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Accueil du site > Culture & Loisirs > Culture > Considérations existentielles

Considérations existentielles

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1. Exister ça signifie littéralement sortir du néant, parvenir à l'être avec le préfixe ex comme dans extérieur (rien à voir avec votre ex-femme|mari) et sistere en latin se tenir, se poser, se placer qui lui-même a donné des notions telles que station, stationner, constance, distance etc. Donc on pourrait dire qu'exister est quasi-synonyme d'être puisqu'être signifie se tenir, se trouver, se comporter, le fait d'exister... sauf qu'exister dispose d'une émergence dont ne dispose pas être quoi qu'être ait aussi une dynamique locale peut-être plus proche de la station néanmoins.

 

2. C'est le cas de le dire (néanmoins) puisque être se dit de ce qui n'est pas néant, néant-moins tandis qu'exister comprend l'opération soustractive du néant pour parvenir à l'être. Et c'est très curieux alors comme le néant est créatif dans la notion d'existence et absent de la notion d'être. Par l'existence le néant est un générateur à être, par l'être le néant est la différence pure qui ne se peut concevoir car seul l'être se conçoit. Dit autrement : par l'existence le néant est une nuit avançant vers l'aurore de l'être, par l'être le néant n'est ni la nuit ni l'aurore ni sûrement pas le jour et tout au plus le crépuscule de l'être (son anéantissement, sa néantisation, son annihilation).

 

3. Ce qui existe est toujours un peu naissant tandis que ce qui est s'éternise toujours un peu. Voilà pourquoi la Bible fait dire au Dieu exclusif je suis qui je suis. Mais ce passage est en fait plus judicieusement traduit par j'adviens tel que j'adviens et dans sa version avec être il signale plus aisément l'éternité tandis que dans sa version avec advenir il signale plus aisément l'existence. Et comme originellement c'est advenir qui compte tout se passe comme si le Dieu exclusif était un l'émergence-même de ce qui est plutôt que l'Être...

 

4. ... c'est cohérent avec l'idée de Création, avec la théologie négative (celle qui dit qu'on ne peut rien dire du Dieu), avec l'hermétisme (qui dit que c'est un Dieu caché) ainsi qu'avec sa transcendance (il n'est pas l'Être mais son avènement) ; cela dit ce n'est pas cohérent avec une Création originaire seule mais permanente puisque l'existence est une émergence, et le monothéisme est dans l'impasse quant à ce Dieu-Devenir du moins s'il s'en tient à l'historisme biblique encore que le Dieu exclusif intervienne çà et là dans l'Être : on ne s'en sortirait qu'à postuler que « ses voies sont impénétrables » et qu'« il est grand le mystère de la foi » ce qui laisse à désirer, d'autant plus que c'est sans lien de cause à effet avec l'élection d'Israël ni avec l'amour chrétienne ni non plus avec l'idée mahométane d'une dernière prophétie islamique qui toutes les trois sont des problématiques non-existentielles ce qu'on appelle ici existentiel encore qu'elles fassent partie de la vie.

 

5. C'est Heidegger qui avait parlé d'un va-et-vient de l'Être le plus ontologique écrit Estre à l'ancienne française (en allemand écrit Seyn par rapport à Sein) pour parler de la logique temporalisée de l'existence comme extase ou sortie d'une nuit singulière que le philosophe finira par néantiser|désigner pour néant en disant que l'Être est Abgrund|abîme = sans raison|fondement. Ce qui était placer le nihilisme à la racine tout en prétendant le dénoncer dans la modernité et même à croire le dénicher chez Nietzsche en le mésinterprétant pour ontologique quand il était cosmologique (ce qui relève de l'ontique chez Heidegger). C'est dommage d'avoir fait semblant de ne pas le comprendre ainsi...

