= Sandro : D’habitude, dans un bon plan de dissertation, on va du général au particulier, ce n’est pas un prof. de français comme vous qui me contredira. Pourtant, j’aimerais faire l’inverse et entrer directement dans le corps du sujet, c’est-à-dire des textes.
"Les petits enfants", d’abord. Cette chanson est un peu un OVNI dans l’univers Bashungien. Courte, faussement simple, un leurre de premier degré. Qu’avez-vous voulu y dire ? La mort de l’enfance lors du passage à l’âge adulte, ou la mort tout court, où l’on dit qu’on revoit défiler un "best off" de sa vie en 3 secondes, comme on tombe d’un immeuble ?
= Daniel Tardieu (D.T) :
Un peu des deux. Je suis parti de l’idée de la blague du type qui tombe d’un immeuble, et qui dit "jusqu’ici, ça va…" Optimiste, mais pas trop. Parce que bon, on sait qu’à l’arrivée… Donc, oui, c’est la mort de l’enfance, qui se jette dans la vie et aussi la mort tout court. A mon avis, c’est ce qui a plu à Alain. D’où il venait, avec ce qu’il trimballait dans le container, on peut dire qu’il s’est "jeté". Ca lui a parlé. Il y avait de la dérision, de l’humour (leur vie est si courte, à ces enfants, qu’ils n’ont pas grand-chose à raconter). Et puis en même temps, il y a un truc très morbide.
= Marc Besse, dans sa biographie, dit qu’Alain vous a fait couper la dernière strophe. Que disait-elle ?
=DT : Alain pensait qu’elle n’apportait rien, il voulait quelque chose de très sombre, mais ramassé.
La strophe disait :
"Les petits enfants qui tombent du balcon
Entre les briques roses et les moineaux
Il y a juste une petite goutte de sang
A la boutonnière des passants"
Il jugeait que c’était redondant.
= Ca lui arrivait souvent, de couper ?
Oui. Soit j’avais des débuts soit des textes entiers. Il travaillait à la guitare à coté. Il faisait ses machins avec un Revox, et chantait en yaourt. Il pouvait garder le début, le milieu, parfois la fin d’un texte. Il n’y avait pas de règle. Le départ est toujours de moi, et il improvisait une mélodie. Mais il n’arrivait jamais avec une musique dans laquelle il me demandait de rentrer mes textes au chausse-pied. Non, jamais.
De toute façon, avec le recul, tout ce travail est un peu dérisoire ou contingent. Alain est d’abord venu vers moi avec la musique de ce qui allait être "Gaby". Je lui ai écrit un texte qui s’appelait "tout le monde pleure dans l’autobus", un texte un peu surréaliste avec un chauffeur qui raconte ses déboires amoureux. On l’a enregistré. Et en fait, la même musique est devenue "Gaby", avec les paroles de Bergman…
"Milliards de nuit dans le frigo", on l’a écrite en une heure, à quatre mains avec Boris sur une nappe de restaurant. Il avait le titre et la première phrase. Alain galérait, on parlait de ceux qui étaient "au frigo" du succès. En fond sonore du restaurant, il y avait Balavoine avec "le chanteur", qui veut être beau, intelligent, que les filles se jettent sur lui, lui arrachent sa vertu. On est parti là-dessus.
= Autre pépite, ayant eu cette fois un plus large écho dans l’œuvre Bashungienne (qui la chantait encore dans "La tournée des grands espaces", et qui est un peu l’hymne de ralliement des fans du "canal historique") , c’est "Bijou, Bijou".
Que pouvez-vous dire sur le contexte rédactionnel de ce titre ? Et sur sa rédaction tout court ?
= D.T : On l’a construit ensemble, un peu dans la douleur - du moins dans l’urgence- dans l’hiver 78/79, dans ce studio/ferme au milieu de nulle part, sans chauffage, où toute l’équipe de ce qui allait être "Roulette russe" devait finaliser le bébé. Il y avait une grosse pression, Barclay n’avait payé l’endroit que pour une semaine.
