Jeussey de Sourcesûre

Votre titre est des plus bizarres : une « guerre froide plus dangereuse que la précédente ». L’aboutissement de la précédente, aura été l’effondrement du système communiste et du mur de Berlin en 89 -une bien bonne chose, qu’on attendait depuis longtemps -, et je crois me souvenir qu’il n’avait pas fallu de bien grands massacres pour en arriver là. De 45 à 89, les bombes atomiques étaient restées bien sagement rangées, le seul moment un peu inquiétant ayant été l’affaire des missiles à Cuba. La stratégie de dissuasion nucléaire, pendant plus de quarante ans, aura fonctionné au mieux.

Au début du troisième paragraphe, vous écrivez « l’éventualité d’un conflit militaire américano-russe est encore plus visible en Syrie ». Il serait bien possible effectivement que, par suite d’une mauvaise coordination des forces en présence, un avion américain ou israélien fût abattu par les Russes, ou l’inverse ; cela refroidirait beaucoup les relations, donnerait lieu à une série d’échanges diplomatiques peu amènes, mais aucune guerre n’en résulterait, pas plus qu’après la destruction pourtant tout à fait délibérée d’un avion russe par les Turcs : les intérêts en jeu sont considérables, et il y a surtout de part et d’autre des milliers d’ogives nucléaires en réserve. Les Russes (mais aussi bien les Chinois dont vous parlez quelque part) ne sont pas plus suicidaires que les Américains. Ces nations sont condamnées désormais, par la force des choses, à s’entendre ou à se faire la gueule autant qu’elles le voudront, mais la guerre, la vraie, leur est interdite.

Je n’en dirai pas autant de la Corée du Nord. De ce côté-là, tout peut bien arriver du fait d’une simple erreur technique, encore que Kim Jong-un lui non plus ne soit pas suicidaire. Ce qui lui importe, c’est seulement de pouvoir se maintenir au pouvoir jusqu’au moment où un quatrième descendant de l’illustre et géniale famille dirigeante pourra un jour - dans très longtemps !- lui succéder. 

S’il faut craindre une guerre nucléaire qui obligerait l’Amérique et la Russie elles-mêmes à entrer dans la danse, c’est du côté de Téhéran qu’il faut regarder. L’islam est une religion suicidaire, particulièrement dans sa version chiite plus violente encore que l’autre où l’on n’hésite pourtant pas, quand on est jihadistes, à se gargariser de formules imbéciles du genre : « Nous aimons la mort comme vous aimez la vie ». Il est certain que l’inconcevable cécité des Européens sur cette question fait courir au monde le risque de la guerre la plus chaude. Il semble que Trump soit décidé - et c’est bien la moindre des choses - à refuser de contresigner le document par lequel il attesterait que l’Iran respecte les accords de Vienne (en fait, il vaudrait mieux dire : de Münich II), mais tout ce que l’Europe compte de parfaits crétins aura multiplié la semaine passée les pressions sur la Maison Blanche pour que les Iraniens, pendant huit ans encore, puissent tranquillement asseoir leur hégémonie sur le Moyen-Orient et, bénéficiant de la levée des sanctions, préparer leur petite surprise nucléaire comme l’avaient fait déjà les Coréens du Nord après la signature d’un autre traité du même tonneau que celui de Vienne, par lequel ils s’engageaient déjà à renoncer à l’arme nucléaire, ce qu’ils ne semblent pas avoir fait.

Rohani-Colgate, derrière un joli bouquer de fleurs, comme d’habitude, annonçait récemment une rallonge de 520 millions de dollars destinée aux recherches sur les missiles balistiques. On apprenait à peu près en même temps que grâce à la levée des sanctions économiques, il venait aussi d’accorder 800 millions au Hezbollah, pour ses bonnes oeuvres au nord du Golan.

Bref, avec votre guerre froide « pire que la précédente » -vous voulez dire probablement qu’elle tuera encore moins !-, vous nous prenez vraiment pour des autruches ensablées.