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Filmographie de la politique

En ces temps de pré-campagne électorale et de magouilles politico-financières, il est certains films qu’il est bon de revoir car, même s’ils datent un peu et ne sont, finalement, que des comédies, certaines tirades sont devenues cultes et n’ont pas pris une ride. Deux d’entre-eux me reviennent en mémoire même si, à l’époque de leur sortie, je n’étais pas né (mais pas loin de l’être). Ils ont bercés ma jeunesse et je n’en ai compris les subtilités que beaucoup plus tard, mais avec quelle délectation ! Malheureusement ce type de film se fait trop rare. La politique a toujours été un sujet sensible, et c’est encore plus vrai aujourd’hui que cela ne l’a été dans les années 70.

Le premier je l’ai vu en boucle, à l’époque des premiers magnétoscopes. C’était La Folie des Grandeurs, avec Louis de Funès et Yves Montand, sur des dialogues et une réalisation de Gérard Oury. Je connaissais le film par coeur, à la tirade près, tant je m’en étais abreuvé. C’est le premier film que nous avions enregistré et, bien jeune à ce moment là, il est compréhensible que je me le sois repassé sans fin. Ce film a été largement diffusé au cours des décennies qui ont suivies et, plus apte à le comprendre en vieillissant, certaines répliques m’ont interpelé. Comment en effet ne pas faire d’analogies avec la situation politique actuelle ou même passée tant les situations évoquées et les dialogues ne sont pas sans rappeler certains faits de la réalité.

Au début du film on peut voir Don Salluste faire la morale à de malheureux paysans et leur asséner une phrase assassine : "Cette année la récolte a été très mauvaise alors il faut payer le double !". L’un des paysans lui répond mollement que les gens sont terriblement pauvres, ce à quoi l’ignoble ministre rétorque : "C’est normal ! Les pauvres c’est fait pour être très pauvres et les riches très riches". Comment s’empêcher de penser à la situation actuelle, où les petites gens sont de plus en plus taxés pendant que l’élite se goberge et emmagasine des profits toujours plus mirobolants.

De retour au palais, Don Salluste se fait donner le bain par son valet, Blaze (Yves Montand). C’est l’occasion d’une tirade qui, une fois de plus, permet de faire un rapprochement avec un certain Président de la République imbu de lui-même :
"Et maintenant Blaze, flattez-moi !

- Monseigneur est le plus grand de tous les grands d’Espagne.

- C’est pas une flatterie ça : c’est vrai !
".

Imaginez la scène transposée à notre époque, ça pourrait donner ceci :
"- Et maintenant François, flattez-moi !

- Mon Président est le plus grand de tous les Français.

- Mon ami, vous êtes reconduit à Matignon !".

Les magouilles financières de Don Salluste finissent par arriver aux oreilles du roi et celui-ci décide de le bannir de la cours. Désespéré, le ministre implore le roi :
"Qu’est-ce que je vais devenir ? Je suis ministre... Je ne sais rien faire !".

Plutôt éloquent, non ?

Ayant été écarté du pouvoir, Don Salluste cherche par tous les moyens à revenir. A cette occasion il ourdit un complot visant à faire chuter le roi et reprend contact avec son ancien valet. Déguisé en diseuse de bonne-aventure, le ministre déchu tente de se servir de Blaze pour mettre à bien son plan. Il essaie de l’amadouer et lui dit :
"Oh ! Quelle destinée ! Vous n’êtes pas beau, elle est belle. Vous n’avez pas un sou, elle est très riche. Vous êtes idiot, elle aussi. Vous êtes un valet, c’est la Reine !".

Ca ne vous rappelle personne ?

Etant parvenu à convaincre Blaze de le suivre dans ses sombres projets, Don Salluste lui enseigne les manières de la cours. Alors qu’ils cheminent ensembles dans la rue, Blaze bouscule par inadvertance un individu. Il s’excuse auprès de ce dernier, mais aussitôt Don Salluste le rappelle à l’ordre :
"Ne vous excusez pas, ce sont les pauvres qui s’excusent. Quand on est riche, on est désagréable !".

Ne dirait-on pas le portrait d’une personnalité très "bling-bling" du monde de la politique contemporaine ?

On pourrait passer en revue ce film, ce ne sont pas les tirades croustillantes qui manquent...

Une autre oeuvre, signée cette fois par Claude Lelouch, m’a énormément marqué : L’Aventure c’est l’Aventure, avec Lino Ventura (Lino Massaro), Charles Denner (Simon Duroc), Jacques Brel (Jacques), Charles Gérard (Charlot) et Aldo Maccione (Aldo). Réalisé un an après La Folie des Grandeurs (1971), c’est une autre grande comédie ayant la politique pour thème de fond qui voyait le jour. Plus contemporain, ce film n’en est pas moins une satire sur l’instrumentalisation de la politique à des fins bassement vénales. Le film met en scène un groupe de petits malfrats amoraux qui n’ont qu’un objectif : l’argent facile.