J’avais le départ de la chanson, je cherchais quelque chose d’assez distancié, un peu comme dans les polars. J’en lisais beaucoup à cette époque, lui aussi. Je cherchais quelque chose comme ces acteurs américains de polar, des mecs un peu dessalés, revenus de tout, un peu durs avec les femmes. Ils les appellent "Baby", Honey, "Sugar" comme un truc convenu, mais ils ne croient plus en rien, à la Gainsbourg. Je cherchais un terme équivalent en français, et j’ai trouvé "bijou". J’avais cette idée d’un personnage un peu cynique. Le contexte était assez sombre : je venais de divorcer, Alain était en train de se séparer de sa première femme, Chantal (NDLR : la première Chantal), donc on n’a pas eu besoin de se faire de dessins, on a compris tout de suite ce que ça voulait dire, les références. Le vieux couple qui n’en est même plus à se déchirer. On est simplement dans le constat que la vie commune n’est plus possible, qu’il faut "trouver quelqu’un d’autre".
=On dit que vous étiez un peu "en panne" pour finir ce texte, et que c’est Bergman qui a débloqué le truc, en rajoutant des drôles de joujoux dans le bain de la fille… C’est vrai ?
=DT : Oui, j’étais bloqué à partir de "y’a des feux rouges partout". Alain voulait un truc très concret, très quotidien, alors que moi j’étais encore avec mes clins d’œil poétiques. Et puis un soir, j’ai demandé de l’aide à Boris Bergman, qui écrivait les morceaux de l’album de son coté, dans une autre pièce de la maison. Il m’a pris ma feuille, et il a ajouté les fameux "joujoux", les sex-toys, dirait-on aujourd’hui. En une demi-heure, on s’est mis ensemble sur un coin de table, et on a terminé l’affaire.
Ce déclic m’avait "débloqué". Alain avait déjà les "houhou, ou-ou" du refrain, il patientait, il voulait des paroles…A l’époque, j’habitais l’Avenue St Honoré, c’était l’hiver, et il y avait des gens de l’armée du Salut qui venaient au coin de ma rue, distribuer des soupes et des marrons chauds. C’était sinistre. J’ai repris cela. Ca collait bien avec l’idée de la rupture, la solitude de mon deuxième étage, d’où je les voyais par la fenêtre se les geler et chanter pour se réchauffer.
En revanche, je veux rectifier une chose. J’ai lu quelque part (peut être la bio de Besse) que le "héros" de Bijou, Bijou serait un lâche. Le type qui attend que sa femme dorme pour se barrer discrètement, n’ayant pas le courage de l’affronter. Pas du tout. C’est peut être la pochette de Mondino qui laisse penser cela, avec un clin d’œil exagéré au polar, mais ce n’était pas le cas dans notre esprit, à Alain et moi. C’est une séparation sobre, résignée, à l’économie de mots et des sentiments déjà morts.
= Auparavant, il y avait eu "Roman-photo". En relisant "le pianiste de l’Eden", je me disais que si on part de ce texte, qu’on continue sur "l’Apiculteur" et qu’on termine par "L’Irréel", la boucle de la vie est bouclée. Et puis je me demandais aussi si vous n’aviez jamais eu d’ennuis avec les ayant droits d’Aragon et le clin d’œil/ parodie à "Est-ce ainsi que les hommes vivent", quand vous dites :
"Mets du rimmel
Lola sur tes cils,
Enfile tes bas résille
Le paradis c’est là
On va faire un show
Avec les morceaux
De ta vie".
=DT : Oui, il y a un peu un fil rouge sur la mort, que l’on peut suivre à présent dans l’œuvre d’Alain, avec le recul. Mais au départ, "le pianiste de l’Eden", c’était plus simple. J’étais en vacances en Tunisie, dans un hôtel au bord de l’eau. Il y avait un bar avec un pianiste. J’ai inventé l’histoire du paradis ou du purgatoire. J’aimais bien l’idée que là-bas on te rejoue les chansons de toute ta vie.
Mais Alain était guitariste, pas pianiste, je ne voyais pas trop ça dans sa bouche. Contre toute attente ça lui a plu, l’aspect polar aussi ("pose ton revolver, enlève ton couteau dans le dos…"), et la boule de cristal. Il a rebondi sur l’idée d’un jeu de mots avec le multi-sens de "boules", sans doute l’influence de Bergman. Quoique à l’époque, il n’en faisait pas tant que cela, c’est venu après.
