Bonsoir Tiptop
Si vous avez écrit beaucoup de choses justes, je souhaiterai pourtant nuancer et/ou compléter certains de vos propos.
Sur les contradictions françaises, humanistes et républicaines, rien à dire. Mieux encore, les Lumières ont magnifié la grandeur réelle de la France et créé des mythes sur lesquels nous nous reposons aujourd’hui encore, entre autres pour justifier la prétention universaliste de notre pays.
Quant aux ex-colonisés, la plupart d’entre eux sont venus en France pour y trouver un avenir meilleur. Ce n’était certes pas une décision libre et pleinement consentante puisque sous une pression économique, mais on ne les a pas non plus contraints à venir, à quelques exceptions près. Les Français n’en portent donc pas la responsabilité. Et si responsabilité il y a (parce qu’on peut toujours en débattre), elle est partagée par tous.
Je ne crois pas non plus que ces populations « nous renvoient à un passé colonial qui ne passe pas ». Les français ont d’autres préoccupations que le passé colonial et n’y pensent pas au quotidien. Et puis, on pourrait facilement inverser le problème : « c’est parce que les anciens coloniaux pensent au passé colonial qu’il y a problème ».
Effectivement, le comportement de certains policiers est inacceptable. La police est également perçue comme une bande rivale (des sociologues l’ont évoqué) par ces jeunes, mais on n’a jamais dit que ces derniers avaient une perception aiguisée de la réalité. En effet, la police représente la République et garantit la paix des citoyens. C’est un instrument que l’on doit respecter, et les mécanismes de régulation des dysfonctionnements (IPGN, justice) existent . L’action politique peut également y pallier. Cependant on ne peut en aucun cas admettre que la police se comporte comme une bande rivale, ce que vous ne faites d’ailleurs pas. Mais même l’énoncer sans prendre une distance claire (ce que vous ne faites pas non plus) revient à justifier cette opinion. La police n’est PAS une bande rivale, et le comportement de certains ripoux ne doit pas entacher l’institution. C’est ce qu’il faut dire à ces jeunes, sans autre discussion. Il y a des moments où l’on ne discute plus, et où on rappelle les règles. Le rappel aux règles et aux lois effectué, on peut discuter et débattre, à condition effectivement, que les parties s’écoutent l’une l’autre, ce qui n’a jamais été fait. Il faudrait également évoquer la difficulté du métier de policier et soutenir davantage ce corps.
De même, il est arbitraire de parler « d’arbitraire de certaines descentes », puisque cela supposerait que vous ayez connaissance du planning des interventions. J’en doute.
La violence est certes le dernier recours de ceux qui n’ont pas les moyens de s’exprimer autrement. Voilà pourquoi il faut mettre l’accent sur des cours de FLE (Français Langue Etrangère) et FLS (Français Langue Secondaire), des cours de culture et de civilisation françaises. Cela résoudra certains problèmes, mais pas tous.
Sur les cours d’Histoire en classe. J’ai déjà évoqué les témoignages de mes collègues en collèges et lycées. Dans certains établissements, on parle à peine de la colonisation et de la Shoah puisque fusent les ricanements et propos racistes. Ces sujets deviennent tabous en Histoire et en littérature. C’est intolérable et inacceptable.
Sur la question de l’identité maintenant. L’intégration est effectivement en panne puisqu’il y a eu un laxisme des différents gouvernements qui n’ont pas su gérer ce problème. Mais le problème de l’identité est double puisque les français « de souche » ont été également dépossédés de la leur sous l’influence d’au moins deux facteurs : une mutation trop rapide de l’économie (standards mondiaux de la grande entreprise contre le capitalisme de proximité) qui a entraîné une mutation des modes de vie ; un discrédit systématique des composantes culturelles et identitaires d’origine judéo-chrétiennes. Pour résumer, on a détruit avant d’avoir compris et proposé un autre modèle.
Rappelons également une spécificité française : si la France a toujours été une terre d’immigration, elle n’a JAMAIS été une terre d’émigration massive, y compris au XIXè siècle, contrairement aux anglais, espagnols, irlandais, italiens (...). C’est d’ailleurs ce qui nous a coûté l’Amérique qui aurait pu être française. « Leben wie gott in Frankreich“ disent les Allemands. C’est une donnée capitale et jamais prise en considération lorsqu’on aborde le thème de l’immigration en France et des problèmes qu’il génère.
Au final, évoluer dans une société n’est jamais facile, que l’on soit natif ou non. J’en sais quelque chose puisque enfant j’ai connu la misère. Mais si les amalgames, les préjugés et les discriminations sont à bannir sans modération, certains jeunes doivent aussi prouver au quotidien leur désir de construire un avenir meilleur pour nous tous, à condition qu’on leur en donne les moyens !
J’arrête là. Tchao.