Suite 03 et fin
En
2010, dans le livre Opération
Banlieue (éditions
La Découverte), le chercheur Hacène Belmessous estimait qu’il y
avait une préparation, notamment par le ministre de l’Intérieur
(2002-2004 et 2005-2007) puis président de la République Nicolas
Sarkozy, d’une telle intervention, malgré l’opposition des
forces armées. A l’époque de la sortie du livre, l’AFP
confirmait l’existence
d’une instruction ministérielle assez semblable à celle que nous
évoquions plus haut, visant à encadrer le déploiement de l’armée
dans le cas d’une crise majeure. Dans le magazine Armées
d’aujourd’hui (page
50),
qui évoquait en premier lieu cette instruction, un responsable
militaire en donnait les exemples suivants : « Pandémie,
attaque terroriste, catastrophe, crise d’ordre public. »
Hacène
Belmessous rapportait aussi ces
lignes d’un responsable militaire (aujourd’hui
colonel au centre de conduite des opérations de l’état-major)
écrites en 2006 : « La
mission principale dans les banlieues est du ressort des forces de
police, mais les armées ont des moyens utiles pour régler cette
crise. Moyens spécifiques qu’il serait peu rentable de développer
uniquement pour le maintien de l’ordre, mais qui peuvent aisément
être mis à disposition des forces de l’ordre. L’objectif n’est
pas de s’immiscer dans les missions de police, mais de fournir des
moyens purement militaires pour améliorer l’efficacité de ses
interventions et lui dégager des marges de manœuvre. Si les
troubles dans les banlieues venaient à se répéter, les armées
doivent planifier une intervention possible. »
« Les
forces de sécurité intérieures font tout pour repousser la limite
et couvrir le haut du spectre [des violences urbaines] », analyse
la source spécialisée dans le maintien de l’ordre évoquée plus
haut. Sans s’y montrer favorable, au contraire, elle pronostique
: « La
bascule vers une intervention militaire se fera si la police et la
gendarmerie n’ont plus les moyens, la capacité d’intervenir. »
Bref,
si aucun élément solide ne vient confirmer l’existence d’une
l’opération Ronces, cela fait (au moins) quinze ans que le sujet
de l’intervention de l’armée dans les banlieues est ressassé.
Légalement et théoriquement possible, évoquée publiquement avec
parcimonie par certains membres de l’appareil de sécurité, une
telle intervention est toutefois très loin d’avoir l’appui de la
classe politique dirigeante. « Ce
serait courir le risque de l’embrasement », objectait
Christophe Castaner, alors ministre de l’Intérieur, il
y a un an.
Or, d’après les textes, seule l’autorité civile peut demander
une telle intervention."
Courir
le risque de l’embrasement ?
Et
que voyons-nous en ce moment ? Des enfants qui jouent avec des
allumettes et poussent des éclats de rire ?