Sur Aragon, oui, c’est un clin d’œil d’auteur à ce poème superbe, très bien repris par Ferré et surtout Lavilliers, dans une version pleine de culot.
= De façon plus générale, comment avez-vous rencontré AB ?
= DT : Par Alain Rivey, qui était Directeur artistique de son label "Bismuth". Alain cherchait des paroliers pour les gens de son "écurie"( il ne chantait pas, à l’époque), celle de Dick Rivers. J’avais fait les paroles de plusieurs des albums solo de Rivey, notamment "qu’est-ce qui va m’arriver aujourd’hui ?" et "l’homme de ma vie" en 1975, où apparaissait Voulzy également.
On s’est vu, on a dîné, il était intéressé, et c’est moi qui lui est suggéré de chanter lui-même. Je lui avais présenté un texte un peu pompeux, très américain, qui s’appelait "les rivières sans retour".
Ca lui a plu, même s’il ne l’a jamais chanté. C’est comme ça qu’on a vraiment démarré ensemble. Il en avait assez de placer des chansons pour les autres, et moi-même, qui était très sauvage et ne connaissait personne dans le milieu, je n’aurais pas pu l’aider. Je lui ai donc dit : "on s’y met tous les deux, en direct, et on verra bien". Nous avons passé 15 jours en Bretagne dans une villa que j’avais loué. Puis, il a pris contact avec Bergman, et c’est là que j’ai compris qu’ils travaillaient déjà ensemble. Il ne me l’avait pas dit. Il était un peu gêné, mais Alain était secret, et il aimait bien "compartimenter". J’ai finalement rencontré Bergman au studio de l’avenue Hoche où on a enregistré "Roman-photo"chacun de notre coté, à parité de titres. Et on a décidé de se revoir et de travailler davantage ensemble sur "Roulette russe".
Il était sympa, assez lumineux, avec une idée à la seconde. En fait, il m’a un peu "bouffé", en souplesse. Nous étions trois dans ce couple avec AB, et Bergman a joué le "tiers exclu". C’est normal dans un couple, il n’en faut que deux au final…
Mais bon, " rien de personnel", comme disent les américains. On est restés bon copains, on se fait signe de temps à autre. Boris avait une réactivité immédiate, il était "pleins phares", c’était un champion de sprint, même s’il donnait parfois dans la facilité. Moi, il me faut du temps, du calme pour écrire. Quand je soumettais une chanson à Alain, Boris en avait proposé 20 dans le même temps…
= Dans les quelques années de travail avec/pour lui, quels étaient vos rapports, la répartition des rôles ? Vous passait-il des "commandes", ou bien lui avez-vous fourni des textes déjà écrits ? Est-ce que le prof de français acceptait de se faire "corriger sa copie" ?
=DT : C’étaient des mélanges. A part "Roman-photo" et "pianiste de l’Eden", où les textes étaient vraiment complets avant la musique et qu’Alain a conservé intact, c’était un processus mixte, un ping pong. A cette époque, il était très habitué à écrire des musiques sur des textes pour les placer à d’autres. Pour les suppressions, je n’avais aucun problème. On n’écrit pas dans le marbre, on n’est pas Rimbaud. On est plutôt content d’avoir une voix et une sensibilité comme celles d’Alain qui va porter vos textes, les faire vivre pour les gens. Raturer, biffer, c’est le processus normal dans les cuisines.
= Comment et pourquoi est-on passé de votre collaboration à celle de Boris Bergman ?
Dans la douleur, dans l’apaisement, ou le simple mouvement des choses de la vie ?
=DT : Comme je l’ai dit, il ne m’a pas réellement remplacé, puisque nous avons co-existé trois ans, que l’on se connaissait, et que nous avions co-signé (même s’il a été parfois crédité en premier de textes où il n’avait apporté qu’un phrase, comme "Bijou", mais bon, c’est le jeu).
