Femmes sculpteurs du XVIIIe à nos jours : « Sculpture’elles » au Musée des années 30

L’exposition « Sculpture’elles » au Musée des années 30 de Boulogne-Billancourt rend hommage à des sculptrices injustement méconnues.
Avant le XVIIIe siècle, on mentionne la figure légendaire et moyenâgeuse de Sabina de Steinbach, à qui on a attribué deux statues de la cathédrale de Strasbourg. Au XVIe siècle, l’italienne Properzia de Rossi a exécuté des bas-reliefs pour la basilique de Bologne. En Espagne, au XVIIe, Luisa de Roldàn a acquis une certaine reconnaissance de son art.
L’Académie des Beaux-Arts en France est fondée en 1648 : les femmes sont mises à l’écart de son enseignement. Mais ceci n’empêche pas des femmes de s’adonner à la sculpture. Au cours du XIXe, Marie d’Orléans, Félicie de Fauveau ou Marie-Louise Lefèvre-Deumier se révèlent en tant qu’artistes. Marie-Louise Lefèvre-Deumier devient la portraitiste officielle de l’impératrice Eugénie. Félicie de Fauveau est la première française à vivre de son art de sculptrice.
Mais la sculpture - tout comme les autres arts - au féminin souffre des préjugés à l’encontre des femmes : on juge les artistes de moindre talent que leurs équivalents masculins. Ainsi, un critique d’art, Joze, écrit : « La plupart des œuvres de femmes portent une marque évidente de faiblesse et d’infériorité cérébrale » (!) Pouvoir exister en tant qu’artiste n’est pas facile pour une femme à cette époque, car elle a à affronter le regard de la société : les sculptrices Constance Mayer, Juana Romani et Camille Claudel ont connu des destinées tragiques à cause de ça.
L’impossibilité de recevoir un enseignement à l’Ecole des Beaux-Arts a conduit les aspirantes sculptrices à suivre des cours privés : mais le tarif des cours pour les femmes est le double de ceux pour les hommes. La sculptrice Hélène Bertaux veut agir contre cette discrimination par l’argent. Elle veut aussi encourager les femmes à se lancer dans la sculpture en ouvrant en 1870 un cours qui leur est réservé. Hélène Bertaux crée également l’Union des Femmes Peintres et Sculpteurs et un salon annuel pour faire connaître les œuvres de ses élèves. Elle en profite pour lancer ce qu’elle appelle sa « loyale lutte », à savoir l’admission des femmes à l’Ecole des Beaux-Arts. Les premiers ateliers pour les femmes y sont enfin créés en 1900 ; en 1903, les femmes peuvent concourir pour le Prix de Rome. Devant ces tardives mesures, on comprend mieux la remarque de Marie Bashkirtseff qui dit à « ceux qui nous demandent avec une indulgente ironie combien il y eu de grandes artistes femmes. Eh ! Messieurs, il y en a eu et c’est étonnant, vu les difficultés énormes qu’elles rencontrent ».
Cette exposition nous permet donc de découvrir et redécouvrir l’art de ces femmes, dont certaines exerçaient d’autres disciplines artistiques (Sarah Bernhardt, Rosa Bonheur, Marie Bashkirtseff), et de les faire entrer par la grande porte dans l’histoire officielle de l’art.
Exposition « Sculpture’elles » au Musée des années 30 (12 mai -2 octobre 2011)
Espace Landowski, 28 av André Morizet - 92100 Boulogne-Billancourt
Horaires : Du mardi au dimanche de 11h à 18h.
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