@anaphore
Je veux bien tenter une dernière approche : si le surnaturel ne surpassait pas la nature, comme son nom l’indique, il serait du même ordre que le naturel : on n’aurait pas besoin de dire « surnaturel », et le surnaturel serait naturellement explicable. Or, il ne l’est pas. Inversement, les principes naturels ne sont pas tous naturellement explicables, et l’on est alors en droit d’être tenté par une explication surpassant la nature, donc une explication de type surnaturelle. C’est tout ce qui a rendu le livre Dieu la science les preuves tentant à écrire. Sinon que c’était quand même une confusion du naturel et du surnaturel. Tout ce qui était possible de dire, c’est qu’on est bien tenté de croire que le génie naturel (au sens de génie civil, génie militaire, pour ainsi dire) s’explique par un bon, neutre, indifférent ou malin génie — tout court (comme les génies de la lampe, dans les Contes des mille et une nuits). L’ingéniosité que l’on met à comprendre les choses, nous semble bizarrement l’ingéniosté d’un génie supérieur. Les sujets connaissants s’oublient et se projettent en un Sujet Omnipotent, du seul fait qu’ils ont formulé des connaissances, qui leur ont donné l’impression d’accéder projectivement à cette omnipotence théorique. Bref, la théoritique seule, gagne, dans l’affaire. — Enfin, je ne suis plus sûr d’avoir été si clair pour vous. Essayez encore une fois. — Tout ce que je dis, c’est que c’est un piège psychologique que l’on se tend inconsciemment à soi-même, comme quand, dirait Kant, la raison dialectise purement, indépendamment de l’empyrée.