@TALL
« Bla bla habituel du bonhomme coincé dans tous les faux stéréotypes qu’on lui a mis dans le crâne au Collège Ste-Marie des Bonnes Grâces »
Ne vous énevrez pas, je vous rassure, mon éducation s’est faite entièrement dans le public ; ce n’est peut-être pas votre cas et en auriez tiré un profond ressentiment (c’est ce qui est arrivé à Gabriel de Mortillet, élevé chez les Jésuites, et qui en est sorti athée virulent)
« Je répète donc : la Science, c’est une méthode, ce n’est pas un groupe de gens. Le pape peut faire un travail scientifique dès lors qu’il accepte l’observation comme arbitre ultime.. »
Je vous ai déjà répondu pour l’essentiel sur le statut de l’observation. De plus, contrairement aux apparences, la méthode scientifique est très difficile à caractériser dans les détails (lisez par exemple l’article touffu sur la méthode scientifique de wikipedia) et la science, pour une part, se construit autour d’un consensus entre « gens qui savent ».
Enfin, si des religieux peuvent accomplir un excellent travail scientifique, et que la religion a pu permettre le développement de la science, cela prouve que science et religion ne sont pas forcément antinomiques. Donc, votre anti-cléricalisme est éminemment respectable comme opinion, mais il n’a pas à s’appuyer sur une opposition de principe entre science et religion.
« De plus, la Science ne permet jamais aucune certitude, c’est donc aussi une croyance. Hé si ! Seulement, contrairement aux croyances merveilleuses offertes par les religions qui promettent le Paradis à quiconque obéira bien au Réglement d’Ordre Divin »
Vous avez une vision stéréotypée et partielle du fait religieux. Ainsi, selon René Girard, le sacré est moins lié à la croyance qu’au rite. Si toutes les cultures primitives furent d’essence religieuse, c’est qu’il y a une raison (éminemment darwinienne) : toutes les sociétés primitives non religieuses ont disparu. Pourquoi ? Le religieux archaïque a, en fait, une fonction éminemment sacrificielle : en cas de grave conflit interne (induits par un désir lié au mimétisme), une société, pour éviter l’implosion, se réconcilie sur le dos d’un bouc émissaire (qui est souvent un membre marginal de la société, par le haut tels les rois, ou par le bas comme tel ou tel pauvre hère). Cela est cruel et inhumain, mais évite l’anéantissment du groupe.
Par la suite, le rite cherche à rappeler et à reproduire les conditions qui ont permis à la société de se ressouder, selon différents modalités : sacrifices humains, animaux, offrandes... en fait, on commémore, en termes ambivalents, le souvenir de ce bouc émissaire : coupable, certes, mais dont le sacrifice fut salvateur. Plus tard, le christianisme sort de cette logique en proclamant avec force l’innocence de la victime sacrificielle, et propose, comme voie de recours, l’imitation d’un modèle (médiation externe). Au bout de 2 millénaires, notre société post-chrétienne a appris du christianisme que le recours au bouc émissaire est une imposture, mais n’a plus forcément les moyens, à terme, de s’opposer à l’implosion. Or, la mondialisation fait que cela ne concernerait plus un groupe isolé comme dans le passé, mais le « village planétaire » dans son ensemble...
« Et bien, la Science ne promet aucun Paradis. Avec la Science, au contraire, c’est de la sueur, beaucoup de sueur, de l’humilité, du courage, de l’abnégation, et jamais aucune certitude de merveilleux. Voilà le programme ! »
La science s’abstrait des religions, mais ne les nie pas à priori et ne prétend pas (saufs quelques fous par ci par là) prendre sa place. Quant à l’absence de merveilleux, je ne vous suis pas : esthétisme des équations, réalités décrites très loin de nos platitudes quotidiennes (la relativité avait encore un lien, certes ténu, avec le « bon sens » ; ce lien disparaît avec la mécanique quantique, et plus encore avec la théorie des cordes)... et surtout l’énigme qu’il y ait quelque chose au lieu de rien subsiste et subsistera.
« Alors pourquoi s’y accroche-t-on ? Serait-on maso ? Ben non, pragmatiquement on veut survivre, et pour ce, on a besoin de prévoir efficacement. Or il s’avère que la méthode scientifique, toute imparfaite qu’elle soit, est la meilleure connue jusqu’à présent pour prévoir, et de loin. »
Tenons-en nous à la nécessité de survie. Le problème est que si la science a beaucoup fait pour notre bien-être matériel (médecine, technologie...), il est certain que c’est elle (et non la religion) qui causera à terme la fin de l’aventure humaine, quelles qu’en soient les modalités plus ou moins plausibles : réchauffement planétaire, holocauste nucléaire, pollutions chimiques, nano, armes biologiques, remplacement de l’homme par des intelligences artificielles ou des créatures issus du génies génétique... Ce n’est certes pas cet argument qui me fera revenir à l’époque des cavernes, mais il ne faut idéaliser la science par excès.
Rappelons que le nazisme a utilisé le darwinisme social comme justification : on pourra toujours prétendre qu’il y a eu maldonne, mauvaise compréhension, trahison du véritable darwinisme (mais à ce compte-là, je jusstifierai de même le christianisme face à l’inquisition). Le fait demeure que certaines formes de scientisme et la morale éléémentaire font mauvais ménage.