Corsaires de la côte d’Opale : bienvenue chez les ch’tis pirates
Un petit rappel historique en ces temps troublés où l’on constate un regain de la piraterie avec pour illustration les mésaventures du Ponant au large des côtes somaliennes. Les détroits, passages obligés dans les liaisons maritimes, sont des lieux privilégiés pour les actes de piraterie, et des endroits comme le golfe d’Aden et le détroit de Malacca ont toujours été des endroits dangereux. Le détroit du Pas-de-Calais, situé sur une des routes maritimes les plus fréquentées, n’échappe pas à la règle et fut un haut lieu de la piraterie.

On ne sait si des actes de pirateries se produisaient à
l’époque où morins et atrébates
peuplaient la région et s’ils cherchaient à perturber le commerce entre
Le Haut Moyen Âge fut une période faste pour la piraterie dans la
région et les Vikings venus
du Nord, essentiellement Danois, mais aussi quelques Norvégiens, mettaient à feu
et à sang toute la région, pillant villes, église et abbayes à l’époque où Saint-Omer
était encore un port. Ils remontaient les cours de l’Escault et de l’Yser sans
problème et leurs bateaux à fond plats étaient bien utiles pour s’aventurer sur
d’autres rivières à faible tirant d’eau.
Sigfrid le Danois fit fortifier la ville de Guînes (Wikipédia) et
celle-ci servit de place forte aux Vikings qui piratèrent et pillèrent
joyeusement dans la région, prenant de nombreuses villes et se servant de la
région comme base arrière pour leurs opérations de l’autre côté de
Mais l’âge d’or de la piraterie dans le détroit du Pas-de-Calais
se situe entre 1568, début de la guerre entre l’Espagne et les Provinces unies
et 1713 date du désarmement du port de Dunkerque au traité d’Utrecht,
l’Angleterre exigeant d’être débarrassée de ce pistolet pointé sur le cœur de
Londres. Dunkerque et les corsaires dunkerquois (Wikipédia) menèrent la vie dure à tous les bateaux marchands passant par le
chenal naturel que constitue le détroit du Pas-de-Calais où il était très
risqué de s’aventurer à l’époque. Dunkerque tomba sous la coupe des rebelles
hollandais en 1577 et les capitaines dunkerquois s’en prenaient aux navires
espagnols. Par la suite, après la reprise en 1583 par le duc de Parme pour le
compte de l’Espagne, elle devient la tête de pont du monde catholique au
contact des protestants (Anglais et Hollandais) et les câpres dunkerquois (kippers
= pirates en hollandais) ou dunkirkers pour les Anglais s’en prennent à leurs
navires. C’est une période chaotique où se font et défont les alliances et où
les villes changent fréquemment d’occupants. Ainsi Calais débarrassée des Anglais en 1558 fut plusieurs fois occupée par les Espagnols avant d’être définitivement
aux mains des Français. Idem pour Dunkerque dépendant tour à tour de
Dunkerque devenue française en 1646, les activités des corsaires
dunkerquois sont encouragées sous Louis XIV par Colbert qui voit en eux une
force d’appoint au désespoir des Hollandais qui croyaient en avoir fini avec
cette menace, et le port abrite alors une centaine de capitaines corsaires dont
le fameux Jean
Bart qui a sa statue
en bonne place. Dunkerque est très bien située pour cette activité car c’est un
piège naturel pour ceux qui ne connaissent par les passages à travers les bancs
de sable fort nombreux dans le secteur. Le corsaire dunkerquois a servi de
modèle au monde entier, la frégate dunkerquoise s’imposant comme le navire
idéal pour la course contre la plupart des navires (glossaire des navires)
de l’époque, les galions, navires militaires étant lourds et peu maniables.
Dunkerque, Calais et Boulogne pratiquent de concert la guerre de
course et les corsaires dunkerquois font de nombreuses prises. Ils sont
fortement aidés par les fortifications, chenaux et écluses construites sous
l’impulsion de Vauban. Certains corsaires, comme le Dunkerquois Jakobsen ou le Boulonnais Panetié entrent par la suite dans la marine royale. Marine royale et
corsaires dunkerquois firent à eux seuls 3 000 des 7 000 prises françaises durant
cette période qui perdura après la mort de Jean Bart, personnage symbolique de
la guerre de course. Le
port de Calais muni de cinq forts reçut à lui seul plus de mille captures
et l’escadre du Nord multiplia les exploits avec les célèbres capitaines
Tourouvre, Saint-Pol,
La révolution, l’hostilité affichée de l’Angleterre, les guerres
napoléoniennes et le blocus continental qui en découlèrent remirent un temps la
course à l’honneur. C’est pendant cette période que s’illustra un célèbre corsaire
calaisien, Thomas Souville, surnommé par les Anglais « Cap’tain Tom »,
qui fit de nombreuses captures jusque dans l’estuaire de
Le détroit du Pas-de-Calais est toujours le plus fréquenté au monde, passage obligé vers Rotterdam, Anvers et Hambourg, mais dans ses eaux vous ne croiserez des navires remplis de gueux des mers, câpres ou autres corsaires. Reste le folklore et tous les ans a lieu à Dunkerque pendant le carnaval le fameux bal des corsaires, clin d’œil à ce passé qui fit de la ville le plus grand port français de son époque.
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