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Commentaire de Estelle Floriani

sur JO : une cérémonie excluante


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Estelle Floriani 7 août 20:13

Je poursuis mes recherches sur le Festin des dieux, revendiqué par Thomas Jolly. Contrairement à ce que je suggérais dans mon article (on écrit toujours trop vite…), il peu vraisemblable qu’il se soit inspiré de la version de Bellini. Cette dernière met en scène les dieux dans une sorte de pique-nique, et non derrière une longue table rectangulaire comme c’est le cas, en revanche, du tableau de Jan Harmensz van Biljert, peint vers 1635-1640. Et chacun pourra constater que cette dernière version ressemble effectivement fort à la scène (sans jeu de mot) créée par Thomas Jolly.

Or, il est intéressant de lire les explications que propose le musée Magnin de Dijon où l’œuvre est exposée : « Dans le contexte de la Réforme, dans lequel la commande pour les temples avait disparu, l’artiste trouva un stratagème pour peindre une Cène christique sous le couvert d’un sujet mythologique. » "Le Festin des Dieux", audioguide Explication d’autant plus parlante que la table de repas, la position des convives, le satyre dansant, de dos comme est figuré traditionnellement Judas dans les représentations de la Cène, et jusqu’à l’auréole d’or qui encadre le visage d’Apollon au centre, à la place du Christ, évoquent irrésistiblement la fameuse Cène de Léonard de Vinci.

Nous entrons là dans des subtilités à double tiroirs. Premier degré : le festin des dieux païens, l’apologie de la jouissance sans limites... Second degré : … qui remplace le repas de l’amour où le divin se donne à l’humain. Les éléments patrimoniaux utilisés ne sont donc pas des matériaux bruts, pas plus qu’ils ne sont admirés pour eux-mêmes. Leur fonction est de faire signe - à ceux du moins qui savent décrypter, ou au moins aux concepteurs du spectacle eux-mêmes, pas si incultes, au fond. Vers où ? Vers l’évidence que la signification de la Cène a été absorbée par une nouvelle religion. Ô Pas le vénérable et sublime paganisme de Platon, de Sénèque et de Caton, mais le néopaganisme de l’individu-dieu, fier de lui-même et de son autocélébration sans bornes. 

« J’ai voulu faire une cérémonie qui répare, qui réconcilie", https://www.marieclaire.fr/l-histoire-du-festin-des-dieux-le-tableau-qui-a-inspire-thomas-jolly-pour-cette-sequence-culte-des-jo,1478977.asp

affirme Thomas Jolly. Il dit vrai. L’effacement de la tension antagonique entre l’affirmation de l’humain et sa soumission au divin - qui fait toute la fécondité de notre culture - nous rend à l’apaisement lâche de la déculpabilisation satisfaite. 


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