Bonjour Monsieur Reboul La lecture de votre intéressant article m’incite à proposer un petit focus sur le vocable « libéralisme ».
Le libéralisme d’aujourd’hui n’est pas celui d’Adam Smith ; sa conception de la liberté n’est pas celle des penseurs des Lumières. Le libéralisme actuel, que d’aucuns appellent selon les circonstances ou les points de vue ultra-libéral, néo-libéral ou libéral tout court, est une déviation conceptuelle de la théorie libérale classique. La divergence ne se produit pas sur un détail ni sur un aspect théorique anecdotique ; elle se manifeste sur un point essentiel : la conception de la sphère publique.
Adam Smith a consacré l’essentiel de son œuvre à démontrer que l’idée de souveraineté moderne était inséparable de l’économie. Pour lui, l’économie est l’explication de la vie en société ; toute société humaine est fondée sur des relations marchandes. Il s’agit d’un caractère naturel et irréversible. Mais néanmoins, cette primauté ne signifie pas pour autant que les relations interindividuelles soient essentiellement commerciales ; les sociétés politiques trouvent certes leur origine dans l’économique, mais elles s’établissent sur des relations plus complexes, dont la plus évidente est celle de pouvoir et d’autorité. Une société possède donc nécessairement un pouvoir politique, c’est-à-dire une organisation comprenant un gouvernement, des lois, des règlements. Dans le système libéral classique, la liberté est garantie par l’État et l’opulence est permise à tous. Retenons que, dans cette idée, l’État joue un rôle central.
Dans les années soixante, Milton Friedman approfondit l’idée libérale moderne. Il explique que l’État, représentant de l’intérêt général, ne peut être le garant de la liberté individuelle ; au contraire,, il la limite, alors que l’économie de marché en fait sa valeur suprême. Pour Friedman, l’État ne possède pas de fonction politique légitime, il est même néfaste. Il admet certes l’idée d’un gouvernement, « mal nécessaire », mais uniquement cantonné dans la mise en œuvre d’une règle du jeu -on ne parle pas de lois- destinée à régulariser le libre jeu du marché et à garantir la pérennité des actions individuelles. Tout ce qui n’est pas du domaine de l’individu est condamnable ; les syndicats, les partis, les collectivités sont hautement dommageables au libre jeu du marché. Cette pensée marque une rupture avec la théorie libérale classique. Désormais, la sphère publique est considérée comme un obstacle qu’il faut progressivement anéantir. (voir la citation de Pascal Salin dans mon article publié hier sur « la nouvelle équation philanthropique »)
Cette pensée libérale moderne va progressivement s’enrichir et mener son expansion partout dans le monde occidental. La clé de son succès réside d’abord dans une phrase slogan répétée à l’envie, puis admise comme une vérité simple : There is no alternative. Il n’y a pas d’alternative aux principes du néolibéralisme, tout le monde, partisans ou opposants, doit s’adapter à ses normes. La deuxième clé réside dans la confusion délibérément entretenue entre ‘libéralisme’ et ‘néolibéralisme’. Le terme ‘libéral’ bénéficie des connotations positives de son origine française du siècle des Lumières ; il fleure bon Rousseau, Condorcet ou Voltaire. Le choix de ce terme constitue un écran sémantique dont le statut résulte de ce que Bourdieu appelle une « gigantesque allodoxia » c’est-à-dire la tactique rhétorique qui fait prendre une chose pour une autre. Dans cette logique, tout le monde est illusionné, ceux qui y croient comme ceux qui n’en sont pas. C’est notamment un des symptômes de ce que j’appelle « La grande confusion ».
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