Merci à Régis Desmarais pour ce bel article. Pour moi, on tombe en plein conflit d’éthique.
D’un côté, on a des règles parfaitement adaptées pour des situations « normales » : on déconseille les antibiotiques pour des infections virales pour des patients sans fragilité particulière (mon cas personnel : grippe = 0 traitement, aspirine seulement si je dépasse 39, en général cela dure 48h). Le but, très louable, est de réserver l’antibiothérapie pour ceux qui en ont besoin. Mais, en faisant cela, on peut générer des complications chez certains (rapport coût/bénéfices mesuré au global, après prise en compte de tous les paramètres).
Et on insiste fortement (euphémisme) pour que les médecins de ville restent dans ces clous, et qu’ils respectent scrupuleusement les AMM des médicaments préalablement testés en double aveugle.
On est actuellement en situation exceptionnelle, et on demande aux médecins de ville de respecter scrupuleusement ces règles, édictées pour des temps de paix, alors que :
Aucun traitement testé en double aveugle n’a, pour le moment, prouvé son efficacité
Le risque de complications est bien supérieur à la grippe. Si ne serait-ce qu’une antibiothérapie sur 20 permet d’éviter une réanimation, ce sera toujours cela de gagné (pour le patient, mais également en terme de résistance aux antibiotiques, favorisée par l’intubation)
Certains médecins de ville, en partageant leurs résultats, pensent avoir réussi à mettre en place un traitement qui fonctionne (cohérent avec certaines pratiques hospitalières voire avec des prépublications scientifiques) . Il s’agit d’un réseau informel, mais, étant donné le nombre de cas traités, cela pourrait devenir bientôt statistiquement significatif.
Et il y a l’expérience propre des médecins de ville, au plus près de leurs patients, leur intuition, leur capacité à établir un diagnostic et à proposer un traitement. Après des mois d’errance thérapeutique auprès de nombreux spécialistes, un médecin de campagne avait suggéré à mon grand père qu’il pourrait être atteint de la maladie de Pompidou, ce qui s’est révélé juste.
J’ai énormément de respect pour tous ces médecins de ville qui, en leur âme et conscience, et du haut de toute leur science, prescrivent ces traitements qui, empiriquement ont fait leurs (commencent de) preuve même si ils n’ont pas encore pu être testés selon « l’éthique médicale » officielle.
Ethique personnelle du médecin de ville contre éthique médicale « officielle ».