• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile


Commentaire de Mélusine ou la Robe de Saphir.

sur Quand l'électeur prend la mouche


Voir l'intégralité des commentaires de cet article

Mélusine ou la Robe de Saphir. Mélusine ou la Robe de Saphir. 3 février 2022 13:13

Vous critiquez les « en même temps » de Macron ?

Non. Le « en même temps » est différent du « oui d’accord mais tout de même » des girouettes, des couilles molles et des prudents qui attendent le sens du vent et cèdent à leur peur. Ces prudents sont redoutables ; ils croient lutter contre le crime en diluant la responsabilité, en décortiquant les motifs du criminel et en affirmant qu’il n’est pas si criminel que cela. Cette modalité de la prudence qui se vit comme de la pondération ou de la hauteur de vue est la modalité de la trouille et le pire ennemi de la démocratie.

Mais à l’instar de ce qu’offre la sociologie, n’est-il pas intéressant de chercher à comprendre ce qui a pu mener un criminel à le devenir ?

Comme Spinoza, je considère en effet qu’il n’y a pas de libre arbitre. Ce qui relève du libre arbitre relève de l’ignorance des causes réelles qui nous font agir. Quantité de déterminations se cachent derrière chacun de nos actes, il n’y a donc pas de décision libre. Pour autant, à l

Quantité de déterminations se cachent derrière chacun de nos actes, il n’y a donc pas de décision libre. Pour autant, à l’échelle d’une société, les individus doivent être tenus pour responsables de leurs actes - c’est aussi ce que dit Spinoza. Il est monstrueux de dire que l’assassin est d’abord la victime de la société. La sociologie a donc toutes les vertus explicatives, mais échoue dans la tâche que certains sociologues se donnent et qui consiste à disculper le coupable. Là est le seuil à ne pas franchir. Non, le crime des frères Kouachi n’est pas soluble dans les difficultés vécues dans leur enfance.

Revenons à la distinction que vous établissez entre le « trop prudent » et le nuancé ; entre le « oui d’accord mais quand même » et le « en même temps ». Comment la définissez-vous ?

En 2017, le « en même temps » de Macron était une considérable valeur ajoutée dans le débat. Ce n’était pas une façon de dire que tout le monde a raison ou a ses raisons, mais de dire que tout le monde a un peu de la vérité en partage, que l’on peut souscrire non pas à deux vérités, mais s’intéresser au point de vue de l’autre et à ce qu’il peut avoir de fécond dans la résolution d’un problème ou dans la recherche de la vérité. C’est aussi toute la différence que j’établis entre une nuance et u

une synthèse. Dire que « le blasphème n’est pas du racisme » est une nuance qu’il faut sans cesse rappeler. La synthèse serait de dire : « ne fâchons personne, et comprenons ceux qui trouvent que c’est raciste ». C’est avec de tels propos que l’on bascule dans la démission.

En quoi nos débats sur les réseaux et sur les plateaux de télévision ne seraient-ils pas de véritables débats ?

Car nous ne laissons plus nos préjugés aux vestiaires et que nos propos deviennent des professions de foi arrogantes qui se juxtaposent. S’il fallait résumer les choses, je dirais que le paradigme de la contradiction a cédé la place à celui de l’opposition. Deux individus en désaccord qui développent une argumentation dans un langage commun et la soumettent à la contradiction de l’adversaire œuvrent à la liberté collective. La juxtaposition de monologues nerveux, ce à quoi nos débats se réduisent en général, n’a plus rien à voir avec cela. Aujourd’hui, on croit avoir débattu quand on a dit ce que l’on avait à dire. Or le vrai débat advient au contraire quand on a entendu ce que l’autre avait à dire. Regardez les débats présidentiels : il est très rare d’entendre un candidat admettre que sur tel point, après discussion, il reconnaît avoir tort. Dans un monde où chacun est le mandataire des gens qui pensent comme lui, la reconnaissance de son erreur est immanquablement perçue comme un aveu de faiblesse. L’humilité est donc devenue une faiblesse. Dans ses Essais, Montaigne écrivait au contraire qu’il se sentait plus fier de la victoire remportée sur lui-même en changeant d’avis à la suite des arguments de l’adversaire, que de la victoire acquise grâce à la faiblesse de son contradicteur.



Voir ce commentaire dans son contexte





Palmarès