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Accueil du site > Culture & Loisirs > Culture > Fernandel, grande gueule chevaline et antidépresseur

Fernandel, grande gueule chevaline et antidépresseur

« Il a été l’un des plus grands et des plus célèbres acteurs de notre temps et l’on ne peut le comparer qu’à Charlie Chaplin. » (Marcel Pagnol, 1971).

L’acteur et chanteur Fernandel est mort à Paris il y a cinquante ans, le 26 février 1971, à l’âge de 67 ans (il est né le 8 mai 1903 à Marseille), d’un cancer généralisé qu’on lui avait caché (à l’époque, c’était honteux). Fernandel était alors l’un des acteurs français les plus populaires, avec son ami Jean Gabin, avec Bourvil et avec Louis de Funès.

Fernandel est ce qu’on appelle un monstre du cinéma français. De Gaulle se comparait à lui pour sa notoriété internationale. Très connu et apprécié avant la guerre, Fernandel était à l’origine un humoriste, un chanteur, un comique, il a commencé à se produire dans les salles parisiennes dès l’âge de 25 ans et deux ans plus tard, il fut repéré par un réalisateur (Marc Allégret) et il commença une brillante carrière au cinéma. Dès 1936, il était une star du cinéma. Il fut un acteur fétiche de Marcel Pagnol qu’il a rencontré en 1934 pour "Angèle" (sorti le 26 octobre 1934) : « Pagnol m’a donné le côté émotion que je n’avais pas ; moi, je ne songeais qu’à profiter au maximum de mon faciès pour faire rire les gens. ».

Fernandel était synonyme du soleil du Midi, sa voix avec accent, sa gueule souriante, un sourire à faire peur, grande gueule de cheval, yeux malicieux, il était tout de suite repérable, et j’ajoute qu’il faisait la joie des enfants.

Il était aussi la fidélité incarnée dans l’amour : « Si je suis ce que je suis, je le dois à ma femme et à notre amour. ». Une seule femme et trois enfants dont le dernier est Franck Fernandel, acteur et chanteur. Frustré de n’avoir aucune anecdote sur la vie privée de l’acteur, un tabloïd a titré (pour avoir des lecteurs) "La femme cachée de Fernandel", qui ne dévoilait pas l’histoire d’une maîtresse mais simplement de son épouse Henriette qui était toujours restée discrète. Quand il allait voir sa future femme, sa future belle-mère disait : « Té, vé, voilà le Fernand d’elle ! ». Ce qui lui donna son nom de scène : « J’apprécie, plus qu’aucun autre, la vie de famille, car c’est dans mon foyer que j’ai éprouvé les plus grandes joies de mon existence. ». Henriette a suivi son mari treize années exactement après lui, le 26 février 1984.

Quand Bourvil a rencontré Fernandel pour la première fois, il était très impressionné. On aurait tendance à les "classer" ensemble, mais ils avaient presque une génération de différence et dès son adolescence, Bourvil chantait Fernandel, l’imitait dans des petites salles. Bourvil est "parti" un peu avant Fernandel qui était son maître incontesté. Jean Gabin et Fernandel ont commencé à peu près au même moment au cinéma et leur succès leur ont apporté fortune mais aussi amitié, et même une société de production commune.

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Parmi les chansons très populaires de Fernandel, on peut retenir la merveilleuse "Félicie aussi" qui a un incontestable ressort comique : « J’pris un homard sauce tomates, il avait du poil aus pattes, Félicie aussi ! », ainsi sur des dizaines de phrases. Une autre chanson très célèbre est "Ignace" qui a aussi fait l’objet d’un film au même titre de Pierre Colombier (sorti le 30 avril 1937).

Les films qu’a tournés Fernandel sont très nombreux. "Le Schpountz" de Pagnol (sorti le 15 avril 1938) fait certainement partie de ses meilleurs films d’avant-guerre : « Je ne te dis pas que tu es un bon à rien, je te dis que tu es mauvais en tout ! ».

Des "Pagnol" avec Fernandel, il y en a eu beaucoup. Il y a "La Fille du puisatier" (sorti le 20 décembre 1940), avec Raimu. Il y a aussi l’excellent "Topaze" (sorti le 2 février 1951) avec la femme de l’écrivain Jacqueline Pagnol qui joue la femme aimée de Fernandel et l’impayable Jacques Morel dans le rôle du véreux Régis de Castel-Vernac.

Après guerre, Fernandel a tourné la célèbre série de Don Camillo, six films avec un duo entre Fernandel et Peppone (joué par Gino Crvi), le curé et le maire communiste dans un village italien, si cette série a été très populaire (et enfant, j’adorais la regarder), il faut bien reconnaître que c’est plutôt ennuyeux, hélas très daté, et c’était assurément des navets, un peu comme la série du Gendarme de Saint-Tropez pour Louis de Funès. Les deux premiers films ont été réalisés par un grand cinéaste, Julien Duvivier. Rien que le premier titré "Le petit monde de Don Camillo" (sorti le 1952) a fait plus de 26 millions d’entrées au cinéma ! L’idée (provenant de Giovannino Guareschi) est excellente, elle met en scène deux personnages a priori très opposés en pleine guerre froide (avec un parti communiste italien très fort) où l’on voit parfois se nouer des solidarités improbables (cette idée a été reprise entre autres dans une série télévisée française "Père et maire"). Un spot de publicité d’une marque de pâte a également pastiché la série dans une scène définitivement mémorable avec un Fernandel parlant à Dieu.

