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Commentaire de Luc-Laurent Salvador

sur René Girard : « Freud et le complexe d'Oedipe »


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Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 26 février 2018 16:19

@Gollum

Le désir qu’un homme ressent pour une femme n’est pas (seulement) un instinct naturel. Il a en effet reçu une éducation qui lui a permis de se forger une représentation du désirable. Quand il trouve celle qui semble coller à cette représentation, il a un flash, les yeux qui sortent des orbites et le coeur qui bat la chamade. ça semble terriblement biologique et pourtant, c’est toujours-déjà mimétique. Girard a ici implacablement raison et encore plus dans le cas où la représentation de l’être idéal n’est pas achevée comme c’est le cas pour la plupart des humains. Dans ce cas, quand il n’y a pas de grand A(utres) qui, dans notre vie, ai(en)t su nous dire clairement ce qui est désirable, ce sera les petit a(utres) qui nous entourent qui influenceront de manière décisive le processus de choix. Et l’on trouvera alors ces situations triangulaires. Mais dans tous les cas, nous ne sortons pas de la sphère mimétique.
 
Le Christianisme fait une lecture sacrificielle de la Passion et à l’exception de la fin des années 70, Girard est complètement d’accord avec ça. Donc il n’y a pas de problème de ce côté et y en aurait-il eu que ce n’aurait pas été un argument contre sa théorie, seulement un argument ad personam sans valeur.
 
Comparaison n’est pas raison. Je me fiche de Freud. Camille Tarot n’est pas un rigolo. Il a produit un bouquin énorme de comparaison théorique en anthropologie et c’est Girard qui sort gagnant. Il va vous falloir « encaisser » ça. Dorénavant, pour démonter Girard, vous allez devoir démonter les analyses de Tarot qui est un véritable spécialiste d’anthropologie. Pour ma part, cela suffit à exclure l’idée de Pommier que Girard puisse être un farfelu mégalo. Aucun balayage d’un simple revers de la main n’est plus possible.
 
Si vous aviez « intégré » la pensée girardienne vous ne pourriez manquer de remarquer qu’un auteur qui entame son livre en se polarisant sur l’ambition démesuré de son adversaire pour en faire un argument ad personam est, nécessairement, lui-même travaillé par une même ambition démesurée. Il commence par cela, il en fait son thème premier parce qu’il est premier pour lui, parce que c’est là où il est (narcissiquement) blessé, là où ça lui fait mal et donc, parce que c’est ce qui le motive, c’est là où il veut atteindre l’adversaire. Cette polarisation toute mimétique l’empêche de voir que celui qui est étranger à la chose (le lecteur lambda) trouvera nécessairement incongru de commencer un livre d’analyses prétendument sérieuses par une telle argumentation ad personam tout à fait spécieuse.
 
En traitant Girard de rigolo sur cette base argumentative, avec un propos plein d’ironie, Pommier démontre involontairement que c’est lui le rigolo ET qu’il se trouve inscrit dans une rivalité mimétique telle que celles que Girard n’a cessé de repérer tout au long de Mensonge romantique et vérité romanesque. Il s’est pris au piège lui-même. C’est idiot, et très amusant je dois dire.
 


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