Cinéma - Les Ch’tis cassent l’baraque
C’est déjà un phénomène et c’est une drôle de surprise pas trop prévue par les professionnels de l’industrie cinématographique. « Bienvenue chez les ch’tis » casse la baraque en une seule semaine d’exploitation avec plus de 5 millions d’entrées. Des bases propres à détrôner les plus grands succès tels « Titanic » où des suites célèbres des « Bronzés » et autres « Visiteurs » pas loin des 15 millions d’entrés.
Pour un deuxième film, Dany Boon accomplit un coup de maître dans la
lignée de ses spectacles, mais avec une vraie adaptation
cinématographique réussie. Le Nord est à l’honneur, les clichés s’y
rapportant tournés savamment en dérision, mais avec retenue, humour et
respect. C’est d’ailleurs peut-être ça la première raison du succès :
que la simplicité, le quotidien l’emporte par le sourire. On ne sauve
pas le monde dans le film non, il n’y a pas d’effets spéciaux, on ne
parle pas des grands de ce monde ou de contes de fées. Non on ne parle
que des gens, ceux d’en bas de l’autre pomme de Raffarin. Et puis l’on
rit beaucoup car les gags ne manquent pas, les situations cocasses
s’enchaînent sans tomber dans la trop grande caricature, Kad est très
bon comme d’habitude et autour de lui ça assure y compris les guest
stars tel Galabru.
La première moitié du film est énorme, la suite
s’essouffle un peu, mais se veut aussi plus sentimentale. Mention
spéciale à la tournée en duo pas loin de rappeler les tontons
flingueurs dans leur cuisine...
A côté des presque 80 millions
d’euros de budget du dernier Asterix, les 11 millions des Ch’tis font
un peu parent pauvre sauf au box-office.
Lancé d’abord dans le Nord,
le film a obligé les édiles parisiens à se déplacer à Lille pour
assister à la première. Le succès est immédiat là-haut, mais, plus
étonnant, il ne se dément pas aux quatre coins de l’Hexagone et pas
seulement auprès des expatriés comme moi.
Assurément, il répondait à une attente, celle peut-être de tout
simplement passer un bon moment sans starisation, glorification ou
moralité.
La comédie à la française est de retour, chapeau Dany.
C’est Pierre Desproges qui aurait été content de ce pied de nez au marketing :
"Mais
elle est immense, mon cher, la prétention de faire rire. Un film, un
livre, une pièce, un dessin qui cherchent à donner de la joie (à
vendre de la joie, faut pas déconner), ça se prépare, ça se découpe, ça
se polit. Une œuvre pour de rire, ça se tourne, comme un fauteuil
d’ébéniste, ou comme un compliment, je ne sais pas si tu vois ce que je
veux dire avec ce trou béant dans ta boîte crânienne... Molière, qui
fait toujours rire le troisième âge, a transpiré à en mourir. Chaplin a
sué. Guitry s’est défoncé. Woody Allen et Mel Brooks sont fatigués,
souvent, pour avoir eu, vingt heures par jour, la prétention de nous
faire rire. Claude Zidi s’emmerde et parfois se décourage et s’épuise
et continue, et c’est souvent terrible, car il arrive que ses films ne
fassent rire que lui et deux charlots sur trois. Mais il faut plus
d’ambition, d’idées et de travail pour accoucher des ’Ripoux’ que pour
avorter de films fœtus à la Duras et autres déliquescences placentaires
où le cinéphile lacanien rejoint le handicapé mental dans un même élan
d’idolâtrie pour tout ce qui ressemble de près ou de loin à de la merde."
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