Vous envoyer au bûcher ? mais voyons ! j’ai toujours adoré les femmes qui ne pensaient pas comme moi et qui s’exprimaient avec passion... Bon, trêve de galanteries : vous reconnaissez donc qu’il y a toujours eu des Juifs en Palestine, quant au fait de savoir où et comment ils ont été minoritaires ou majoritaires, peu importe. L’Empire britannique n’a pas donné la Palestine à Rothschild, mais a préconisé un « foyer national juif » : cela n’empêchait nullement les arabes d’avoir leur propre foyer, le premier, d’ailleurs, étant la Jordanie, donnée, par les Britanniques également, comme lot de consolation à la dynastie hachémite (au départ, rappelez-vous que Fayçal a accueilli très favorablement l’idée d’un foyer juif). Il y a bien eu plusieurs « foyers nationaux » musulmans prévus en réponse aux persécutions. Au XIXe siècle, le sultan ottoman avait décrété que tout musulman turc qui s’estimait en péril pouvait s’installer en Anatolie ; la partition de l’Empire des Indes a elle aussi donné naissance à un foyer national musulman, le Pakistan. Dans les deux cas les occupants originaux ont été bhousculés, voire dépossédés. Quant au fait de savoir si les Juifs auraient dû se montrer bon prince et rendre aux Palestiniens les territoires conquis après la guerre d’Indépendance de ’48 qui leur a été imposée par les pays arabes environnants, c’est en effet discutable. La France aurait-elle eu intérêt à se montrer magnanime avec l’Allemagne en 1918 ? Sans doute, cela aurait évité la naissance du nazisme, mais on peut comprendre aussi les tenants de la ligne dure de Clémenceau. Quant aux échanges de population, outre la catastrophique partition des Indes, il y a un exemple très parlant au XXe siècle : en 1920, profitant de l’effondrement de l’Empire ottoman, les Grecs ont envahi l’Asie Mineure où, faut-il le rappeler, de nombreuses régions étaient à majorité hellénique. Quand les Turcs, galvanisés par Kemal Atatürk, ont repoussé les envahisseurs (car sinon c’était leur existence nationale qui était en jeu) il y a eu des exactions de toutes sortes (à Izmir/Smyrne, notamment) suivies d’échanges de populations. Personne ne songerait maintenant à revenir en arrière, et la Grèce et la Turquie ont fini par se parler et s’entendre. Alors pourquoi le maintien de cet abscès de fixation en Palestine ? Savez-vous, chère Lalla, qu’il existe des gens de bonne volonté en Israël, comme le maire de Haifa qui a déclaré récemment (source:Courrier International) qu’il accepterait volontiers le retour des Palestiniens originaires de cette ville ?Moi qui suis d’esprit cosmopolite, je déplore que des villes comme Alexandrie, Haifa, Tanger et Istanbul ne soient plus multinationales, tout comme les pays dont elles ont toujours été le fleuron littéraire et artistique, mais c’est hélas le cas.