J’ai eu aussi ma part de responsabilité. Entre mes obligations professionnelles de prof. et ma vie personnelle ( je venais de divorcer, je devais conduire ma fille à l’école pour 8.30 le matin), j’étais devenu moins disponible et peu "compatible" avec le style de vie d’Alain et de Boris. Au début, j’essayais de suivre, on buvait des bières, et on allait dans un cinéma permanent à République qui passait des films non-stop. On s’endormait dans nos fauteuils à 4 heures du matin, à 8.30 j’avais cours. Je l’ai fait 4/5 fois, pas plus.
Boris était libre, à plein temps, il avait le même style de vie qu’Alain, il connaissait pas mal de gens dans le métier, moi pas. Ca a fait la différence, voilà tout.
J’ai dit stop, et je ne le regrette pas vraiment. J’ai toujours vécu une vie de "marginal raisonnable".
Je suis solitaire, introverti. Donc, oui, je me suis fait avoir en douceur, par le simple mouvement des choses de la vie, et des gens qui arrivent trop tôt ou trop tard dans la vie d’un artiste. Et puis j’avais dû accepter une avance d’un éditeur du 9 ème arrondissement, j’étais donc en co-édition. Je n’étais pas libre de droit, ce qui évidement n’a pas plu à Alain (je me souviens qu’il m’a dit "là, tu ne m’aides pas, Daniel"). Ce fut le déclic de la rupture professionnelle après "Roulette russe", je pense.
Et puis, on n’était plus trop d’accord sur la ligne textuelle à suivre. On tâtonnait, mais je le sentais très séduit par les calembours de Bergman. C’était une époque délicate, car Alain n’avait pas encore de "marque de fabrique". C’était de la couture, mais on partait dans toutes les directions, et il jetait beaucoup de textes. De tout le monde. Il l’a fait ensuite à Bergman, à Jean Fauque. Il n’était pas toujours facile à vivre, à cette époque…
Mais de la douleur, non. On a vécu une belle aventure.
= Avez-vous écrit depuis ? Pour qui ?
=DT : Avant Alain, j’avais écrit pour Bernard Sauvat, notamment "le professeur est un rêveur".
Aussi pour Dalida. Puis après, avec des gens peu connus, comme Cyril de Turckheim, le cousin de Charlotte, l’actrice. On a fait un bel album ensemble, en 1982, Richard Lable, en 1983, quelqu’un qui n’a pas percé. J’ai placé aussi quelques chansons pour Maxime Le Forestier, et même Bruel, avec "Voulez-vous", qu’il reprend en ouverture de ses concerts pour parler à son public, alors qu’au départ c’était une "chanson d’amour". Je ne l’avais pas écrite pour lui, au départ, on ne s’est jamais vus. Je ne reconnais plus trop mon bébé, mais financièrement, c’est intéressant…
J’ai aussi livré les paroles de l’album solo de Vincent Dehais, ex guitariste de Bernard Lavilliers ces 10 dernières années, qui se lance dans une carrière solo.
= S’il vous fallait choisir trois titres d’Alain, quels seraient-ils, et pourquoi ?
=DT :- "Volontaire", incontestablement. Quand j’ai entendu "Emotions censurées, j’en ai plein le container", j’ai dit bravo, il fallait être Gainsbourg pour avoir trouvé, en deux vers, exactement ce qui définissait Alain à cette époque. Introverti. Muré sur un truc à lui, son Tchernobyl. "Jamais de contact avec l’ordinaire", ça le décrivait bien aussi.
Et puis aussi deux textes de Jean (NDLR : Fauque) :
- "A perte de vue"
-" Mes bras connaissent". Chanson superbe, désillusion suprême. Evoque les déceptions humaines, comme la mort. C’est une chanson polysémique, comme je les aime.
= Question plus personnelle. Revoyiez-vous Alain dans ses dernières années ? Vous est-il arrivé d’aller le voir en concert, et de vous asseoir, anonyme, dans la salle ?Qu’est ce que cela fait d’entendre ses mots chantés dans la bouche d’une "pointure" de la chanson française, de voir l’impact concret des mots sur les gens ?
=DT : Non, je ne l’ai jamais revu depuis 84. Ca m’a un peu surpris, nous étions tout de même relativement proches pendant trois ans, on sortait ensemble, etc.
