Les forces agissantes de la Maternité ont créé une humanité droite, docile, disciplinée.... d’abord, jusqu’au débordement des passions de l’homme. Mais, pendant cette époque primitive, quel Paradis était la Terre !... Nulle révolte ! nul mensonge ! nulle rébellion !
Dans tous les hommes, à moins qu’ils ne soient des monstres, le souvenir maternel a laissé dans l’âme une impression profonde faite de respect et de tendresse sacrée.
Si tous les enfants étaient élevés dans la Vérité, il n’y aurait pas d’homme méchant.
En effet, la Maternité occupe une place immense dans les anciennes traditions. La glorification de la Mère est restée dans toutes les religions issues de la Théogonie primitive.
En effet, de toute la Terre, le régime féminin a précédé le régime masculin et il a dû avoir une longue durée de prospérité et de paix, puisque, au moment où commence l’histoire, c’est-à-dire le règne de l’homme, les nations ont une langue bien formée, l’écriture, et des institutions sociales qui serviront de base à l’organisation future des sociétés.
Aussi, dans l’âge primitif de l’humanité, cette suprématie féminine avait trois formes, donc trois aspects.
Elle était religieuse (Théocratie) et représentée par la Déesse.
Elle était familiale (matriarcat) et représentée par la Mère.
Elle était sociale (gynécocratie) et représentée par la Maîtresse (Reine ou Déesse-Mère) (Içwara chez les Hindous et qui donnera le nom Israël).
La Théocratie dura ce que dura la gynécocratie, puisque ce régime, c’est le règne de la direction morale exercée par la Femme divine. Plus tard les hommes en firent une parodie ridicule.
C’est la Femme qui élève l’homme et le mène à la Vérité et à la beauté morale ; c’est la Mère qui le fait à son image, c’est la Déesse terrestre vivante qui lui enseigne la première la langue divine. C’est Elle qui a en main le gouvernement des sociétés, Elle qui les guide dans leur marche évolutive, en attendant que vienne la révolte de l’homme contre Elle.
La Théocratie féminine, c’est le gouvernement légitime ; il occupe une place immense dans l’histoire.
Jusqu’au 10ème siècle avant notre ère, la Femme a régné et fait régner la Vérité. Son verbe, c’est cette voix des temps primitifs entendue par les premiers poètes qu’elle inspirait.
La légende d’une époque de bonheur dans un Eden est répandue partout.
« Dans la vocation initiative de la Femme, dit Bachofen, la gynécocratie trouve sa profonde expression. La Justice, la Vérité, toutes les grandes vertus humaines sont d’origine féminine.
« Le principe religieux de la gynécocratie nous montre le droit maternel dans sa forme la plus digne et nous fait voir toute la grandeur de cette antiquité. Les hauts et les bas de l’histoire découlent directement de cette source divine. Sans elle nous ne comprendrions aucune page de la vie antique, la vie primitive surtout serait un mystère impénétrable ».
Il est bien entendu que la Religion dont Bachofen parle ainsi, c’est la Religion naturelle, la Théogonie, et que la déchéance sociale est venue des religions surnaturelles.
L’antique gynécocratie est le fonds du monde, ce roc des sociétés. Ecoutez Bachofen ; il vous dira :
« L’humanité doit à la Femme sa primitive élévation, ses premiers progrès, son existence réglée et surtout sa première éducation religieuse et morale, elle doit à la Femme les jouissances d’un ordre supérieur. Toute la première civilisation est son œuvre propre. C’est à elle qu’on doit la première connaissance des forces naturelles. Vue ainsi, la gynécocratie est la période éducative de l’humanité en même temps que la réalisation des lois de la Nature, qui s’appliquent aussi bien au bien de l’individu qu’à celui de l’espèce ».
Les poètes exaltent leurs sentiments d’égalité et de fraternité. C’est particulièrement chez les gynécocrates que l’on réprime sévèrement le mal fait à son prochain, même fait aux animaux.
Les signes de la plus belle, de la plus grande humanité distinguent la civilisation des mondes gynécocratiques et lui font une physionomie où se reflètent toutes les grâces, tous les bienfaits que la maternité porte en elle-même. C’est le bonheur : avec sa disparition la paix s’envola de la terre. On peut dire que l’époque gynécocratique fut la Poésie de l’histoire, par sa grandeur héroïque, par la beauté sublime qu’elle donna aux femmes, par le développement des idées de courage, de valeur, par les sentiments chevaleresques qu’elle inculqua aux hommes, par l’importance qu’elle donna à l’amour féminin, par la discipline et la chasteté qu’elle imposa à l’adolescent.
On peut se demander où sont ces héros sans peur et sans reproche, fidèles serviteurs de la Féminité ! « Tous les peuples guerriers obéissaient à la Femme », dit Aristote.
Braver les dangers, chercher les aventures, servir la beauté, telles étaient et seront toujours les vertus d’une jeunesse forte et virile.
« O poésie de ces temps passés ! Vous avez disparu avec les siècles de gynécocratie, avec les émotions généreuses, inaccessibles aux poètes de nos jours, civilisés mais énervés. »
Livres de Femmes, Livres de Vérités