 

6. Là où Heidegger nous intéresse c'est avec le Dasein que chacun est et qu'on n'a su traduire en français que par être-là voire être-le-là ce qui est quand même difficile et finalement peu français, notre langue préférant les notions composées depuis le grec ou le latin. Alors qu'on me laisse partir de la notion d'eccéité parfois écrite haeccéité sur la base de ecce, haec pour voici, ceci et désignant le principe ontologique de toute singularité. Mais il faut la situer là en latin hic de sorte que nous obtenions le mot-valise d'hiccéité pour traduire Dasein ce qui est tout à fait satisfaisant. C'est-à-dire que tout un chacun est une hiccéité, ce qui est bien plus judicieux au plan de la philosophie heidegerienne que de parler avec Jean-Paul Sartre de réalité humaine et d'être-en-situation encore que cette autre mésinterprétation soit à la source non-dépourvue d'intérêt de la philosophie sartrienne qui comme toute philosophie déploie sa perspective. Enfin donc l'existentialisme sartrien n'est pas l'existentialisme heideggerien et pour tout dire on parlerait plus judicieusement d'existentiellisme sartrien puisque Sartre est beaucoup plus dans ce que le commun des mortels nomme « problèmes existentiels » que Heidegger (Heidegger qui lui est plus à la racine de leurs possibilités comme de toute possibilité pour le Dasein = l'hiccéité). Sartre reste ontique eut égard à Heidegger, quoi.

 

7. L'hiccéité a une situationnalité (In-der-Welt-Sein, couramment traduit par être-au-monde), une mutualité (Mit-Sein, couramment traduit par être-avec), une déterminité (Faktizität, couramment traduit par facticité), une compréhensivité – sous-entendu : des choses (Bedeutsamkeit, couramment traduit par significativité) et une mortalité (Zum-Tod-Sein, couramment traduit par être-vers-la-mort).

 

8. Heidegger critiquait déjà la technique qui se déployait à son époque comme une calculabilité perdant l'être|existence au profit d'une vaste machination. Que dirait-il des réseaux internautiques, de la vie branchée, de l'être-connecté, de surfer, de la « réalité augmentée , de la vie en trottinette ? On le devine aisément et tout le monde le dit déjà plus ou moins à propos du fait de rester rivé derrière son écran depuis l'avènement de la télévision déjà. Friedrich Jünger avait pour ainsi dire parlé d'un technoanimisme du « collectif technique » comme auto-entraînement de la technique par la technique par ses techniciens|utilisateurs interdépendants. Et bien qu'il en fut ainsi de toute technique depuis l'aube de l'humanité cela est devenu exponentiel aujourd'hui et on n'en sort plus ?

 

9. On ne peut théologiquement pas le dire autrement que par l'expression « Dieu est piégé, nous prîmes Dieu au piège » et ce n'est pas rien à condition de sortir du monothéisme évidemment qui se contente de nous faire la morale peu importe la technique, et c'est dans ce cadre que Heidegger disait que « seul un Dieu peut encore nous sauver » en ne pensant pas au monothéisme mais au Dernier Dieu.

 

10. Sinon il y a la réincarnation du Grand Pan avec une certaine écologie (à ne pas confondre avec les écologismes sociopolitiques parfois pourris jusqu'à la moelle) depuis que Lovelock parla de Gaïa pour désigner la Terre, et avec Pan & Gaïa de tous les Dieux & Déesses... à condition de ne pas en faire des Pokémons ou autre fantasy quoi que la fantasy parle déjà du truc. Parce que la fantasy ce n'est pas l'hiccéité mais que l'hiccéité s'invente la fantasy sur la base de ses propres émois situationnels, mutuels, déterminés, compréhensifs et mortels quant à sa vie ou si vous préférez sa chance et son destin, et la chance et le destin de toutes les hiccéités partageant sa condition sociale, populaire et culturelle. Ça ne marche pas sans de tels partages.