Parmi d’autres films marquants de Fernandel, on peut citer aussi "Crésus" de Jean Giono (sorti le 21 septembre 1960), l’histoire d’un berger qui découvre des tonnes de billets de banque ; "L’Homme à la Buick" de Gilles Grangier (sorti le 12 janvier 1968), un homme fortuné qui offre des vacances à des gamins pauvres, mais pas seulement, film avec Danielle Darrieux, Jean-Pierre Marielle, Georges Descrières, Michael Lonsdale, Claude Piéplu, Jacques Marin, etc. ; ou encore "Heureux qui comme Ulysse" d’Henri Colpi (sorti le 3 janvier 1970), l’histoire d’un paysan et d’un cheval.

Cependant, j’ai gardé pour la fin ce que j’estime être les trois chefs-d’œuvre de Fernandel. Trois excellents films grâce à leur réalisateur mais aussi grâce à Fernandel.

Le premier est le film glauque "L’Auberge rouge" de Claude Autant-Lara (sorti le 19 octobre 1951). C’est l’histoire d’un moine qui doit passer la nuit dans une auberge dont les propriétaires tuent systématiquement les clients pour leur faire les poches. Il y a le suspense de qui va mourir ou rester en vie avec une autre problématique qui sera très importante aujourd’hui, avec les affaires de prêtres pédophiles, celle du secret de la confession et de sa violation éventuelle pour sauver des vies.

Le deuxième est "La Vache et le Prisonnier" d’Henri Verneuil (sorti le 16 décembre 1959). Il s’agit de l’évasion d’un prisonnier de guerre qui cherche à quitter l’Allemagne à l’aide d’une vache. La fin a une chute inattendue. Jean de Baroncelli, dans "Le Monde" du 1er janvier 1960, a commenté ainsi : « Dans un rôle taillé à sa mesure, Fernandel s’efforce visiblement de rester sobre. Et il sait émouvoir quand il veut. ».

Le troisième enfin est "La Cuisine au beurre" de Gilles Grangier (sorti le 20 décembre 1963). C’est un film qui a fonctionné avec deux grandes stars, Fernandel et Bourvil, en rivalité : Fernandel, restaurateur, prisonnier de guerre disparu dont la femme (jouée par Claire Maurier) s’est remariée avec un cuisinier. Le premier mari prenait en fait du bon temps avec une autre femme (jouée par Anne-Marie Carrière) jusqu’à ce que le mari de celle-ci fût revenu, si bien que le premier mari, en retournant au bercail, découvre que sa femme ne l’attend plus. Dans ce film, il y a des clichés régionaux qui pourraient aujourd’hui faire bondir : le Marseillais est paresseux et le Normand est travailleur.

Dans ce film ("La Cuisine au beurre"), Bourvil a eu beaucoup de mal à tourner avec Fernandel qu’il admirait tant, car ce dernier voulait toujours se valoriser dans le film (ce qui fut aussi le cas avec Louis de Funès dans ses duos avec Bourvil). Bourvil ne voulait plus jouer avec lui. Néanmoins, les deux hommes étaient amis et Fernandel aussi l’admirait, assistait à ses spectacles, etc. et fut extrêmement peiné en apprenant sa mort. Chose intéressante à savoir, le scénario de ce film n’était pas encore achevé au début du tournage ! L’idée principale était de tourner un film avec les deux grandes stars de l’époque. Succès garanti !

Cette recette était simple. La publicité de ce film, basée sur ce duo, disait d’ailleurs : « Avec "La Cuisine au beurre", nous assistons au mariage de la roublardise normande et de la galéjade marseillaise. (…) Voici la recette pour faire un film capable de satisfaire les spectateurs qui veulent rire au cinéma. (…) Vous prenez un Fernandel et un Bourvil de la bonne année que vous placez côte à côte et vous laissez mijoter avec un grand verre de soleil, beaucoup d‘ails, vous ajoutez quelques jolies femmes, une poignée de bonne humeur (…). ».

Pas sûr que cette recette soit appréciée encore de nos jours, à l’heure de la cuisine dite moléculaire et des films au rythme effréné….


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (21 février 2021)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Annie Girardot.
Fernandel.
Simone Signoret.
Jacques Villeret.
Richard Berry.
Omar Sy.
Louis Seigner.
Jean-Pierre Bacri.
Jacques Marin.
Robert Hossein.
Michel Piccoli.
Claude Brasseur.
Jean-Louis Trintignant.
Jean-Luc Godard.
Michel Robin.
Alain Delon.
Alfred Hitchcock.
Brigitte Bardot.
Charlie Chaplin.

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4 réactions à cet article    


  • Mélusine ou la Robe de Saphir. Mélusine ou la Robe de Saphir. 26 février 2021 17:27

    Il refusait d’aller aux enterrement de ses amis ou sa famille. Mais ce n’était pas par insensibilité. Au contraire.....Même le curé n’aurait pu garder son sérieux...


    • troletbuse troletbuse 26 février 2021 17:33

      Une chanson premonitoire de Fernandel. Il l’appelait Zizi

      https://www.youtube.com/watch?v=Mq4Twri617g


      • Attila Attila 27 février 2021 00:31

        L’inoubliable Félicie :

        https://www.youtube.com/watch?v=UnF7AjPOWR8

        .


        • dr.jambon-beurre dr.jambon-beurre 1er mars 2021 03:30

          Quoi ! Fernandel est mort ?

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