(I’ve been) Carried to Dust
Calexico à la Cigale le 14 octobre dernier.
Avant tout, je tiens à prévenir que cet article n’a aucune vocation de critique artistique et qu’il tient plutôt du ressenti, du témoignage. J’ai hésité une bonne semaine avant de l’écrire, espéré en vain qu’un A-voxien plus inspiré et moins laborieux s’en acquitte afin que je puisse uniquement commenter...
J’ai découvert Calexico il y a un peu plus d’un an, au hasard de la radio. Immédiatement, j’ai senti le chaînon manquant entre cette musique anglo-saxonne dans lequel j’ai toujours baigné et la latine vers laquelle je tends avec le temps. Une place occupée jusqu’alors par le rock latino.
Grâce au web (eh oui, Messieurs les huiles des majors, si aujourd’hui j’achète des disques de ce groupe c’est parce qu’auparavant je les ai testés d’une manière que vous estimez illégale), j’ai pénétré l’univers calexiquien.
Univers particulier à la fois si simple et si sophistiqué, le folk, le rock, le jazzy et le latino s’entremêlent. Les trompettes mariachis ne sont jamais loin et nous rappellent que Tucson, leur base, flirte avec le rideau de tortilla. Univers subtil où on retrouve de la légèreté de l’air de l’Arizona et de la pétulance de l’intérieur de ses missions hispaniques.
En visitant leur site début juin, j’y ai appris l’arrivée d’un nouvel album en septembre et la venue des cow-boys à la Cigale le 14 octobre. Pas d’hésitation, même si depuis plus de dix ans je n’ai pas vu de concert, je me suis aussitôt muni de deux places. Ça sera génial ou décevant, selon l’album à venir.
Début septembre, Carried to Dust, la dernière création est dans les bacs. Leur précédent opus, Garden Ruin, trop sombre à mon goût, loin d’un Feast of Wire par exemple, avait marqué un virage dans l’œuvre. Celui-ci en est un aussi, un retour à d’anciennes valeurs, mais pas un demi-tour, un objet original produit d’une évolution, d’une maturation du groupe. Le disque passe en boucle à l’approche du concert. Magnifique. A mon sens, un aboutissement de leur œuvre passée.
Et le show, mardi 14 octobre. La veille, impatient, je me suis laissé aller à suivre sur le web leur prestation à Bruxelles. Un bon moment même si la retransmission vidéo est chaotique, mais la présence d’invitées comme Amparo Sanchez ou Françoiz Breut illumine la soirée.
A la Cigale, Burns arrive d’abord sur scène d’une façon un peu impromptue, accompagné par Niehaus à la pedal-steel et ça part comme une discussion entre potes, sur l’air de Bisbee Blue, avec des allusions à l’actualité électorale des States. Les autres membres du groupe les rejoignent sur scène, on entame avec quelques classiques, Wash ou Across the Wire. La mayonnaise commence à prendre doucement. Après le nouveau standard Two Silver Trees, une version prodigieuse de Roka, morceau qui ne faisait pas partie de mes préférés jusqu’ici, finit d’emmener la salle dans le sillage des Arizoniens. Et ça enchaîne western par le morriconien El Gatillo et une couche de latino avec Inspiracion chanté par Valenzuela, et ça culmine avec Black Heart présenté par Burns comme leur morceau préféré par les fans français. Et la Cigale chavire et Calexico nous emporte maintenant sur les routes poussiéreuses du dernier album, coinçant intelligemment entre les nouveaux morceaux - ah, The News about William, merveille de délicatesse - d’anciennes perles comme la reprise Alone again or. On apothéose avant les rappels avec Crystal Frontier, bien sûr.
J’espère toujours Stray dans ces rappels, ma favorite absolue dans sa version du DVD Live at the Barbican, mais on aura droit à la crème du dernier album (House of Valparaiso, Victor Jara’s Hands, Red Blooms cependant un peu trop étiré) et à d’explosifs classiques latinisants (Güero Canelo et enfin une petite Corona pour la route au deuxième retour en scène).
C’est ma chère et tendre - pourtant pas plus fan du groupe que ça avant le show - qui résumera le mieux la performance : "Ils nous ont fait voyager pendant deux heures". Eh oui, dans le sillage de l’attachant Joey Burns, du magnifique batteur qu’est John Convertino, de l’épatant multi-instrumentiste Martin Wenk ou du hiératique Paul Niehaus (tous deux couvés par l’œil de Stephan Eicher qui les a conviés sur son dernier album), j’ai revu les routes d’Arizona, son ciel si pur, les saguaros, les Mex venus en quête de paradis, l’Apache Trail, les ghost towns poussiéreuses.
Je n’attendrai pas dix ans pour reprendre ce sillage.
D’ailleurs, le lendemain, était diffusée sur le web leur prestation suivante à Amsterdam. Je l’ai trouvée moins chaude. Vous pourrez vous faire une idée lorsqu’elle y sera à nouveau accessible prochainement.
Calexico à la Cigale, une osmose entre une salle, des musiciens et leur public, dans la simplicité. Bref une pure poussière de vie.
Crédit photo : (c) David DIDIER pour Tasteofindie.com
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