Eric Métayer dans « Un monde fou » au théâtre La Bruyère

Formidable Eric Métayer qui assume à lui seul sur la scène du théâtre La Bruyère, la réception téléphonique des réservations d’un grand restaurant, tout en composant une galerie de portraits d’une clientèle exigeante, d’une direction du personnel tyrannique et de collègues dépassés par une organisation défectueuse.
Sans recours au moindre accessoire de théâtre, son personnage se débat au mieux des appels incessants au standard pour résoudre les contraintes du planning, les mises en attente nécessaires, les desiderata extravagants d’interlocuteurs d’autant plus égocentriques qu’ils ne perçoivent rien des conditions a minima pour assurer cette mission d’accueil en ligne.
Grâce à un regard exacerbé sur des conditions sociales du travail, bafouées au nom d’un rendement effectué par un intérimaire corvéable à merci alors même que ce job lui permet de se présenter à des castings avec l’espoir de décrocher prochainement un rôle de comédien professionnel, l’orchestration minutieuse de Stéphan Meldegg met en situation une tranche de vie métaphorique digne des Temps modernes de Chaplin, version Play Time de Tati.
La performance d’Eric Metayer peut certes s’évaluer à la voix et au mime d’une trentaine de protagonistes récurrents qui officient alternativement sur la ligne téléphonique en les incarnant au rythme d’une course contre la montre incessante, mais surtout au sentiment d’humanité qui prévaut à chaque instant de chaque réplique du réceptionniste prononcée dans une patience infinie puisque du VIP au client lambda chacun se croit en droit d’exiger haute considération.
Formidable leçon de savoir-vivre de la part de ce héros des servitudes cumulées jusqu’à ce que le vent de la destinée semble enfin tourner en sa faveur pour un happy end bien mérité.
En effet, alors que par un juste retour des choses s’annonce une perspective d’engagement pour une création théâtrale, sans doute pourra-t-il en compensation de tous les désagréments subis, fêter Noël à la campagne avec son père, le seul à avoir fait preuve d’abnégation... au bout d’une ligne téléphonique où la communication s’était bel et bien avérée à sens unique.
Photo © Lot
UN MONDE FOU - *** Theothea.com - de Becky Mode - mise en scène : Stéphan Meldegg - avec Eric Métayer - Théâtre La Bruyère -
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