Au début de leur "carrière" de malfaiteurs, ils enchaînent les délits dans le seul but de s’enrichir. Mais les butins qu’ils récoltent ne leur suffisent plus, estimant que ceux-ci couvrent à peine les frais pour l’orchestration de leurs méfaits. Simon Duroc, le cerveau de la bande, exécute un contrat qui lui donnera une idée de génie et permettra au groupe de récolter des sommes bien plus lucratives.

Outre les drôleries du tandem Lino/Aldo ou les réflexions au couteau de Jacques Brel, les tirades les plus significatives de ce film sont données à Charles Denner, véritable pourfendeur de la morale. En voici quelques extraits...

"Vous êtes démodés, je vais vous dire pourquoi. Parce que vous vous acharnez à chercher le fric dans les banques, mais c’est plus là qu’il est le fric". Sous-entendu le fric c’est dans la politique qu’il faut aller le chercher. Et ils prennent des cours de politique. Hormis Simon, personne n’y comprend rien, si ce n’est la notion capitaliste du marxisme, seule chose qui les intéresse vraiment.

Lorsque l’idée de se servir de la politique pour s’enrichir germe dans l’esprit de Simon, il dit à ses compagnons :
"Moi, en ce moment, je sais plus où donner de la tête. Je fais du tir au pigeon sur des PDG. C’est d’ailleurs assez marrant parce que je tire sur des types de droite, je suis payé par l’extrême droite et c’est pour mouiller l’extrême gauche". Une fois de plus, à regarder de plus près la situation que vit notre pays, on peut s’interroger sur l’origine des scandales à répétition. Loin de moi l’idée de faire des amalgames, mais comment ne pas se demander à qui profite le crime ? Quelles sont les implications de la droite, de la gauche et de leurs extrêmes ? Dans ce genre d’histoires, le peuple ne connait jamais la vérité, ou seulement des siècles plus tard. En tout cas voilà bien une réplique qui peut donner une orientation (ou pas).

Une autre grande phrase de Simon :
"Aujourd’hui, le gagnant, c’est pas l’homme fort, intelligent, mais le petit, le petit combinard, celui qui sait manier le chantage comme une Winchester. Et surtout la confusion dans la clarté". Pour moi ça dit tout et j’ai l’impression que c’est exactement la manière d’agir de l’actuel gouvernement. On ne sait plus à quel saint se vouer. Des "petits combinards", voilà ce qu’ils sont sans doute.

Bref, dans le film le quintette enchaîne les enlèvements, en passant d’Ernesto Juarez (un révolutionnaire fictif d’Amérique du Sud) par Johnny Hallyday ou un ambassadeur suisse, jusqu’au pape lui-même. Lorsque le groupe est arrêté et jugé en France, ils parviennent à transformer leurs mauvaises actions en idéologie politique, si bien que le gouvernement, au lieu de les emprisonner, organise leur évasion. Parvenus non sans difficultés, et un peu à leur insu, à s’exiler en Afrique, ils sont accueillis comme des libérateurs. Là encore Simon, devant un peuple en liesse, décoche une flèche verbale : "La politique, c’est du show-business". Une analogie de plus avec la classe dirigeante actuelle. Comme quoi, ce qui était déjà vrai dans les années 70, l’est davantage encore aujourd’hui.

Je pourrai conclure là-dessus, mais il y a un autre film qui m’a marqué, plus récent celui-là : Lord of War, d’Andrew Niccol, sorti en 2005, avec Nicolas Cage, Ethan Hawke et Jared Leto. Le scénario retrace l’histoire d’un ukrainien émigré aux Etats-Unis qui, en se faisant passer pour un juif, parvient à s’introduire dans le commerce de l’armement grâce aux contacts qu’il a gardé avec l’ancienne URSS. Il entraîne son frère dans sa chute immorale, arguant que la vente d’armes tue moins de gens que l’automobile ou le tabac. Tout au long du film il est poursuivit par un agent d’Interpol qui parvient à le faire arrêter après de longues années de traque, mais Yuri (Nicolas Cage) est finalement libéré car des intérêts internationaux supérieurs le rendent pratiquement intouchable, au grand désespoir de Jack Valentine (Ethan Hawke).

Bien que ce film ne soit pas une comédie (plutôt un drame) au contraire des deux précédents cités, il ne manque pas d’intérêt et je ne peux que le recommander à ceux qui ne l’auraient pas vu. On est loin des productions américaines classiques, empreintes d’héroïsme et de nationalisme. Il s’agit plutôt d’une vive critique sur un commerce juteux responsable de la mort de millions d’innocents de par le monde. Il regorge lui aussi de dialogues auxquels il est facile d’associer des événements réels. Sans doute le meilleur rôle que Nicolas Cage ait interprété. A voir absolument.

N’étant pas un cinéphile averti, si vous connaissez d’autres films dont le thème est de près ou de loin lié à la politique, je les verrai avec intérêt. N’hésitez pas à m’en faire part !
 

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3 réactions à cet article    


  • zelectron zelectron 8 décembre 2010 16:44

    Prenez aussi l’exemple de Topaze de Marcel Pagnol (la version avec Louis Jouvet (même si Pagnol ne l’aimait pas)

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