Or, la grandeur passée de l’imperium romanum, réunion d’immenses territoires sous l’autorité d’un seul homme, a profondément marqué l’imaginaire politique des Latins, entendons des héritiers de la Rome antique. On assiste au retour périodique de ce rêve unificateur avec l’Empire carolingien, le Saint-Empire romain germanique et les Empires napoléoniens. Même l’organisation temporelle de l’Église catholique en porte les traces. Au XXe siècle, les propagandistes fascistes s’inscrivent dans une continuité en puisant à leur tour dans les symboles de la romanitas pour légitimer le nouveau régime, galvaniser le nationalisme populaire et justifier l’expansionnisme6. En rêvant de la puissance romaine, les Latins n’auraient-ils pas en même temps hérité des fantasmes érotiques entourant les Césars ? Tacite et Suétone ont les premiers répandu l’image de tyrans dont la mégalomanie n’avait d’égal que l’insatiabilité de leurs désirs pervers, comme si omnipotence et surpuissance sexuelle étaient liés. En s’appuyant sur Lawrence et Bataille, on se demandera s’il n’y aurait pas une implication réciproque de la culture politique des Latins et de leurs représentations érotiques, de l’idéal masculin des Latins et de leur fascination pour le césarisme.