• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile


Commentaire de serge guégan

sur Malaise à l'ANPE...


Voir l'intégralité des commentaires de cet article

serge guégan (---.---.97.39) 29 mars 2007 18:34

En France - pays des moutons - il est à la mode, dans l’air du temps, de critiquer le service public et les fonctionnaires. Si cette critique est raisonnée, passe encore... Mais la plupart du temps c’est le petit démon individualiste qui est en chacun de nous qui parle...et surtout, se contredit. Car dans le même temps où l’on dénonce le coût et les privilèges de la fonction publique on peste dans une poste parce qu’il faut attendre 3 heures pour retirer un recommandé : « ils pourraient mettre du monde aux guichets, c’est un scandale ! Si c’était moi le chef ici, tu verrais çà, je te les ferais bosser ! » etc. Passons...Le sujet est inépuisable...

Pour revenir à l’ANPE, je suis de ceux qui pensent que le maintien et l’amélioration du service public sont essentiels dans ce domaine comme dans beaucoup d’autres d’ailleurs. Si l’ANPE est relativement inefficace, ce que je pense, ce n’est pas une raison pour l’enterrer. Bien au contraire. 1) La mise en concurrence d’un malade ne peut que le tuer. Avant de le mettre en concurrence il faut le soigner... 2) La mise en concurrence ne doit intervenir s’agissant d’un service public que dans des domaines non stratégiques pour l’« usager » (les chômeurs s’agissant de l’ANPE). C’est à dire au final dans très peu de domaines, voire dans aucun. 3) On ne doit pas entrer dans une logique du droit du demandeur d’emploi à une plus ou moins grande efficacité du service à son égard en fonction de ses ressources ! Ou alors il faut réserver l’efficacité aux plus pauvres et aux plus fragiles, et pas l’inverse ! 4) On ne peut pas soigner sans remèdes, être efficace sans moyens, développer sans investir.

Pour moi il faut d’abord et à la fois augmenter substantiellement l’effectif, les compétences, les moyens (outils...) et l’efficacité des agents. Le suivi individuel est essentiel, encore faut-il qu’il soit efficace. En l’espèce l’efficacité commence par une réelle aptitude à comprendre et à résoudre (si possible) le problème du demandeur d’emploi, ce qui ne va pas sans une réelle disponibilité et une réelle expérience (humaine et professionnelle). Il ne s’agit pas de vendre des cacahuètes mais d’aider un être humain - qui a droit, au minimum, au respect et à la dignité - à trouver un boulot et pas n’importe lequel. Il y a, à l’évidence, une réelle nécessité de recruter au sein de l’ANPE des hommes et des femmes qualifiées, de talent, avec des profils très diversifiés ! A partir de là beaucoup de choses pourront et devront être changées et améliorées dans le cadre d’un plan d’ensemble qui ne doit pas être remis en cause à chaque élection. C’est notre problème à tous, pas celui d’un parti, encore moins celui d’un homme ou d’une femme. Soit dit en passant je constate que notre constitution (pas l’européenne, la française !) est muette sur la question du travail et de l’emploi ! Apparemment çà ne choque personne !

Pour ne citer qu’une seule amélioration urgente : refondre au plus vite la codification métier ROME qui est complètement décalée par rapport aux segmentations utilisées dans la réalité de notre société moderne. Faites un test sur le site de l’ANPE et vous verrez immédiatement qu’il peut être très difficile de se classer d’une manière précise et différenciée. Cà prouve une chose : c’est qu’il y a un énorme boulot de repérage, d’identification et de classification des activités et des professions (en particulier dans les services, et, par définition, dans les secteurs émergents, lesquels émergent de plus en plus vite et fort)...

Vouloir confier la remise au travail des chômeurs au secteur privé est une monumentale connerie à court terme, une illusion à long terme. Car le chômage n’est pas un simple problème économique conjoncturel plus ou moins bien traité dans tel ou tel pays...C’est un problème structurel, un problème de civilisation, de choix de modèle de société. De mon point de vue - la mondialisation, la productivité, la concentration, la nécessité de protéger notre environnement, l’allongement de la vie, et toutes autres contraintes et contradictions aidant - le travail et le profit marchands, érigés en ce moment en valeurs suprêmes, ne seront pas éternellement le vecteur principal dans lequel s’inscrira l’activité (rémunérée) des hommes. Je pense même qu’avant la fin de ce siècle ce sera peut-être déjà un vecteur secondaire. Dès lors parler de chômage n’aura plus du tout le même sens qu’aujourd’hui, voire plus de sens du tout. C’est dans cette nouvelle civilisation, plus relationnelle, que nous sommes en train d’entrer. Il faut l’anticiper intelligemment en faisant du chômeur d’aujourd’hui le nouvel acteur fort ne notre société de demain. Pour cela notre image réductrice du chômage et notre conception étriquée du travail devra changer.

Serge Guégan


Voir ce commentaire dans son contexte





Palmarès