Bonjour Tiptop
Votre article témoigne à la fois d’une expérience et d’une réflexion personnelles, mais il ne saurait se poser en règle. Il se trouve que je connais très bien l’Afrique pour y avoir vécu (y compris le Cameroun : Douala et Buéa), que j’adore ce continent et les africains. Je me considère comme un européo-africain. J’y ai découvert l’humanisme, le vrai, pas celui que l’on trouve dans les livres. La danse, les rires, les chants, la main qui s’attarde sur l’épaule, la latérite, la nature splendide, les parties de foot avec un ballon d’hévéa, les fruits succulents, et encore les africains dont le savoir est immense mais qui ne se perce que lorsque l’on est accepté. Car l’Afrique est secrète ; elle ne montre que ce qu’elle veut. Et si l’Afrique a été colonisée politiquement, elle a su conserver sa culture, ses us et coutumes. Vous savez que même les religions chrétiennes et musulmanes sont globalement pratiquées « à l’africaine ». L’Afrique est un continent de valeurs, là où nous avons sacrifié les nôtres. Nous privilégions la matière quand les africains privilégient la chair. Je ne circulais pas en 4x4, et les autres blancs que je connaissais non plus. Je vivais avec les noirs, j’allais chez eux, ils venaient chez moi. On s’en foutait du statut social, de la couleur de peau, etc. C’est vrai que ma « richesse » faisait envie à beaucoup. Mais on a les mêmes problèmes dans tous les pays. Je ne me suis jamais senti supérieur, et je n’étais pas le seul blanc dans ce cas là. Il y en avait beaucoup de biens, vous savez. Tous les quartiers étaient accessibles. Aujourd’hui, avec l’insécurité, c’est plus difficile. Vous le savez aussi. Il faut le dire. Et les insultes « cochons grattés », « sales blancs », elles sont une réalité. Là encore, il ne faut pas l’occulter. Mais il y a des (bip) partout. Aucune couleur de peau n’en a le privilège.
Là où s’arrêtent nos expériences et nos réflexions personnelles commence l’étude à partir de données objectives. Le problème dans la colonisation, c’est le fait que le désir de domination est un désir humain. Il n’est pas lié à une couleur, une religion, une culture. Il est présent partout. Et si une personne ou un groupe a la possibilité de dominer les autres, il le fait. En Afrique, des noirs ont été colonisés par d’autres noirs. Des noirs ont fait la guerre à d’autres noirs. Des noirs ont réduit d’autres noirs en esclavage. Avant même qu’ils connaissent l’existence de blancs. Et les blancs ont fait de même entre eux et envers les autres peuples ; les jaunes aussi. Toutes ces horreurs sont universelles. Dire que ces horreurs sont pires quand elles sont extra-ethniques, c’est ça le racisme. J’ai écrit un petit article sur l’histoire de la colonisation. Je ne vais pas m’excuser d’être blanc, je ne l’ai pas décidé. Je ne vais pas m’excuser d’appartenir à un peuple qui a colonisé un autre peuple, je ne l’ai pas décidé. Et si on me traite aujourd’hui de sale blanc (et en France on se fait aussi traiter de sale blanc, c’est une réalité), ça me fait aussi mal que lorsque mes copains noirs ou arabes se font traiter de négros ou de bougnoules. Et je ne vais pas accepter cette insulte sous prétexte que j’aurais à expier les fautes de mes aïeux. Je n’ai rien à expier. Je suis xénophile. Avec votre raisonnement, on pourrait faire la guerre aux américains et aux asiatiques parce qu’ils nous colonisent avec leurs produits, leurs films, leurs dessins animés. On pourrait également faire la guerre aux noirs et aux arabes parce qu’ils nous colonisent avec leurs enfants. C’est nul. La France aussi est pillée et exploitée. Et tous les autres pays avec elle. Vous ne pensez pas que les français ont aussi été exploités par leurs rois, leurs empereurs, leurs entreprises, leur Assemblée Nationale ? Et vous, quand vous allez faire vos courses, combien de personnes exploitez-vous ? Ce n’est pas comme ça qu’on résoudra les problèmes. Et mes copains noirs et arabes pensent comme moi.
Le problème, c’est la quête irraisonnée du profit, le désir de pouvoir, de domination. C’est le toujours plus au lieu du toujours mieux. Et ce problème, il est universel. Et là dessus, effectivement, les noirs d’Afrique ont beaucoup à nous apprendre, mais malheureusement, personne ne les écoute.
Je vous invite donc courtoisement d’aller étudier l’Histoire,la psychologie et la sociologie, juste pour prendre un peu de recul par rapport à votre expérience personnelle.