@Marc Dugois
Dans votre réponse, comme d’une manière générale dans vos textes,
vous établissez donc un rapport historique direct entre la fin des accords de
Bretton Woods et l’inversion de la création monétaire par les banques dans le
sens « les crédits font les dépôts ».
Incontestablement, je partage avec vous le constat que la fin
des accords de Bretton Woods est un tournant historique dans l’histoire
économique du monde.
Pour autant ce système de création monétaire, s’il a à
nouveau été quelque peu modifié à cette occasion, et effectivement rendu quasi
hégémonique, avec des garanties de plus en plus limitées, en apparence du
moins, a, pour l’essentiel de l’activité économique, toujours existé aux USA,
où le système des réserves fractionnaires a commencé à être réglementé, sous
diverses formes, depuis la première moitié du XIXème siècle déjà.
En France le système des réserves obligatoires n’apparaît
officiellement qu’en 1967, mais c’est donc déjà plusieurs années avant la fin
des accords de Bretton Woods, d’un part, et le fait que la nécessité d’une
régulation se manifeste, d’autre part, atteste donc surtout de la préexistence
d’une pratique non réglementée, et n’indique pas spécialement la durée d’antériorité
de cette pratique, possiblement, et même, probablement, très ancienne, à titre
au moins partiel, sinon donc généralisée, dans les années 60, au point de
rendre nécessaire cette régulation impérative.
Cela pourrait donc nous ramener au « mystère » des
pratiques de la « Haute Banque », fraction dominante du capitalisme
au XIXème siècle en France, et qui a présidé au développement de la révolution
industrielle dans notre pays.
Mais il ne semble pas que beaucoup de traces en aient subsisté…
D’autre part vous semblez absolument tenir à associer la
notion de valeur de la monnaie à l’énergie humaine, et tout à fait à la façon
de Marx, donc et pourquoi pas, également. Pour Marx la notion de valeur est plus
spécifiquement liée à la notion de travail productif, directement intégré, au
cours du processus productif, à la marchandise, ou, éventuellement, au service
créé.
Néanmoins, avec le développement du machinisme et déjà les
débuts de l’automatisation de la production, même avec la technologie reposant
sur l’énergie à vapeur de son temps, Marx distinguait la valeur d’usage de la
force de travail de la valeur d’usage du capital fixe, déjà le fruit d’un cycle
précédent de la production.
Or depuis plus d’un siècle et demi déjà, avec les progrès de
l’automatisation, et aujourd’hui, de la robotisation, le nombre exponentiel de
cycles productifs, des machines produisant d’autres machines, jusqu’au produit
de consommation finale, et la réduction drastique de la main d’œuvre industrielle
productive font que l’essentiel de la marchandise produite n’est pratiquement plus,
en termes de valeur, que la reproduction de la valeur d’usage du capital fixe
investi, c’est-à-dire précisément, in fine, de la dette.
Et donc, en revenir à un système ou la valeur de la monnaie
est strictement étalonnée sur l’énergie humaine dépensée dans le travail
productif, même avec une conception « élargie » de celui-ci, c’est en
revenir, peu ou prou, à un stade de développement économique préindustriel, ou
au mieux, équivalent aux tout débuts de la période industrielle.
Evidemment, cela peut avoir son charme, mais sera sans aucun doute
très difficile à assumer pour la plupart de nos contemporains !
Luniterre