Le sociologue russe G. Ioudine avait mis en garde contre la guerre quelques jours avant son déclenchement dans un article célèbre. Un an après dans une interview au media Meduza il revient sur les causes de cette guerre, ses perspectives, la passivité de la population, la nature de l’impérialisme russe et les ressources de la culture russe pour articuler sa critique et proposer une alternative. Extrait d’un interview passé dans Médiapart
"Cela signifie qu’on peut considérer que son véritable but est de permettre à Vladimir Poutine de conserver le pouvoir ?
—C’est à peu près la même chose. Il pense son règne comme une guerre permanente. Poutine et ceux qui l’entourent nous répètent depuis longtemps que nous sommes en guerre. Certains ont préféré faire semblant de ne pas entendre, mais ces gens-là pensent sérieusement qu’ils participent depuis longtemps à une véritable guerre. Simplement cette guerre vient d’entrer dans une phase agressive dont visiblement on ne sortira plus. Pour ceux qui partagent cette vision du monde, la guerre est par principe une chose normale. Cessez de penser que la paix est un état de chose naturel, et vous commencerez à voir la situation comme ils la voient. Comme l’a déclaré le gouverneur du district autonome des Khantis-Mansis, Natalia Komarova, « la guerre est notre meilleure amie ».
Il suffit de rappeler l’ultimatum adressé par Poutine aux USA et à l’OTAN en 2022 à la veille de la guerre : il y est presque sérieusement affirmé, noir sur blanc, que toute l’Europe orientale appartient à la sphère d’influence personnelle de Vladimir Poutine. Comment cela devra être réalisé, avec ou sans perte de souveraineté formelle, cela n’a aucune importance. De plus cette zone inclut, sans aucun doute, l’Allemagne de l’Est, tout simplement parce que Vladimir Poutine y est attaché par quelques souvenirs personnels. J’ai du mal à croire qu’il ne pense pas que ces territoires lui appartiennent réellement. Poutine a définitivement l’intention de restaurer la zone du Pacte de Varsovie, et pour le reste on verra plus tard.
On m’objecte souvent : « C’est du délire, cela ne peut pas être ! C’est irrationnel, c’est de la folie, il n’y a aucune possibilité que cela arrive ! » Je rappelle cependant qu’il y a encore peu de temps tout le monde disait la même chose à propos de l’Ukraine.