Bonsoir, Je constate que les arguments de ceux qui démolissent cette pétition -parfois même sans l’avoir lue(!)- s’articulent principalement autour de trois thèses :
- impossibilité de prouver les crimes sexuels après tant d’années
- définition du crime contre l’humanité
- cruauté de « l’épée de Damoclès » que représente une action pénale possible jusqu’au dernier jour de la vie du pédophile/incesTueur
Or, ces piètres arguments ressemblent plus à des prises de position passionnelles pour démolir un sujet qu’à des développements construits :
PRIMO
- s’il est impossible de faire constater physiquement une agression sexuelle après 40 ans, je ne vois pas comment il serait plus aisé d’en donner preuve après 20 ou même 5 ans. Donc en ce cas, pourquoi trouvez-vous un sens et un bien-fondé à l’actuelle prescription que vous défendez avec tant de virulence ? Les traces visibles d’un viol disparaissent parfois entre quelques jours et quelques mois (lésions, possibilité de prélèvement d’ADN...) mais les traces psychologiques n’en sont pas moins des cicatrices à vie, pour la victime, à plus forte raison lorsque celle-ci, enfant, doit se construire avec ce saccage de tous les fondements de son psychisme.
- Les constants progrès scientifiques, psychiatriques en particulier, démontrent chaque jour qu’il est d’autres lésions que celles du corps, d’autres traumas que ceux révélés par les examens anatomiques : par l’expertise psychiatrique, par l’analyse des séquelles -et dieu sait si elles sont nombreuses et profondes-. Et que dire des témoignages, des recoupements, du recueil de la parole de la victime par des experts, de la reconstitution, autant de moyens de preuves qui, pour immatériels qu’ils soient, n’en sont pas moins recevables devant un tribunal ?
- De plus, une victime qui parle permet souvent la libération de la parole d’autres victimes... mettant fin à leur calvaire et protégeant du coup les victimes suivantes que n’aurait pas manqué de faire l’abuseur. Sachant qu’un pédophile fait presque toujours plusieurs victimes, et ce aussi longtemps qu’il tient debout, l’imprescriptibilité aurait aussi pour effet, en permettant la divulgation de crimes que la prescription oblige à taire à jamais, de protéger les enfants et plus largement la société. Dénoncer un tel criminel, récidiviste potentiel, à quelque époque que ce soit, c’est protéger d’autres enfants.
- N’oublions pas en outre que ceux qui commettent au sein de la famille ces abominables crimes sexuels sur mineurs exercent fréquemment leurs ravages sur plusieurs générations... en toute impunité, si les victimes plus âgées ne parviennent pas à porter plainte avant prescription. L’action en justice, aussi tardivement qu’elle survienne, est le seul moyen de mettre fin au massacre.
- S’il ne devait y avoir qu’un argument en faveur de l’imprescriptibilité, celui-là me suffirait : elle protégera des enfants contre les monstres dont la prescription est, aujourd’hui, le meilleur allié et le garant de l’impunité.
- Certains pays, (Canada, la Grande-Bretagne...) ont adopté l’imprescriptibilité des crimes sexuels commis sur enfants. En Grande-Bretagne, ce sont tous les crimes sur la personne qui relèvent de l’imprescriptibilité. Des jugements surviennent, 20, 40, 60 ans après qu’aient été commis ces crimes, lors de procès qui replacent la Loi dans son rôle fondamental de protection de la société et garante de la civilisation. Or je ne crois pas que les preuves soient plus difficiles à fournir chez nous que chez les Anglo-Saxons !
SECUNDO
- puisque l’un des critères de définition de crime contre l’humanité est le nombre de victimes : l’ampleur des crimes sexuels commis sur des enfants est telle, par le nombre de victimes justement, que l’on peut hélas sans exagérer parler d’hécatombe. Génocide à petit feu, discret, silencieux, guerre déclarée à l’enfance ravalée au rang d’objet d’assouvissement sexuel, spoliée de tout droit, sous couvert le plus souvent de familles complices. Toujours au chapitre du nombre de victimes, prenez donc au moins connaissance de cet extrait de la pétition :
« Les chiffres de l’ODAS (Observatoire décentralisé d’action sociale) indiquent que le nombre de signalements pour abus sexuels sur les enfants tourne autour de 5500 par an en moyenne, sur les cinq dernières années. Le total de tous les signalements effectués depuis que l’Etat a installé cette procédure ne dépasse donc pas 1% du nombre réel d’enfants victimes d’abus sexuels en France »
...et sur ces signalements, seul un infime pourcentage aboutira à une procédure pénale, pour des raisons qui n’ont que rarissimement à voir avec les fausses allégations !
