La laicité sur le papier, c’est la tolérance et la liberté de conscience, couplée à l’interdiction d’intervention du religieux dans la sphère étatique, donc c’est très bien. Les non croyants n’ont pas à subir d’injonction religieuse, et les croyants sont libres de s’organiser comme ils veulent et de célébrer ce qu’ils veulent (dans les limites des lois restreignant la liberté d’expression).
Pour s’imposer, le principe de laicité a du s’en prendre au religieux (chrétien), avec comme croyance de remplacement l’humanisme et la république. Le problème est que la croyance républicaine en l’homme (liberté — égalité — fraternité) et le relativisme associé n’ont pas réussi à combler le vide créé par l’évincement du religieux. Plus précisément, la mise au centre de l’homme-individu théoriquement libre, égal et fraternel dans un monde athée à débouché de fait sur l’explosion du narcissisme et du matérialisme, générant une société de frustration qui dérive vers une société violente.
Les pouvoirs temporels chapeautant les différentes civilisations ont été légitimés d’abord par des croyances et rites paiens polythéistes (époque des shamans, prêtres, druides) puis par des croyances et rites monothéistes (époque des rois très chrétiens), qui validaient le sentiment collectif d’appartenance à une communauté de condition/destin. Depuis le rejet du religieux par le pouvoir temporel (laicité), et la nature ayant horreur du vide, des communautés de remplacement se créent (communautés sexuelles, communautés de loisir, communautés de posture politique, communauté d’abrutissement télévisuel, communauté de désignation des coupables (les pas écolo, les mangeurs de viande et autres) etc etc) tant il est vrai que l’homme a un irrépressible besoin d’appartenance. Mais ces communautés qui ne valent pas tripette oeuvrent d’abord à l’atomisation du collectif.
La laicité, c’est le rejet officiel du spirituel par la société humaine organisée. Au vu des catastrophes en -isme générées par les sociétés a-spirituelles laiques (communisme, nazisme), et au vu de la désintégration rapide du ciment social et culturel de nos sociétés occidentales, pas sur que ce soit finalement un grand progrès.