Excellent article et excellent débat, merci Jigmy !
J’en profite pour vous signaler un livre de cette année, assez revigorant sur le thème, sauf qu’il allume presque uniquement Jean-Pierre Pernault, mais c’est très drôle : « La Bonne Soupe », de Isabelle Roberts & Raphaël Garrigos, éditions Les Arènes.
Cette dérive, j’appelle ça le syndrome de la choucroute. Imaginez une cantine (bien placée, on la voit de loin dans la rue, ou alors elle est dans un pâté d’immeubles de bureaux) où un jour sur deux, on sert de la choucroute. Pour affiner les menus, on fait un sondage : aimez-vous la choucroute ? (beaucoup/un peu/ pas du tout). Résultat : les gens disent, ouais, on aime bien, ceux qui n’aiment pas ne disent trop rien, parce qu’ils sont partis manger ailleurs. Donc, on « suit le public », et à partir de la semaine prochaine : choucroute tous les jours ! Dans l’exemple de l’info, la choucroute, c’est JPP de TF1, et les cantines concurrentes (France 2) voient la salle pleine, et disent, nous aussi, il faut servir de la choucroute.
C’est exactement comme ça qu’on croit « suivre les goûts du public », et que tout ce qui fait de l’audience apparemment est resservi, copié, décliné, etc., jusqu’à ce que l’audience s’écroule, parce que le public en a marre. Le Loft donne envie de faire la Nouvelle Star, qui donne envie à TF1 de faire la Star Ac, qui donne envie à…etc. Sauf que dans le cas des infos, l’audience ne s’écroulera jamais : la plupart des auditeurs de TF1 à 13 h sont des retraités qui mettent JPP pour faire fond sonore et animer les discussions à table.
On pourrait dire que les infos, c’est une particularité technique duremplissage de la tranche horaire 13h-14h, sachant que toutes les émissions sont des outils destinés à retenir les spectacteurs entre les spots de pub. Cf. le fameux temps de cerveau disponible de M. Le Lay.
Là où ça devient plus philosophique, chère Jygma, c’est quand nous considérons que la télé nous offre ce que les responsables d ela télé pensent (ou hallucinent) que nous aimons. De même, (voir les bisbilles entre Mme Royal ey M. Sarkozy), les politiques nous servent ce qu’ils pensent (ou hallucinent) que nous pensons. Et finalement, quand nous nous asseyons devant notre poste pour regarder, nous acceptons de vivre … dans le rêve de quelqu’un d’autre à notre sujet, et d’y croire. Peu à peu, nous nous persuadons que nous sommes ce que ces technocrates ont rêvé de nous.
La solution, je crois, n’est pas tant dans la critique que dans notre propre éveil.