J’ai fait les
études primaires dans une école de village où l’instituteur,
frais émoulu de l’École Normale, avait
la charge simultanée de 4 classes correspondant aux 4 derniers
niveaux de l’instruction primaire conduisant au fameux examen
cantonal.
Ajoutons que les
bourgeois qui n’étaient pas rares si l’on en juge par le nombre
de maisons de maître ou de petits castels qui émaillaient la
commune envoyaient leur progéniture en pension chez les pères.
Le multiculturalisme
en effrayait donc déjà certains ( rien de nouveau sous le soleil ) et
on ne mélangeait les torchons et les serviettes.
Dans la population à
qui le maître devait inculquer les bases du français et des
mathématiques plus des embryons de géographie , d’histoire et de
sciences naturelles, il y avait des cancres, des indifférents ou
ceux qui voulaient à tout prix bien figurer à l’issue du cycle.
On faisait
régulièrement des dictées et on apprenait de manière
consciencieuse la grammaire plus tous les outils syntaxiques qui nous
ouvraient les perspectives de la rédaction correcte, sésame
indispensable pour ceux qui ambitionnaient d’aller plus loin que
leurs parents, la plupart journaliers et peut-être pour certains
illettrés.
Pour autant que je
m’en souvienne, mon instit tirait fierté de « ses »
résultats aux examens cantonaux .
A l’époque, ceux
qui étaient incapables de suivre un cursus au-delà de l’élémentaire
voire incapable d’assimiler l’élémentaire lui-même ou à qui
les parents interdisaient la poursuite des études végétaient à
l’école jusqu’à 14 ans puis ils s’en allaient travailler en
usine ou à la ferme.
Cela ne posait aucun problème, c’était
le plein emploi, les bras manquaient partout.
J’en ai connu dont
la vocation fut contrariée par leur famille qui s’instruisirent
après le travail dans des écoles du soir et qui ont eu un parcours
de vie plus que valable.
Aujourd’hui,
paraît-il, une majorité (?) d’élèves sont incapables de
comprendre un texte au sortir du primaire et ne parlons pas de
l’orthographe, elle se réduit au langage SMS, ou du calcul quoique
je les soupçonne d’avoir en cette dernière matière des talents
cachés.
Les élèves ne sont
pas en cause ni leur origine ni le fait que l’on ne parle pas
français à la maison ( c’était le cas aussi à mon époque où
dans beaucoup de chaumières on parlait patois ), il faut donc
chercher ailleurs les responsabilités, peut-être dans un manque de
disponibilité des instits devenus des fonctionnaires, des lacunes
dans leur formation, une certaine irresponsabilité dans le chef de
ceux qui confectionnent les programmes ( et prônent par exemple des
études de langue étrangère pour des élèves qui ne maîtrisent
même pas les principes élémentaires de leur propre langue ).
Maintenant toutes
ces petites têtes blondes et brunes sont des virtuoses dans le
maniement de leurs tablettes ou i-Pad, ils s’inscrivent donc bien
dans la logique consumériste du système mieux que des vieux barbons
qui font l’effort de parler et d’écrire un français
correct.
Peut-être est-ce là l’avenir ?