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Commentaire de Jean-Luc Picard-Bachelerie

sur Discours de Macron nous invitant sans coercition à la sobriété


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Jean-Luc Picard-Bachelerie 9 octobre 2022 14:22

@Soucougnan

Désolé de vous le dire, mais vous parlez de ce que vous ne connaissez pas. Le libéralisme capitaliste, dit libéralisme classique d’avant 1929, laissait faire. Le néo-libéralisme est une réaction contre ce laisser-faire qui a produit plusieurs crises financières et économiques. La dernière en date et la plus grave étant celle de 1929. Lippmann avait déjà vu que ce libéralisme ne fonctionnait pas et avait commencé ses recherches dès avant la première guerre mondiale. 
Après 1929, le keynésianisme a été le système adopté par Eisenhower et, au fur et à mesure, par tous les pays capitalistes. Ce qu’on appelle le protectionnisme, l’étatisme libéral au Japon et en Allemagne, la tradition sociale-démocrate en Europe du Nord, l’interventionnisme et colbertisme en France. La thèse centrale du keynésianisme est que les marchés laissés à eux-mêmes ne conduisent pas à l’optimum économique, et que l’État a un rôle à jouer dans le domaine économique pour pallier les défaillances des marchés. Il est donc nécessaire pour la puissance publique de mettre en œuvre des politiques de stabilisation et de soutenir l’emploi plutôt que lutter contre l’inflation. Il faut dire que des millions de gens se sont retrouvés à la rue en 1929. 
En 1938 a eut lieu en France le colloque Lippmann qui a officiellement inventé le néolibéralisme. Différentes écoles étaient présentes dont l’école autrichienne de Hayek et l’ordolibéralisme allemand. Après la guerre, le keynésianisme s’est étendu tandis que les néolibéraux rongeaient leur frein. À partir des années 70, le keynésianisme a marqué ses limites avec des phénomènes de stagflation. Friedman et l’école de Chicago sont alors entrés en jeu avec un néolibéralisme qui avait eu le temps de prendre de la maturité. 
Pour voir si le néolibéralisme fonctionnait, les Etats-Unis de Nixon ont voulu l’essayer. Ils ont donc organisé le coup d’État au Chili pour installer Pinochet au pouvoir avec la feuille de route de Milton Friedman. Le néolibéralisme était au pouvoir pour la première fois. Normalement, le néolibéralisme n’est pas violent physiquement. Il l’est par ses méthodes de manipulation douce. 
Au bout d’un an, des milliers d’exécutions, le Chili exsangue. Pas de souci, les EU ont recommencé en Argentine en plaçant Vidella avec un néolibéralisme amélioré. Mêmes conséquences.
Qu’à cela ne tienne.
Dans les années 80, arrivent Margaret Thatcher puis Ronald Reagan qui eux, vont aller vers l’ultralibéralisme. Là, c’est simple, il s’agit de laisser aux marchés toute la liberté et de réduire l’État aux fonctions régaliennes (police, justice, armée), le principe étant que l’Etat est l’emmerdeur du capitalisme. En France, Mitterrand étant dans des difficultés économiques se dit que c’était certainement la solution puisque Margaret avait décrété : « There is no alternative », «  Il n’y a pas d’autre choix ». Notre socialisme est devenu libéral mais pas tout à fait ultralibéral car Mitterrand tenait tout de même à un État relativement fort. Disons qu’il aimait le pouvoir et faire 2 ou 3 petites choses au niveau sociétal. Le problème est que les dégâts ont continué. En 1991, la chut du mur et l’effondrement de l’URSS offre au monde occidental et donc capitaliste la victoire. Le capitalisme va enfin pouvoir s’étendre. C’est à partir de ce moment-là qu’on a eu vraiment besoin des techniques néolibérales, c’est-à-dire, celles de la manipulation des masses. Cela dit, Bernays avait inventé la propagande en 1928, pour gentiment influencer les gens, jusqu’au moment où il s’est rendu compte que son bouquin « Propaganda » était le livre de chevet de Goebbels.
Donc sont arrivés dans la foulée les gouvernements invisibles avec leurs cohortes de cabinets d’experts en psychologie comportementale et la fabrique du consentement. 
Le néolibéralisme prône un interventionnisme au contraire de l’ultralibéralisme et du libertarianisme, a fortiori. Mais cet interventionnisme agit sur :
— l’éducation des gens par le nudge (coupe de pouce du comportement) afin qu’ils s’adaptent parfaitement au marché, c’est-à-dire, qu’ils aient le comportement attendu.

— les réformes nécessaires pour que le marché soit libre et non faussé. 
C’est ce que fait Macron. Son autoritarisme est une faute selon les « lois » néolibérales, car tout devrait se passer en douceur. 
Oui, mais voilà, les gens ont un peu de caractère et surtout n’aiment pas souffrir. Et le capitalisme ne correspond pas à une manière de vivre adaptée à l’environnement naturel. Tout crève et du coup, le marché libre et non faussé ne fonctionne jamais bien.

Vous revendiquez être pour "le laisser-faire, la non-intervention de l’état dans le jeu économique". Or, le capitalisme libéral a fait la preuve après le libéralisme classique du XIXe siècle, le keynésianisme du XXe, l’ultralibéralisme des années 80 et le néolibéralisme que ça ne marchait pas. Vous n’allez tout de même pas dire que le système fonctionne bien en France et en Europe. Le nombre de pauvres a été multiplié partout, la croissance n’avance plus depuis près de 20 ans (c’est général à la terre entière désormais), la précarité devient un mode de gestion quasi normal. Et surtout, le monde du vivant agonise et les espèces qui ont disparu ne reviendront jamais. 
Et si vous étiez réellement sincère et lucide, vous appelleriez votre libéralisme, capitalisme libéral. Vous êtes avant tout capitaliste et c’est cela qui est en train de nous tuer. Le point commun du libéralisme classique, du keynésianisme, de l’ultralibéralisme et du néolibéralisme c’est que ce sont différentes méthodes capitalistes. Ca ne peut donc pas marcher puisqu’à cause de lui (on préfère dire « à cause de l’humain » pour cacher la vérité), nous avons dépassé 6 limites planétaires sur 9. Et que c’est désormais irréversible. Désormais, il ne s’agit plus de vivre mais de survivre.
N’essayez pas de m’expliquer le néolibéralisme tant que vous ne vous serez pas suffisamment renseignée. 


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