Bowie, Lemmy, Boulez, Delpech, ainsi s’en va le 20ème siècle

Quatre disparitions en l’espace de 15 jours résonnent d’une tonalité mélancolique, suintant d’une teinte nostalgique, rappelant qu’un monde n’est plus et ne reviendra plus. Un monde marqué par l’audace, l’invention, la nouveauté, la curiosité, la fureur de vivre et la douceur d’exister. Ce monde qui fut le 20ème siècle post-68 ressemble à une époque enchantée et en chansons, certaines légères et sucrées, d’autres improbables ou alors sauvages. Quatre artistes tous différents mais symbole d’une époque sont décédés récemment.
Lemmy Kilmister était le chanteur, bassiste et membre fondateur du groupe d’heavy metal Motorhead. Un artiste complet comme il y en eut beaucoup des années là. Le métal est un genre musical caractéristique de notre époque. Même si on ne le voit pas sur nos chaînes publiques qui ont fait le choix du standard et de la médiocrité. Avant de jouer du métal, Lemmy fut le bassiste d’un groupe légendaire de space progressif, Hawkwind. Tout un symbole. Une légende du métal s’en est allée entraînant dans son sillage son magnifique cortège de souvenirs.
Michel Delpech est lui aussi parti. Un chanteur mais aussi auteur et même compositeur. Il savait mettre en chanson avec une âme bucolique les traits de cette époque étonnante qui acheva un ancien monde très formaté pour laisser la place à une société festive, joyeuse, inventive et bien sûr les conséquences sur les vies avec le boom des divorces mais aussi l’amour devenu une valeur prisée par la jeunesse. Faire l’amour est une expression qui n’a aucun sens avant 1960. Delpech était ce qu’on appelle un chanteur populaire mais pas populiste. Un poète qui maintenant disparu nous fait prendre conscience que c’est aussi une époque qui s’en est allée et que le retour du tragique et de l’horrible s’est invité dans notre histoire nationale après les assassinats de janvier et novembre 2015.
Pierre Boulez incarna lui aussi une époque. On peut raisonnablement penser que les fans de Hawkwind, Motorhead ou Delpech n’avaient que peu d’affinités avec ces œuvres de musique qu’on dit contemporaines ou concrètes et qui se révèlent d’un ennui mortel au bout de quelques minutes, sauf pour les amateurs éclairés qui en assistant à ces messes contemporaines se sentaient des élites, comme s’ils était des moines initiés capable de saisir les mystères impénétrable de cette musique absconse. Mais Boulez était indispensable pour marquer l’époque du sceau des avant-gardes. En adressant un coup de pied au derche des sinistres conservateurs. La société des seventies avait aussi en son sein des notables, des gens qui seraient promis à une vie d’élite. Boulez fut un excellent chef d’orchestre mais aussi le prophète de la décadence propre au 20ème siècle. Un siècle démocratique. La décadence s’est démocratisée, Boulez pour les élites et le glam rock pour les classes moyennes.
David Bowie a surfé sur la décadence mais avec un style et une classe évidente. Bref, un talent contrastant avec les piètres prestations de Slade à Glitter. Bowie incarne cette période de grande créativité. Son départ nous rappelle qu’il fut un artiste complet alors que notre époque se prête à toutes les impostures artistiques, de Obispo, Maé et Orelsan à François Hollande. Bowie a émergé presque en même temps que les Pink Floyd. Il fut un rocker fédérateur et assez consensuel. Capable de contribuer avec style et élégance aux tendances musicales de chaque époque. Chanteur pop avant 1970, rocker au même titre que Hendrix dans le début des seventies. Puis dans l’after punk pendant la période berlinoise marquée à New York par l’avènement des Talking Heads. Ensuite, des incises assez réussies en surfant sur la soupe des eighties. Bowie n’a jamais été vulgaire. Même dans les genres qui s’y prêtaient.
Notre époque est devenue vulgaire. Onfray est juste quand il fustige Tapie et Hanouna. Bien que cela n’ait pas de rapport avec les djihadistes. Pour ma part, je pense que la télé Drucker, Sébastien, Castaldi et Hanouna a fait plus de dégâts dans la culture que quatre années d’Occupation. Ce qui permet de souligner que ces quatre figures musicales décédées nous font ressentir un certain vide en cette époque marquée par les réseaux sociaux et la guerre civile à bas bruit qui se dessine en Europe alors qu’au Moyen Orient, une terrible guerre sévit parce que deux régimes se disputent la première place. L’Iran est un pays qui a une culture mais l’Arabie saoudite est un pays sans âme et maintenant dangereux. Nos dirigeants politiques en France n’ont plus rien de commun avec ceux de l’époque Giscard et Mitterrand. Celle qui porta au pinacle le métal, le prog, Bowie et Lemmy, sans oublier le regretté et fort sympathique Delpech qui au final était une belle personne. Pas comme la plupart de ces parvenus qui par on ne sait quelle connivence parviennent à une célébrité médiatique, que ce soit dans le cinéma, la chanson ou l’écriture.
Adieux seventies, c’était une belle époque. Le monde qui arrive se dessine comme sinistre mais l’homme a la capacité pour réenchanter le monde, ou se vautrer dans la médiocrité technologique et culturelle. L’Islam ne produit presque plus de culture et nous devons être vigilants car nous somme aussi sur un chemin de décivilisation. Bowie s’en est allée le jour où Johnny a chanté un dimanche de janvier, condamnant de ce fait Charlie à une double peine. Je suis Bowie mais pas Johnny !
15 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON