Le son compressé, suppression des nuances dans les intensités sonores :
" Christian Hugonnet : Il s’agit d’un phénomène consistant à supprimer les écarts entre les sons forts et les sons faibles,
autrement dit à relever le niveau sonore d’un son faible pour qu’il
soit mieux perceptible et inversement diminuer un son trop fort. Ainsi le mot chuchoté est-il perçu avec autant d’intensité que s’il était prononcé à voix haute.«
»La compression du son n’est pas en soi un phénomène nouveau. Ce qui est nouveau en revanche, c’est le fait qu’elle soit omniprésente.
À la radio, à la télévision, dans les salles de concert, sur les
consoles de jeux vidéo, le son compressé finit par remplacer de manière
quasi systématique le son naturel. Or un son naturel est modulé, il comporte des nuances, des pauses, des « respirations ». Ces respirations, ces silences, sont essentiels pour l’oreille comme pour le psychisme.«
»En effet la compression donne une musique sans nuance. Imaginez
le Boléro de Ravel sans son long crescendo. Sur le plan musical c’est
désastreux ; on part à 80 dB, on arrive à 80 dB ! Mais le but de la
compression n’est pas qualitatif. Cela vise à situer le son au-dessus du
bruit ambiant. Il est donc mieux entendu, y compris dans des lieux très
animés comme la rue ou le métro. Mais en même temps ces sons véhiculent
une énergie importante, ils fatiguent l’oreille qui n’est pas faite
pour supporter cette stimulation permanente.
L’oreille a besoin de temps de silence, de temps de récupération. On le ressent intuitivement : quand certaines émissions se terminent, on éprouve une forme de soulagement.
Par ailleurs, l’écoute régulière de sons compressés rend l’oreille
paresseuse. Elle n’a plus besoin de faire une gymnastique permanente
pour s’adapter aux modulations du son. Elle a donc de plus en plus de
difficultés à percevoir les sons faibles."