Lu quelques articles notamment dans les journaux allemands (Zeit on Line) qui traitent de cette question à la suite de la publication des« Cahiers noirs », il apparait clairement que pour Heidegger les juifs sont à l’origine de l’oubli de l’être et du déclin de l’occident.
Il leur reproche une incapacité de penser, une tendance à tout calculer, leur nomadisme, leur volonté de puissance cachée derrière leurs prophètes.
Non seulement il pense que le nazisme est une chance pour le réveil de l’Occident, mais il trouve que les nazis ordinaires sont trop tièdes. Il se voit, en tant qu’intellectuel, soit comme le Führer du Führer soit comme l’interprète de la pensée du dictateur.
Dans cet article il y a une tentative de situer, si ce n’est comprendre, à partir de l’histoire de la politique et des idées de l’Allemagne :
https://germanica.revues.org/2436https://germanica.revues.org/2436
Ce que j’en retiens pour l’instant :
Différence entre corrélation et dépendance, entre philosophie nazie et philosophie du nazisme, Heidegger aurait pu existé sans le nazisme, et le nazisme aurait pu exister sans Heidegger.
Mais il y a une corrélation.
Le nazisme n’est pas apparu ex nihilo dans l’histoire allemande, il est enraciné dans une tradition qui remonte à la Réforme, il y a eu une dissociation entre l’intelligence et la pensée. L’évolution doit passer par l’intérieur et les individus, pas par des réformes extérieures. Les masses doivent obéir un chef. Construction tardive de l’unité allemande. Politique pensée d’en haut. Il y a un effet de ressentiment sur le peuple qu’Hitler va exploiter non inventer. Le communisme et le capitalisme sont utilisés comme repoussoirs et le juif est considéré comme complice des deux.
Correspondance : Hitler détruit la démocratie avec les armes de la démocratie, Heidegger détruit la raison avec les armes des la raison.
L’adhésion au nazisme est partagée par les intellectuels en grande partie, tradition allemande, prussienne, unité raciale, exaltation de la volonté, la violence et les idées sont enracinées dans ces prémisses, ce qui est nouveau, c’est la bonne conscience avec laquelle on accepte les choses.
La corrélation, avec la philosophie : constat de l’échec de la philosophie occidentale, déconstruction de la tradition philosophique, mais ceci aussi est inscrit dans l’histoire de la pensée allemande, conflit entre la raison et sa négation, mais alors qu’avant il y avait puissance, volonté, sentiment contre raison, avec Heidegger c’est la raison qui détruit la raison. Avec le nazisme la non raison, il faudrait dire la folie, atteint son point culminant en opposition la plus totale avec tout ce qui avait été civilisation et éclairé auparavant.
Le lien de la raison avec la politique, c’est qu’elle permet l’échange et une certaine objectivation, le rejet de la raison mène à une indifférence politique car c’est le prince ou le führer qui est éclairé, et la transformation passe par l’intérieur.
Heidegger affirme qu’il veut rompre avec tout ce qui avait été fait avant lui, mais d’autres on eu les même prétentions : Hegel, Kant, eux aussi sont remontés au-delà de Platon. Heidegger a conscience que ses chemins ne mènent nulle part (titre d’un de ses livres, ce sont des chemins d’exploitation dans les bois qui n’ont pas pour but de relier deux lieux).
Hegel et Heidegger représentent deux pôles opposés, avec l’un c’est le triomphe de la raison, qui conduit à la prééminence de l’état, danger perçu par Heidegger, avec l’autre celui de l’anti-raison, dans les deux cas on se méfie de la société civile, mais là où Heidegger aurait pu choisit l’anarchie, il se tourne vers le national-socialisme. Heidegger se voit comme un Führer dans l’ordre de la pensée, c’est lui qui s’investit de la mission d’interpréter. La démarche de Heidegger est un suicide de la philosophie.