- A noter de surcroît que les notions évoluent, que l’ignominie autrefois honteusement tolérée est aujourd’hui clairement définie comme crime, c’est le cas par exemple pour les innombrables violences faites aux femmes. L’enfant, jadis, n’avait même pas statut d’humanité. Il n’est que de lire les traitements d’esclavage qui lui étaient infligés, sans aucun interdit, il y a moins de deux siècles...
- Le temps n’est guère éloigné où le terrorisme, par exemple, figurera également au nombre recensé des « Crimes contre l’humanité ». (Pensez, Mr faxtronic, à mettre vos arguties et votre grossièreté dans la naphtaline jusque là, pour les ressortir opportunément !)
TERTIO
- les victimes ne connaissent ni répit ni prescription des séquelles de ces actes dont la portée apparemment vous échappe.
- Savez-vous que l’abus sexuel commis sur un enfant dévaste les bases mêmes de la personnalité en pleine édification, tout ce qui a trait à l’identité, au relationnel, à l’épanouissement futur de l’être ? Savez-vous seulement de quelle gravité en sont les conséquences, dont nombre de spécialistes font état ? Juste vous donner une idée de ce qu’est la vie d’adulte d’une victime d’abus sexuel dans l’enfance, voici une liste non exhaustive des séquelles de ce crime :
- sentiment de honte, de culpabilité dans tous les domaines relationnels · sensation de saleté, d’être porteur d’une marque indélébile · confusion, gêne face à l’autre, incapacité de s’affirmer · incapacité de dire non, ne pas s’en sentir le droit · impossibilité de laisser parler ses émotions, les brider · perfectionnisme obsessionnel, manies, compulsions de propreté · perte de confiance, doute permanent en ses intuitions et ses ressentis · colère, abattement, frustration, absence d’estime de soi · sentiment d’impuissance, d’incapacité, d’infériorité · refus de son image, perception du corps négative · troubles des conduites alimentaires (boulimie, anorexie) · addictions, drogue, alcool, médicaments · automutilation, conduites autodestructrices, suicidaires · sensation d’engourdissement, d’anesthésie dans ses affects · difficultés de concentration, troubles de la mémoire · amnésie traumatique, « trous noirs » dans la psyché · dépression, crises d’angoisse, phobies, phobie sociale · solitude, isolement, repli sur soi · troubles psychiques, somatisation · peur de l’abandon, dépendance affective · troubles du sommeil, cauchemars · croyance qu’on ne mérite pas d’être aimé · évitement ou au contraire hyperactivité sexuelle · difficulté à garder un emploi, à mener à bien un projet...
- En regard de ces souffrances, sans esprit de vengeance ni souhaiter l’avènement d’une quelconque loi du Talion, il est pour le moins choquant de lire certains apitoiements sur l’agresseur qui devrait, sans prescription, un jour rendre compte de ses crimes devant la justice (pas devant la victime, mais devant la Loi, je le souligne, les victimes n’ayant à ma connaissance nulle prétention ni volonté de faire justice elles-mêmes, contrairement à ce que laisse entendre le détracteur).
- Pour ceux qui sans lire nous démolissent, j’en terminerai pas ces mots : il est inconséquent de parler à tort et à travers de ce qu’on ne connaît pas. Si d’aucuns veulent minimiser l’étendue d’un fléau qui fait chanceler la notion même d’humanité (n’oublions pas que l’inceste en est un des tabous fondateurs), je demande quant à moi que soit entendue, avec respect, la parole des victimes de pédophilie incesTueuse dont j’ai le sombre privilège, pour l’avoir subi, de connaître et partager le sort.
Marie-Dominique Lecluse
14/04 21:06 - PETER
@gem Bonsoir, c’est des réactions telles que les vôtres qui sont dangereuses. J’ai (...)
06/11 18:22 - Jeanloup
Cher gem, Lis un peu plus haut et peut etre comprendras tu.Le viol est une arme de guerre (...)
06/11 17:54 - Jeanloup
Desolé vous tricotez et tournez autour du probleme. Il faut comprendre et admettre ce que la (...)
27/01 09:11 - Kieser
A ceux qui parlent de "négationnisme" à propos de la pétition contre la prescription, (...)
13/10 20:51 - DAN
non c ’est faux le delai est de 20 ans apres la majorite je vous invite à venir sur (...)
13/10 17:17 - Böhler
Bonjour, Ceci n’est pas un commentaire mais plutôt une question. J’ai été abusé (...)
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