@rogal
INCONVENIENTS DU RIC PAR RAPPORT A LA CC.
- Un référendum est clivant par nature puisqu’il oppose
2 blocs entre eux, celui du oui et celui du non. Des années après, ces
fractures sont toujours visibles et la plaie n’est pas refermée, je pense en
particulier à la fracture Européenne et à la Nouvelle-Calédonie avec ces
référendums successifs sur l’autodétermination.
Avec le RIC on n’échapperait pas à des sujets extrêmement clivant comme l’immigration
ou la peine de mort et l’unité de la nation s’en trouverait affaiblie.
- Une CC est par nature un processus qui rassemble, qui
recherche le consensus et qui laisse moins un sentiment de frustration derrière
lui.
- Le RIC a tendance à déresponsabiliser ; en effet, je
peux ne pas voter ; je peux mal voter parce que je n’ai pas reçu les bonnes
informations ; ou encore voter selon mon humeur, et penser que ce n’est pas
grave puisque mon vote ne sera pas déterminant.
- Dans une CC, on
se sent valorisé, fier d’être pris en compte, conscient de sa responsabilité. On
ne veut ni décevoir, ni se décevoir, on veut être à la hauteur de la confiance
que la société met en nous, on met de côté nos intérêts particuliers au profit
de l’intérêt général. Cet altruisme, cette humanitude, comme le qualifie Jacques
Testart n’apparaît que dans des moments privilégiés comme la CC.
- Dans un RIC le taux de participation risque d’être
très faible car la majorité des Français ont d’autres préoccupations que la
politique et sont peu motivés. Faut-il prendre en compte un résultat si le taux
de participation est inférieur à 50 % ? Tous les démocrates sont partisans de la
reconnaissance du vote blanc. Leurs positions face à taux d’abstention élevé
seraient donc très inconfortables. De forts taux d’abstention discréditeraient
le RIC, et les partisans d’un régime oligarchique style 5e
République s’en donneraient à cœur joie pour taper sur la démocratie.
- La CC n’a pas à
se préoccuper du taux de participation. A partir du moment où on accepte la
démocratie, on ne peut remettre en cause la légitimité d’une CC, sauf motif
procédural.
- Les CC
réunissent des personnes volontaires et motivées qui auront à cœur de faire le
job. Si 1 Français sur 1000 se porte volontaire chaque année, ce qui ne me
semble pas excessif, cela ferait 65.000 personnes sur qui s’appuyer pour faire
vivre la démocratie. S’il y a la volonté politique, si les citoyens se sentent
pris en considération, qu’ils sont écoutés, valorisés et pas seulement vu comme
des machines à élire et à voter, alors la démocratie ne manquera jamais de
bonnes volontés pour la faire fonctionner.
- Avec le référendum, celui qui a le pouvoir est celui
qui pose la question, celui qui vote ne peut pas dire autre chose que oui ou
non. On a entendu récemment parler des « préférendums », certes, cela
est mieux mais cela demeure imparfait. Un citoyen seul pourra difficilement obtenir
un RIC s’il ne reçoit pas l’appui d’une association et de juristes.
L’initiative proviendra donc de groupes qui défendent des intérêts particuliers.
Sur le principe, on se place dès le début en dehors d’un cadre démocratique qui
veut que ce soit l’intérêt général qui soit défendu.
- Dans la CC, le
pouvoir est partagé, celui qui prend l’initiative n’est pas celui qui débat et
qui rédige.
- Avec le référendum on est souvent amené à répondre
par oui ou par non à une question trop complexe comme en 2005 sur la constitution
européenne qui comprenait une centaine d’articles. La démocratie ne doit pas se
résumer à un système binaire, si c’est oui, le courant passe ; si c’est non, le
courant ne passe pas.
- Les CC
permettent d’élargir le sujet, de faire des propositions, de répondre à
plusieurs questions, de nuancer.
- Des CC menées à
l’échelle européenne auraient probablement permis la construction d’une Europe
démocratique qui n’aurait rien à voir avec celle d’aujourd’hui.