 

Lire aussi :
- Considérations (anti)humanitaires ;
- Considérations consignatrices de votes ;
- Considérations militantes (Manifeste pour la Nouvelle Gauche) ;
- Considérations gauchistes, et droitardes aussi (gauche-droite 3) ;
- Considérations rigoristes, ou « néo-morales » ;
- Considérations sexuelles 2 – sur le « Philosophie » Magazine de ce mois ;
- Considérations gauche-droite 2, ou plutôt woke-braque... ;
- Considérations inclusives (« Décluez-vous ! ») ;
- Considérations féminines ;
- Considérations économiques ;
- Considérations hiérarchiques et bonne année ;
- Considérations musulmanes ;
- Considérations informatives ;
- Considérations narcissiques, ou "animeuses" ;
- Considérations gauche-droite 1 ;
- Considérations françaises - pour l’étranger européen, oxydantal* et autre ;
- Considérations émeutières ;
- Considérations sexuelles 1 ;
Condisérations entrepreneuriales et administratives ;
- Considérations territoriales ;
Considérations bourgeoises ;
Considérations décoloniales.


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7 réactions à cet article    


  • rogal 21 septembre 13:29

    De l’hoccéité à revendre !


    • Alain Malcolm Alain Malcolm 21 septembre 20:47

      @rogal. Un propos ad hoc !


    • rogal 22 septembre 00:48

      @Alain Malcolm
      Oc !



    • riemann66 riemann66 22 septembre 04:48

      noosphere

      Ma thèse sur la noosphère [1]  selon laquelle « notre mémoire, soit l’ensemble des informations qui sont passées par notre enveloppe matérielle, est stockée pour toujours dans une noosphère » peut être contestée, disons que c’est une hypothèse de travail, elle n’en demeure pas moins plus éclairante sur ce qu’on appelle l’existence, l’Être, la conscience d’être que la plupart des considérations philosophiques auxquelles j’ai eu accès et dans lesquelles je me perds toujours. Dans cette thèse par exemple, la conscience d’être disparaît à chaque endormissement ainsi qu’au moment de la mort, cet ultime endormissement, tout simplement quand cesse la connexion entre notre enveloppe corporelle et la portion de mémoire qui lui est attribuée dans la noosphère. Rien n’empèche une autre enveloppe corporelle de s’y connecter, de façon furtive, chaotique, ou permanente, stable. La télépathie, la réincarnation et bien d’autres phénomènes paranormaux peuvent ainsi être abordés plus ... sereinement, plus logiquement. Et par enveloppe corporelle j’entends tous les êtres vivants, les systèmes complexes capables de traiter l’information, en principe pour la filtrer, l’améliorer, augmenter sa néguentropie, les être humains, bien sûr, mais aussi les animaux, les plantes, et même les machines « ordinateurs » et les groupes sociaux et les nuages et les galaxies ... Oui on peut ainsi comprendre comment une amibe et un nuage dans le ciel peuvent être en relation, comme le sont deux êtres humains. Soit directement, en contact physique, soit par le biais de leurs mémoires dans la noosphère. Deux plantes physiquement séparées, en étant par exemple placées dans des bacs étanches distincts, peuvent communiquer un stress, la présence d’un prédateur, en échangeant des messages dans la noosphère. Ma grande question est de savoir quel peut être le langage utilisé. Il doit être universel, intemporel, élémentaire. Pour moi il doit ressembler au lambda-calcul, un jeu de retranscription de chaines composées de mots, de groupes de caractères, par exemple quatre composants ATCG [2] de l’ADN [3] ! On imagine bien que les quatre composants ATGC ne sont pas les seuls possibles dans l’Univers. Et qu’in fine toutes les chaines peuvent se ré-écrire sous forme de seules combinaisons binaires b 0|1, la base universelle, (d’aucuns parleraient du couple Yin/Yang), la passerelle entre toutes les formes de vie ... et de conscience.

      Je dis ça, je dis rien, mais il se trouve que ça répond à pas mal de mes questions existentielles.

      Pas belle la vie ?

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