune adulte, qui est atteint par l’effondrement de l’autorité du maître sur le disciple, de l’autorité fonctionnelle de celui qui dispense un savoir sur celui qui l’acquiert, une autorité saccagée par un certain jeunisme ambiant. La sacralisation de l’enfant roi, immunisé contre la sanction, écouté, toléré dans ses désirs et caprices, bercé par le mirage de carrières séduisantes mais bouchées, décervelé par un pédagogisme délirant, ce jeunisme a fomenté des foules adolescentes qui abordent les duretés de la vie avec une carapace en carton. Les parents eux-mêmes oublient que, par l’orthographe et le calcul puis par l’apprentissage progressif des savoirs, il ne s’agissait « pas seulement d’apprendre mais d’apprendre à vouloir » (1). Le jeunisme, dans son extrême complaisance, a désappris la manière et, plus encore, l’effort d’apprendre. Comment voudrait-on que ces jeunes jetés sans défense dans les précarités de la vie réelle ne soient pas ahuris et révoltés par les obstacles qu’ils découvrent ? Avant cette épreuve, sont-ils au moins heureux d’avoir été délivrés des « classiques », aujourd’hui ringardisés, d’avoir occulté les phares intellectuels et artistes de la tradition française ? Sûrement pas ! Le plus grand bonheur des disciples dans l’art et la pensée, c’est, à coup sûr - et plus que le respect -, la chaude admiration des grands, une admiration qui élève et exalte. Apprendre à admirer est au coeur du bonheur d’apprendre. Prenons garde au déversoir lancinant de la dérision et de ses acides sur toute forme de maîtrise, aux sarcasmes jetés sur la grandeur et le sublime. Ils risquent de susciter ces foules de zombies frigides qui demandent à la « défonce » des excitants de remplacer les ferveurs assassinées. Par bonheur, il se lève, dirait-on, ces temps-ci toute une volée d’enseignants, du primaire au supérieur, qui, devant la ruine manifeste, se rebellent et le font savoir. Il leur reste à conquérir, chez leurs pairs, la place qu’ils méritent. C’est dans les têtes et les coeurs d’hommes libres que la réforme peut oser s’affirmer contre la peur défaisante de la précarité. « Agir, disait Alain, c’est oser ; penser c’est oser ! »
07/06 20:04 - Jacques
Vous semblez oublier quelque chose d’essentiel. Dans une république démocratique, ce (...)
25/04 10:33 - philippe
eh,bien,tant pis pour nous ! etant donne que la societe francaise dans sa grande majorite (...)
24/04 16:52 - Voltaire
Quelques erreurs d’analyse dans cet article... Sur le CPE tout d’abord. (...)
24/04 10:51 -
Ohh, comme je partage votre analyse et celle de Claude Imbert, qui décrit avec justesse les (...)
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