Un jour, je suis allé le voir à l’Olympia, anonyme, en payant mon billet. C’était en 1984, je crois, ou lors de la tournée "live Tour 85". Je suis allé l’attendre à la sortie de sa loge, il m’a reconnu, il semblait content de me revoir. Je lui ai demandé son téléphone et me l’a donné. Quelques temps après, j’ai appelé et je me suis rendu compte que c’était le téléphone de son attachée de presse. Ca m’a un peu choqué. Mais je suis assez fier, je n’ai pas insisté. Je pensais qu’on reprendrait peut-être contact via Bergman ou Jean Fauque, que je revoyais épisodiquement. Mais ça n’est pas arrivé.
Pour ce qui est du public, oui, dans ce fameux Olympia de 1985, quand est arrivé "Bijou", le type derrière moi récitait les paroles par cœur. Là, j’ai eu une vraie émotion, le type était fasciné par ce qu’il voyait et par mes mots. Ca fait de l’effet. C’est une récompense formidable, la seule valable. Celle qui justifie tout.
Mais je n’ai jamais re-tenté l’expérience. J’étais passé à autre chose, sans doute. Alain aussi. Bien sûr, j’ai suivi sa carrière, écouté la plupart de ses albums.
= "Le temps, ça pourrit tout", on a appris cela avec vous, le "premier porte-plume " de Bashung ( comme il y a des premiers violons en musique classique). Avec le recul, sachant ce qu’on sait, quelle serait votre définition de l’homme Bashung, en quelques mots ? Et de l’artiste ?
=DT : Pour Alain, j’ai été un défricheur, on explorait toutes sortes de pistes qu’on ne savait pas encore être les bonnes. D’autres les ont exploitées, c’est la vie.
L’artiste est devenu immense, il avait déjà des prémices de cela à 30-33 ans, quand on travaillait ensemble. En pointillé, on devinait le brouillon de ce qu’il aurait pu faire, et qu’il est effectivement devenu.
Humainement, c’était un homme très secret. Il me disait juste qu’il partait voir sa marraine en Alsace. Même ses anciens titres, les gens avec qui il travaillait, il ne m’en a jamais rien dit. Il fallait toujours recomposer le puzzle. Comme j’étais aussi un taiseux, on restait branché sur le boulot, les textes. Dès 30-35 ans, il avait une grande confiance en ses capacités, mais semblait davantage craindre la malchance, les coups du sort, le destin contraire. Je pense aussi, pour en revenir aux textes, qu’il avait une sorte de complexe qui lui venait de l’enfance et de n’avoir pas fait réellement d’études. Dans les textes ciselés qui ont fait sa réputation par la suite, je pense qu’il était secrètement heureux de montrer ce qu’il pouvait faire, être pris au sérieux.
= Avoir été un des tous premiers à sillonner la macédoine textuelle d’AB, c’est aujourd’hui de la fierté, une douleur, le regret d’être arrivé trop tôt ?
=DT : Un peu de tout cela, bien sûr.
Le regret surtout que notre collaboration se soit arrêtée dans ces conditions, on ne saura jamais ce que cela aurait pu donner après. Mais Alain était assez compartimenté, comme un informaticien, tous les X années, il "vidait les mémoires" et repartait pour d’autres aventures, avec d’autres gens. Il en a usé pas mal. Il savait ce qu’il voulait et il a eu raison, quand on regarde son parcours et sa carrière. Je ne pouvais que lui dire "bon vent".
=Etes-vous de la famille de Tardieu, le poète de la résistance, avec Vercors et René Char ?
=DT : Non, non. C’est un nom assez courant, surtout dans le sud-Ouest. Mais cela aurait bien collé avec "la nuit je mens" et le Vercors, c’est vrai.
Bien imaginé, mais ça n’est pas ça, désolé…
= Avez-vous quelque chose à ajouter pour votre défense, avant que la garde à vue ne se termine ?
=DT : ( sourire…) Se replonger dans tout ça , réponses à vos questions compris, ça m’a laissé comme un goût de malaise. Je ne dois pas être un nostalgique. Allons plutôt déjeuner…
Interview réalisée le 15 /02 /2010 par SANDRO, pour Agoravox et le Site Officiel d’ Alain Bashung