@Cadoudal
A propos du Monde, le réaction, outrée, de Son Excellence l’Ambassadeur de Hongrie à Paris, sur Facebook :
Les Hongrois ont voté et ont
clairement exprimé leur opinion, en dépit de la mise en condition de l’opinion
française au moyen des deux pages consacrées à la Hongrie par Le Monde daté du 6 avril dernier,
et qui sont un véritable morceau de bravoure.
Sur une page entière, nous avons
droit à des révélations stupéfiantes sur la situation en Suède, dont on cherche
en vain le lien avec les élections législatives hongroises. Nos amis Suédois
apprécieront l’instrumentalisation. Jean-Baptiste Chastand, qui manie le
dénigrement et le discrédit avec une aisance qui force l’admiration, prend la
peine d’administrer une leçon de déontologie à ses collègues du service public
hongrois. Grâce au Monde, ces derniers sauront désormais comment il convient de
présenter un journal télévisé. Cette sollicitude nous touche, elle un bel
exemple de coopération européenne entre professionnels. Le thème de la leçon :
« les journalistes hongrois n’ont procédé à aucune vérification, à aucune
relativisation ». On croit rêver. A quelles vérifications, à quels efforts de
relativisation ou de compréhension le Monde procède-t-il donc, lorsqu’il
dépeint la Hongrie comme l’antre de l’illibéralisme, de l’antisémitisme, de la
xénophobie, de la corruption, de la mise au pas de la justice, du bâillonnement
des médias, de la mort de l’Etat de droit ?
Non Monsieur Gauquelin, réagir à des
articles de presse n’équivaut pas à discréditer les médias. Cela équivaut à les
traiter pour ce qu’ils sont : des organes de pouvoir. Au lieu de prendre la
mouche, vous devriez en être honoré, et aussi en accepter les conséquences.
Arrêtez de crier au scandale, vous n’êtes plus audible. Merci en tout cas
d’avoir fait discrètement allusion aux « ambassadeurs qui, à chaque mention ou
presque de la Hongrie dans un article, sont prompts à réagir sur Facebook et dont
les lettres ouvertes se retrouvent parfois sur le blog du porte-parole du
gouvernement M. Kovács ». J’ai cru me reconnaître. Vous auriez pu ajouter que
ma lettre ouverte s’est retrouvée aussi sur le très européen site bruxellois
Politico, cela m’aurait fait plaisir. Au lieu de cette allusion tardive et
piquée, j’aurais trouvé plus correct quelques lignes de réponse de la part du
journal. Question de savoir-vivre. Quant à Facebook et à la lettre ouverte, ce
sont mes seuls moyens d’expression puisque le Monde ne me laisse pas m’exprimer
dans ses colonnes, contrairement à une opposante professionnelle à laquelle une
large tribune a été consacrée dans le numéro de samedi (son propos pouvait être
récité d’avance). J’y vois le souci du Monde d’offrir à ses lecteurs une
information aussi bétonnée que possible. Et puis, ne tombez pas dans la
paranoïa : tous les articles ne donnent pas lieu à des « complaintes » (votre
excellent papier sur les points forts et les points faibles de l’économie
hongroise paru dans le Monde du lendemain montre ce dont vous êtes capable), je
ne pense pas non plus être un boulimique des courriers aux journaux, mais
certains papiers ne peuvent pas rester sans réaction.
Les Hongrois ont donc voté. A
l’heure où j’écris, il semble qu’ils aient envoyé au Parlement une très large
majorité Fidesz. A l’évidence, ce n’est pas le scénario souhaité par le Monde.
Ses propagandistes en resteront donc pour leurs frais. Là aussi, le wishful
thinking de Blaise Gauquelin, qui cherchait désespérément à démontrer que le
Fidesz était en retrait dans les sondages, qu’une majorité était contre lui
(évidemment : il ne faisait « que » 45% des intentions de vote, il en a eu
presque 50) et qu’il y avait des cas de figure où il pourrait être battu, avait
quelque chose d’émouvant. Cela me rappelle les analystes qui nous expliquaient
doctement l’année dernière, « preuves » à l’appui, que Marine Le Pen avait «
des chances » de battre Emmanuel Macron. Il semble cependant que les électeurs
hongrois aient été plus avisés que les meilleurs « experts » prévisionnistes
sollicités par le Monde.
Et cette nuit, m’endormant sur les
résultats des élections, I had a dream : le Monde sera-t-il capable, un jour,
de faire l’effort de comprendre la Hongrie ?
Georges Károlyi
Et toc