Hans Bellmer
Le centre Pompidou, dans son espace Galerie d’art graphique (niveau 4), présente du 1er mars au 22 mai 2006 les œuvres de Hans Bellmer sous le thème « Anatomie du désir ». Cette exposition nous offre le plaisir de (re)voir les dessins, les gravures, les peintures, les sculptures et les textes de cet artiste à l’univers inquiétant et fascinant.

Né en 1902, Katowice (Silésie) et mort à Paris en 1975, Hans Bellmer a eu une vie ponctuée par le drame et la souffrance. Élevé auprès d’un père tyrannique et d’une mère à l’opposé, H. B. s’est construit très tôt un univers de merveilleux et de fantastique afin de résister, dans cette atmosphère étouffante et castratrice.
Au lendemain de la Première Guerre mondiale, son père l’envoie travailler dans les mines de charbon ; il en conservera une vision que l’on retrouvera dans tous les dessins qui ont pour thème le souterrain. Puis, en 1922, son père l’inscrit à la Technische Hochschule de Berlin, pour qu’il suive des études d’ingénieur. Là, il apprend les mathématiques et le dessin précis du technicien. Mais mener une carrière d’ingénieur, emprunter la même voie que son père, cela répugne à Hans Bellmer. Il dessine, illustre des ouvrages et se lie d’amitié avec Georges Grosz. Il fait la rencontre de Lotte Pritzel, créateur de merveilleuses poupées, se marie et monte avec sa compagne une petite entreprise de dessins publicitaires. Mais l’appel le plus fort est ailleurs...
C’est en 1932 qu’il aura son premier choc. Il assiste à une représentation du conte d’Hoffmann où la poupée Coppélia tient le rôle central. Aussitôt, c’est la révélation : il fabriquera une fille artificielle dont l’anatomie figurera les bouleversements passionnels. La jointure à boules symbolisera les mouvements et les permutations du désir. Il photographie ensuite la poupée dans des poses et dans des lieux où sa présence engendre le trouble et la provocation.
Hans Bellmer découvre, en 1935, la revue Minotaure, et très vite son œuvre circule dans les milieux surréalistes. Sa femme disparaît. Désespéré, harcelé par le nazisme, il quitte l’Allemagne et part s’installer à Paris en 1938, où ses amis l’attendaient. Dans ce nouveau milieu, son œuvre prend de l’ampleur, de la force. Mais des difficultés matérielles de toutes sortes l’assaillent. Il fait la rencontre d’Unica Zûrn (artiste à l’œuvre remarquable injustement oubliée...) Mais, à nouveau, le drame, les angoisses, la souffrance se dressent : la maladie d’Unica, son suicide et, finalement, pour lui, l’hémiplégie.
Ses dessins sont la preuve de sa grande maîtrise du trait et de la rigueur de la précision poussée jusqu’au moindre détail.
Mais l’élément le plus dérangeant, troublant, intrigant, demeure la poupée que ses (dés)articulations, ses décompositions et ses poses érigent au rang d’expériences anatomiques initiatiques. Un peu comme les rites chamaniques de Sibérie, où le futur initié subissait corporellement des épreuves parmi lesquelles la désarticulation. En elle manifeste la puissance du désir, mais aussi ses effrois, et l’obstacle que peut représenter le corps dans une perspective de libération totale. Faire sauter le carcan des limites que le corps impose, pour laisser jaillir la toute-puissance du désir à la fois créateur et dévastateur.
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