- Un référendum sérieux demande au moins 6 mois entre
l’initiative, les débats et le vote. C’est long à mettre en œuvre. Je pense à
ceux qui réclamaient un RIC contre le pass sanitaire. Sachant que la situation
épidémique évoluait de mois en mois, on a là un outil trop peu réactif.
Organiser 5 RICs par an relèverait de l’exploit.
- Une CC offre un
délai beaucoup plus raisonnable et moins couteux, surtout pour un sujet simple.
Il faut compter 3 semaines de débats, plus le temps de réunir le panel de
citoyens.
- Sachant qu’un
panel de citoyens c’est 15 personnes on imagine qu’il ne serait pas trop
difficile d’organiser plusieurs dizaines voir centaines de CC par an dans notre
pays.
- La qualité du débat est primordiale. Dans un
référendum, les débats sont souvent de mauvaise qualité, notamment sur les chaines
d’informations. Ce n’est pas parce que j’aurais suivi quelques heures de débats
où les protagonistes s’invectivent par des noms d’oiseaux que je vais être
suffisamment bien informé pour opérer un choix démocratique satisfaisant.
- Dans une CC, le
panel reçoit une formation neutre et académique et une information contradictoire
et plurielle.
- Avec le RIC, on risque d’avoir des sujets visant une
minorité (sexuelle, religieuse, etc.) et a contrario, on risque de voir des
minorités extrémistes qui se serviront du RIC comme d’une tribune médiatique.
Un RIC ne se fait pas forcément dans la sérénité. Suite à l’émotion suscitée
par un drame, on profitera du battage médiatique, pour récolter en quelques
jours les signatures nécessaires.
Il y a aussi un risque d’obstruction systématique par des minorités qui
exercent un pouvoir de nuisance.
- Il est difficile
d’imaginer qu’une CC portée vers l’altruisme puisse s’accorder sur un processus
dont le but serait de nuire à une minorité.
- Les RIC pourraient potentiellement conduire à une politique
totalement incohérente, avec des résultats contradictoires, sans objectif, ni à
court, moyen ou long terme. Une fois on tire à gauche, le lendemain on tire à
droite.
- Les CC sont plus posées, plus réfléchies, elles sont compatibles avec
l’exercice du pouvoir car elles permettent d’établir un projet de société
cohérent et surtout d’avoir une vision à long terme.
- La force du
référendum est qu’il donne l’illusion de la démocratie et qu’il ne requiert
aucune qualité morale, aussi bien du côté de ceux qui proposent que du côté de
ceux qui votent, et que, à l’instar de l’élection, on peut arriver au résultat
voulu par une propagande bien huilée et l’abrutissement des masses. Obtenir la
majorité 50% + 1 voix est donc facile et si on échoue 1 fois à rétablir la
peine de mort, et bien, on réessaye l’année suivante en espérant qu’un crime
bien sordide, bien glauque, viennent amener de l’eau à notre moulin.
Le RIC bénéficie naturellement d’une belle notoriété, d’un à priori favorable.
Ça a la couleur de la démocratie, ça sonne comme la démocratie, mais ce n’est
pas la démocratie et c’est pour ça qu’on se fera avoir.
Pour la défense du RIC, je
dirais que dans certains cas cela pourrait être utile, par exemple pour
s’opposer à Macron dans sa réforme des retraites. On pourrait dire aussi que le
RIC c’est mieux que rien. Mais est-ce que ça vaut le coup de dépenser autant
d’énergie pour obtenir mieux que rien alors qu’on pourrait obtenir tellement
mieux ? Organiser un référendum demande énormément d’énergie citoyenne. Plutôt
que de consacrer cette énergie à s’entre-déchirer dans des débats sans fin sur
la peine de mort ou l’immigration, ne ferait-on pas mieux de consacrer cette
énergie à l’urgence climatique et à l’entraide ? Mis à part le référendum pour
destituer un élu, je ne vois aucun domaine où le RIC pourrait s’appliquer et où
la CC ne pourrait pas.