Godzilla Vs King Kong
Le cinéma vient de nous fournir récemment un bel exemple de promotion, sans doute imitable par la filière musicale : on aurait pu imaginer que la campagne marketing pour le futur film de Peter Jackson, King Kong, ressemblerait à celle de Gozilla... mais le réalisateur a plutôt décidé d’aller à la rencontre du public.
La mise en place du modèle économique de co-création
d’expériences personnalisées consiste en premier lieu à entretenir un contact
direct avec le client final, public, joueur ou spectateur. En effet, comment
mieux répondre aux besoins du marché si on ne le connaît pas ? Le cinéma est en train
de changer de stratégie sur le sujet.
Rentrer en contact avec les futures personnes qui rempliront les salles de cinéma, par exemple, implique un changement d’attitude de la part des institutionnels. Le secret et le mutisme autour de certains tournages ne renvoient pas un message d’ouverture. En cherchant à entretenir un climat de mystère pour attiser la curiosité des spectateurs, les studios se privent d’un contact direct avec leurs clients. Certains évoquent la stratégie de « take the money and leave », consistant à engranger un maximum d’argent la première semaine de sortie, sachant que le bouche à oreille ensuite ne sera pas bénéfique.
Avec les moyens de communication actuel, ce modèle
économique devient de plus en plus risqué. On se souvient du film Godzilla,
sorti en 1998, qui, pour Marc Shmuger, vice-président du marketing monde chez
Columbia Tristar, symbolise une époque révolue[1]. La campagne promotionnelle
du film reposait sur de très courts extraits, où le monstre pouvait à peine
être entrevu. Le public ne fut pas séduit par tant de mystère, qui distillait un
climat de suspicion sur la qualité de cette nouvelle adaptation
cinématographique. Pour Shmuger, « nous ne vivons plus dans un monde où Hedda
Hopper [actrice et journaliste des années 30/40 connue pour son commérage]
distille une information sur l’industrie [cinématographique] qui sera
prise pour argent comptant ».
Par opposition, Peter Jackson a lancé le site KongisKing.net pour accompagner le tournage et la promotion du blockbuster de Noël 2005, King Kong. Sous la forme d’un carnet de bord, le réalisateur y détaille son expérience du tournage, avec un ton résolument libéré : « Il sera intéressant [avec ce carnet de route] d’essayer de faire partager notre stress, la fatigue et la difficulté. Car tourner un film est quelque chose de vraiment ardu ». Au-delà de cette communication interpersonnelle, kongisking.net représente la principale source d’information pour le futur public. Plus d’une centaine de notes et 6h30 de documentaires sur le déroulement du tournage et de la postproduction sont consultables en ligne.
Peter Jackson ne répond pas aux questions des visiteurs sur son site ; cependant on peut affirmer qu’un contact personnel direct se développe avec le public : en effet, les acteurs sont présentés dans des postures délicates, le quotidien est montré sans concession, et de nombreuses confidences sont diffusées.
Il ne s’agit plus d’une communication aseptisée d’un studio en direction d’un marché anonyme, mais d’une information qui assume sa subjectivité, pour plus de proximité. Le réalisateur explique avoir dit à Universal que le journal de bord ennuierait les lecteurs s’il s’agissait d’un exercice forcé, dirigé par le studio où le monde « sourirait et raconterait des choses gentilles ». Aucune agence de publicité n’a donc été impliquée dans le carnet de bord, pour une meilleure efficacité marketing ! Par contre, ces agences collaborent efficacement au reste de la campagne marketing...
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