Chasseur d’images et casseur d’images
Deux sortes de personnes sont promises au succès dans notre société de l’image : les iconographes et les inconoclastes. Les premiers prennent des images, les seconds les cassent quand ils les trouvent trop éculées. Mais les deux grands baroudeurs dont il sera question ici n’ont pas cherché le succès, bien qu’appartenant à ces deux catégories. L’actualité les rappelle à notre souvenir sous une discrète lumière.
Le supplément du Monde, Le Monde2, consacre un dossier d’archives spécial au suisse errant Nicolas Bouvier et Le Nouvel Observateur rencontre Pierre Barouh dont le refrain "chabadabada" est resté dans toutes les mémoires et se fredonne sans souci de paroles.
Pierre Barouh, l’iconoclaste ou le nonchalant qui passe :
Des ronds dans l’eau...
Promeneur du monde, Pierre Barouh a un "triangle magique : Québec, Brésil, Japon". En 1966, de retour du Brésil, Pierre Barouh compose, avec Francis Lai, la bande originale du film Un homme et une femme de Claude Lelouch. Ce succès (et A bicyclette en 1968) fait sa fortune. Toutes les portes du show-biz qui s’étaient fermées à lui, s’ouvrent tout à coup. Trop tard ! Il vient de fonder sa propre maison de disques. C’est ainsi que naît le label Saravah, maison iconoclaste qui fera émerger des talents originaux comme Jacques Higelin, Brigitte Fontaine, David Mc Neil, et qui sera le premier label à promouvoir les "musiques du monde", dans les années 60 où la promotion de cette musique en France était encore d’avant-garde. Il est vrai que Pierre Barouh est tombé amoureux de la musique brésilienne dans sa jeunesse. Au Brésil, il compose avec Baden Powell une Samba Sarava qui va compléter la bande annonce d’Un homme et une femme. Barouh casse son image de jeune premier du cinéma et de chanteur triomphant, il tourne le dos au succès commercial pour faire Des ronds dans l’eau, comme dit la chanson qu’il a écrite pour Françoise Hardy, ballade dans laquelle il dit aussi ces mots : "L’ambition a des lois / L’ambition est un culte".
Une interview de Pierre Barouh de routard.com en 2005 : à lire ici.
Nicolas Bouvier, l’iconographe ou L’Usage du monde :
"Comme une eau... le temps se retire..."
Le Monde2 rend hommage à Nicolas Bouvier, un autre grand baroudeur assez nonchalant lui aussi : s’il ne fait pas des ronds dans l’eau, Bouvier se compare à un bout de bois qui dérive et dit "Comme une eau, le monde vous traverse et pour un temps vous prête des couleurs. Puis se retire, et vous replace devant le vide qu’on porte en soi, devant cette espèce d’insuffisance centrale de l’âme qu’il faut bien apprendre à cotôyer, à combattre, et qui, paradoxalement, est peut-être notre moteur le plus sûr". Une belle phrase à méditer ! Nicolas Bouvier a disparu en 1998. Plusieurs photos tirées de sa riche iconographie sont publiées dans le supplément du Monde. Auteur effacé, il fait dans L’Usage du monde un récit de voyage attachant de ses pérégrinations en voiture sur la route de l’Orient : Yougoslavie, Macédoine, Turquie, Iran, Afghanistan, Inde et Ceylan. Puis le Japon, où il séjournera régulièrement.
Retrouvez aussi cet écrivain sur le site routard.com : à voir ici.
19 photos d’un photographe qui a suivi les traces de Bouvier : diaporama ici.
Alors, voilà ! Plutôt qu’un long discours, ces deux personnages illustrent le titre de cet article et vous donneront, je l’espère, l’envie de mieux les connaître.
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