« Astérix aux Jeux Olympiques » : médaille d’argent
Je dois vous avouer ma grande déception : en allant délibérément visionner (non, personne ne m’a forcé !) le deuxième plus gros budget de l’histoire du cinéma français, j’avais l’envie, un peu malsaine mais si tentante, d’écrire un papier incendiaire et de dénoncer ainsi ces productions nationales qui osent faire des entrées (inadmissible !) Je souhaitais me mettre au diapason de cette critique française « parisiano-parisienne », que l’univers entier nous envie, sans doute en raison de son absence d’arrogance et de sa capacité remarquable à se remettre régulièrement en question...
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En outre, tout ou presque était réuni, dans ou autour du film, pour que je puisse le « descendre » dans les règles : spectaculaire « battage » anti-Astérix de la part de mes très chers confrères donc, succédant à une promo exaspérante qui a presque réussi à me convaincre de me laisser pousser la moustache et de me faire de jolies tresses ; présence au générique du mythe Alain Delon, personnalité réputée pour avoir un ego proportionnel au physique d’Obélix ; arrivée fracassante de l’incontournable, l’inévitable et heureusement unique Clovis Cornillac ; absence, enfin, d’Alain Chabat. Oui, j’allai pouvoir déverser des flots de haine ininterrompus sur ce long métrage, l’écraser à coups de menhirs, faisant peut-être même, en comparaison, passer Romance X pour un chef-d’œuvre...
Malheureusement, je m’étais encore une fois « fait un film », et vous comprendrez alors le sentiment de frustration qui m’habite : Astérix aux Jeux Olympiques n’est pas mauvais, et même si ce n’est pas une « grande » œuvre qui marquera l’histoire du cinéma, l’ensemble est plutôt distrayant et divertissant. Et n’est-ce pas là, finalement, ce que l’on attend de ce type de films ?
Alors il est vrai que le scénario a dû être écrit au sprint, et que la majorité des gags fait rire à peu près autant qu’une rencontre de curling... Mais tout cela est rapidement oublié, principalement du fait de la performance des comédiens et de l’intérêt que suscitent les personnages qu’ils interprètent. A tout seigneur tout honneur : contrairement à la légende, « Monsieur » Delon semble avoir un humour certain, ainsi qu’une grande capacité à l’autodérision. Assumant son image véhiculée par les médias, il se livre à un exercice d’auto-parodie assez jouissif, ne manquant pas une occasion d’évoquer sa filmographie, qui s’apparente plus au marathon qu’au tir à l’arc ! Alain Delon dans le rôle d’un empereur : la frontière entre la fiction et la réalité s’estompe sérieusement...
Face à lui, Benoît Poelvoorde est totalement fidèle à lui-même, c’est-à-dire excellent. Du classique donc... La vraie originalité aurait été de découvrir un Poelvoorde mauvais et critiquable, mais je pense qu’il y a autant de chances que cela arrive qu’un athlète français remporte le 10 000 mètres des JO de Pékin... Portant la quasi-totalité du film sur ses épaules, l’indispensable acteur belge ne dépareille aucunement en succédant à Roberto Begnini, Djamel Debbouze et autres Edouard Baer. Un regret pointe alors le bout de son nez : que tous ceux-là n’aient pas partagé l’affiche dans un même film. Une piste pour le quatrième volet ?
A côté du détonnant duo César-Brutus, Frank Dubosc et Francis Lalanne (petite précision pour les plus jeunes : c’est lui qui a lancé la mode des cuissardes pour homme au XXe siècle) se parodient eux aussi, et le résultat est franchement drôle. D’autre part, quelques apparitions bien amusantes viennent pimenter les aventures des Gaulois les plus célèbres du monde : Sim (avouez que la seule évocation de son nom fait rire !), Dany Brillant, notre « crooner » national, et surtout Djamel, qui apporte avec lui un peu d’humour « Chabat-Canal » tant apprécié dans l’épisode précédent. Enfin, cerise sur le gâteau, Clavier a disparu ! Et son remplaçant, Clovis Cornillac, qu’habituellement je supporte aussi bien qu’un cassoulet périmé, est étrangement digeste et nous fait presque regretter le fait que ce ne soit pas lui qui enfile le costume d’Astérix depuis le premier opus de Claude Berri.
Au final, Astérix aux Jeux Olympiques est moins bon qu’Astérix et Obélix : mission Cléopâtre, mais nettement meilleur qu’Astérix et Obélix contre César. Médaille d’argent donc. Et dès lors que l’on aborde ce thème de l’argent, on peut légitimement se demander pourquoi ce troisième volet a été si coûteux, pour un résultat aussi moyen. Du gâchis ? Certes. Mais avant de crier au scandale à tout-va, il est bon de rappeler que ce sont les millions d’euros que ce film récoltera, grâce aux nombreuses entrées et donc au succès commercial, qui permettront à la production cinématographique française de demeurer plutôt florissante et diversifiée, même si la plupart du temps elle oscille entre le mauvais et le très mauvais... et trouve généralement bonne grâce aux yeux, un brin défectueux, de la critique française « institutionnalisée », habituée à bouder tout ce qui ressemble de près ou de loin à un succès populaire.
Maxime Freyberger (rédacteur sur www.melting-actu.com)
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