Effleurer, quelle évanescence dans ce mot !
Pour le plaisir des mots : "effleurer" !
"Les anges portent des ailes invisibles qui viennent par inadvertance effleurer la peau de ceux qu'ils protègent... les picotements, les chatouillements, ce sont eux."
Avec humour, poésie et tendresse, Yves Simon évoque ainsi , dans un extrait de son roman Les Novices, les anges protecteurs qui nous entourent et nous signalent leur présence, en nous effleurant...
Le verbe "effleurer"restitue une légèreté, une évanescence, grâce à ses voyelles feutrées, il nous entraîne dans un univers empli de délicatesse...
Formé du préfixe ex- et du nom "fleur", ce verbe signifie d'abord "dépouiller de ses fleurs"...
Il suffit parfois d'un geste très léger et anodin pour faire tomber les pétales d'une fleur...
Ce verbe, aux sonorités contrastées de fricative "f" très douce et de gutturale "r" plus âpre, restitue bien le sens premier : le mouvement est ténu, subtil, mais la fleur tombe inexorablement et meurt sous nos yeux...
On peut aussi effleurer une peau, une joue, dans un geste tendre et caressant...
De nombreux mots appartiennent à cette famille : "fleurir, fleuriste, fleuron, fleurette, fleuret, affleurer, flore, floraison, floréal, florilège, floral, fioriture"...
On perçoit des images de beauté, à l'évocation de ces mots, on perçoit des couleurs, des harmonies, des éclats et on comprend toute la richesse des dérivations françaises, grâce à l'ajout de préfixes ou de suffixes.
C'est un seul nom latin, "flos", "la fleur" qui est à l'origine de tous ces mots..
"Flos" ! Ce terme générique traduit bien, dans sa brièveté, fragilité, douceur, harmonie.
Le verbe "effleurer" a quelque peu perdu son sens étymologique : il signifie maintenant "toucher légèrement", mais le mot fleur qu'il contient suggère toute la tendresse du nom originel.
"Effleurer, affleurer", ces deux verbes qui se ressemblent sont empreints de douceur...
On aimerait croire ce qu'affirme Yves Simon : les anges nous effleurent chaque fois que nous ressentons des picotements !
On aimerait que des anges nous caressent aussi souvent !
Il est doux d'effleurer du sable fin, des galets lisses, des fossiles aux formes mystérieuses, aux enroulements voluptueux.
Il est doux de se laisser effleurer par des vagues ondoyantes, par des embruns légers, par des brises marines.
Ce verbe plein de volupté, de légèreté nous séduit, nous entraîne dans une ambiance apaisée, bienheureuse.
Dans notre monde empli de hargne et de virulence, ce mot nous fait percevoir une douceur, un bien-être, un réconfort.
On a envie d'effleurer de la mousse, du velours, de la dentelle, de la soie...
On aime effleurer des cheveux, une joue, une peau dorée...
Ce verbe lié à la sensation tactile nous emporte, aussi, dans une harmonie des sens : couleurs, teintes, senteurs de fleurs si variées, douceur du toucher...
Ce verbe nous emmène dans un univers poétique, celui des correspondances baudelairiennes, où les sensations se rejoignent...
Le blog :
http://rosemar.over-blog.com/2016/05/effleurer-quelle-evanescence-dans-ce-mot.html
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