Les institutions scientifiques fournissent un bon exemple des ravages que peut faire le lobbying, elles sont loin d’être les seules. Mais quelles solutions faut-il rechercher ? Je suis d’accord pour dire que l’une d’entre elles doit être une réforme de la justice administrative.
Comment faire, par exemple, pour que les citoyens puissent mieux connaître contrôler la réalité de ce que font les organismes de recherche ?
Il faudrait des lois permettant un contrôle citoyen plus large et plus rapide. De nos jours, même un simple litige portant sur la communication d’un document peut noyer un justiciable, et c’est vrai pour toutes les administrations. A fortiori pour les universités et les organismes de recherche, qui sont très influents et que l’ordonnancement actuel rapproche singulièrement de la justice (notamment, administrative) par de nombreuses voies.
Il est intéressant de lire, à ce sujet, l’extrait qui suit de l’article d’Isablle Debergue du 28 juin dernier :
http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=11051
"Pour des raisons évidentes, ce point de vue des justiciables ne saurait coïncider avec celui tacitement exprimé dans le rapport récent de l’Inspection générale des services judiciaires, un service dont le fonctionnement et les approches trouvent à peu près leur équivalent dans la Mission permanente d’inspection des juridictions administratives. Comme le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel (CSTACAA) correspond assez bien à ce que représente, dans le domaine judiciaire, le Conseil supérieur de la magistrature. Avec une différence : les magistrats de l’ordre judiciaire ne revendiquent pas, à ma connaissance, la condition de hauts fonctionnaires et de corps recruté par la voie de l’ENA, comme le fait le Syndicat de la juridiction administrative. Ils n’affichent, non plus, cette qualification dans les prépas des concours, comme on peut le lire dans des plaquettes destinées aux futurs candidats à la fonction de juge administratif. Mais, justement, si on se réclame de la « haute fonction publique », ne devrait-on être encore plus redevable de ses actes ? Paradoxalement, les différences semblent aller dans le sens opposé à cette logique, y compris en ce qui concerne l’évaluation.
Si, dans un avis du 20 mai 2005, le Conseil supérieur de la magistrature se penche sur les questions d’évaluation et envisage même « la généralisation de l’évaluation à certains magistrats actuellement non évalués », la plus haute instance de la juridiction administrative adresse aux citoyens un message très différent. Le site du Conseil d’Etat leur explique, à propos des garanties d’indépendance, que : a) Tout d’abord, la gestion du Conseil d’État et de ses membres est assurée de façon interne... b) Même si les textes ne garantissent pas l’inamovibilité des membres du Conseil, en pratique, cette garantie existe... c) Si l’avancement de grade se fait, en théorie, au choix, il obéit, dans la pratique, strictement à l’ancienneté, ce qui assure aux membres du Conseil d’État une grande indépendance.... Mais le justiciable « de base » peut penser à un autre type de garanties d’indépendance. Par exemple, sur le plan de la séparation des carrières, comme le rapport parlementaire sur l’affaire d’Outreau le recommande pour la juridiction pénale. Un domaine où la juridiction administrative ne connaît aucune réelle incompatibilité.
Pourquoi un élargissement de la responsabilité des juges, uniquement pour la juridiction pénale ? Il en est de même pour l’évaluation, qui au fond en est indissociable. Pourquoi une séparation des carrières seulement pour cette juridiction, et uniquement entre le Siège et le Parquet ? Alors que, par exemple, toutes les administrations, tous les établissements publics sont des justiciables, et pas seulement de la juridiction administrative... De même, ne devrait-on pas séparer les fonctions de garde des Sceaux ou de ministre de la Justice de tout autre mandat ? Et si on reconnaît l’existence de manquements et de violations de règles et de principes de la part des juges, ne devrait-on fournir aux justiciables des moyens de prévention appropriés, notamment dans le domaine de la récusation, qui reste à ce jour un terrain « maudit » ? Autant d’interrogations qui ne sont pas vraiment nouvelles, mais qui embarrassent de nombreux décideurs. Pourtant, s’il faut être conséquent, il ne me semble pas qu’on puisse valablement éluder ces questions auxquelles pense tout justiciable quelque peu renseigné sur la réalité des institutions françaises."
(fin de l’extrait)