Il y a 10 ans... Charles ...
Dix ans déjà…..
Dix ans à peine…
Dix ans le 19 Février, que toi, le swing troubadour , pour une dernière fois, tu tirais ta révérence à ta douce France, que tu aimais tant ; celle de tes jeunes années, de ta si chère enfance, des premières amours, des vagabondages, de la vie qui va…
Dix ans que la mort, que tu chantais autant que la vie, a fait de toi le fantôme, qui vient tirer les poils du petit cocu qui tente de veiller sur Mam’zelle Clio,danser la java du diable, et la polka du Roi….
Dix ans qu’avec les anges, ton fantôme vient revoir Paris, Ménilmontant, chanter ses oiseaux et sa romance….
… avant de reprendre la Nationale 7,pour aller danser le be-bop à Carcassonne, et revoir la mer, le long de ses golfes … pas si clairs…
Dix ans que tu as rejoint ton papa qui pique et ta maman qui coud, ton jardin extraordinaire, que tu as dû retrouver, le mariolle défait du Grand Café, et l’hidalgo distrait qui y oubliait son cheval……
Une décennie que ton fantôme continue à chanter, et qu’on trouve toujours ça rigolo…
que notre cœur s’étreint, avec toi, avec Antoine Doinel, de la nostalgie de tous nos baisers volés, et se demande, depuis si longtemps, et pour toujours, ce qu’il reste de nos amours…
Comme tu es toujours avec nous, n’oublie pas, de notre part, de dire ah , dire dire ah, dire ah bonjour à Fleur bleue, bonsoir aux jolies madames,.. Et aux femmes, aux femmes, aux femmes, qui ont les yeux bleus…
N’oublie pas, non plus de refaire tourner ton vieux ciné, et réenchanter ton piano de la plage..
Avec Tonton Georges, sûr que vous devez reprendre vos duos et que, là-haut, le soleil honore enfin son rendez-vous avec la lune…
Mais enfin, Charles, puisque le temps est venu de cet hommage, je voudrais en profiter pour te faire part d’une question qui me turlupine depuis toujours….
Toi qui as tellement chanté la nostalgie de ton enfance ; heureuse, courant dans les sentiers pleins d’oiseaux et de fleurs, de ta mère t’attendant, les larmes aux yeux, dans votre pavillon de banlieue, le cœur content,
Toi qui, avec une inspiration, une poésie inégalées, a tellement célébré la joie, et la vie,
Je reste toujours aussi profondément bouleversé par ce qui est, pour moi, ta plus belle chanson, la plus intime, la plus douloureuse, sans doute, ta chanson…. la plus désenchantée……
tu ne m’en voudras pas de m’y arrêter un peu…
Les jours de repassage,
Dans la maison qui dort,
La bonne n'est pas sage
Mais on la garde encore.
On l'a trouvée hier soir,
Derrière la porte de bois,
Avec une passoire, se donnant de la joie.
La barbe de grand-père
A tout remis en ordre
Mais la bonne en colère a bien failli le mordre.
Il pleut sur les ardoises,
Il pleut sur la basse-cour,
Il pleut sur les framboises,
Il pleut sur mon amour.
Je me cache sous la table.
Le chat me griffe un peu.
Ce tigre est indomptable
Et joue avec le feu.
Les pantoufles de grand-mère
Sont mortes avant la nuit.
Dormons dans ma chaumière.
Dormez, dormons sans bruit.
Berceau berçant des violes,
Un ange s'est caché
Dans le placard aux fioles
Où l'on me tient couché.
Remède pour le rhume,
Remède pour le coeur,
Remède pour la brume,
Remède pour le malheur.
La revanche des orages
A fait de la maison
Un tendre paysage
Pour les petits garçons
Qui brûlent d'impatience
Deux jours avant Noël
Et, sans aucune méfiance,
Acceptent tout, pêle-mêle :
La vie, la mort, les squares
Et les trains électriques,
Les larmes dans les gares,
Guignol et les coups de triques,
Les becs d'acétylène
Aux enfants assistés
Et le sourire d'Hélène
Par un beau soir d'été.
Donnez-moi quatre planches
Pour me faire un cercueil.
Il est tombé de la branche,
Le gentil écureuil.
Je n'ai pas aimé ma mère.
Je n'ai pas aimé mon sort.
Je n'ai pas aimé la guerre.
Je n'ai pas aimé la mort.
Je n'ai jamais su dire
Pourquoi j'étais distrait.
Je n'ai pas su sourire
A tel ou tel attrait.
J'étais seul sur les routes
Sans dire ni oui ni non.
Mon âme s'est dissoute.
Poussière était mon nom.
La pluie, les orages, la passoire de la bonne, sa colère, face à la barbe de grand-père, le placard aux fioles où l’on « te tient couché »… déjà, la nostalgie se drape d‘un voile de tristesse…
le gentil écureuil tombé de la branche, comme la chute de ton monde imaginaire, la fin de l’enfance, des rêves, des illusions de Noël, la brusque irruption du réel, la pensée et le désir de la mort…
Comme une entrée douloureuse dans un monde adulte, un soupir sur ce qui ne sera plus, et qui annonce une errance sans espoir…
Comme à la fin d'un bel été
S'en vont les jours de joie et de sourire,
Vous pour qui mon cœur soupire,
Vous qui savez bien
Que, désormais, plus aucun lien,
Aucun aveu, serment, folle promesse
Ne rendront mon cœur triste ou joyeux,
C'est à vous, à vous jeunesse,
Que je dis adieu.
Vous qui me quittez,
Comme à la fin d'un bel été
S'en vont les jours de joie et de sourire,
Vous pour qui mon cœur soupire,
Vous qui savez bien
Que, désormais, plus aucun lien,
Aucun aveu, serment, folle promesse
Ne rendront mon cœur triste ou joyeux,
C'est à vous, à vous jeunesse,
Que je dis adieu.
Comme, derrière le masque du troubadour joyeux, une blessure jamais refermée, une béance, un regret infini sur une enfance pourtant finalement pas si « innocente », pas si insouciante…
5 .Voilà tout ce que je désire
Meilleur ou pire
Mon Dieu vous me le donnerez
Si vous voulezJe ne demande pas grand-chose
C'est pourquoi j'ose
Vous dire que tout sera bien
Même si je n'ai rien
Et tout ça vous le voyez
De la fenêtre d'en haut
De la fenêtre du ciel bleu
Où tout le monde est heureux
Où l'on entend étrange
La voix des anges
Quand on a mérité
L'éternité
Mais tu n’es plus avec nous qu’en chansons, qu’en fantôme ; peut-être, pour en savoir plus, faudra-t-il, un soir de pleine lune, invoquer tes mannes, pour que tu viennes, avec les anges, nous rassurer, nous dire que, là-haut, tu as retrouvé l’innocence et la joie d‘une enfance heureuse…
Quand à ton âme, cher, très cher Charles, pas de danger qu’elle se dissolve jamais, puisque, pour longtemps, longtemps, longtemps, grâce à tes chansons, elle court dans nos rues…….et enchante les nôtres…
p.s. : ne manque pas d’embrasser Hélène, de ma part…
N.B. :
Il faut rappeler, que Trenet est le seul auteur-compositeur à voir figurer, dans les 20 plus belles chansons du XXème siècle, élues par l’ensemble des auteurs-compositeurs francophones, 3 de ses chansons :
- la mer
- que reste-t-il de nos amours
- l’âme des poètes
La Mer, Charles Trenet (à l'Olympia) par AgoraVoxFrance
Le Jardin Extraordinaire, Charles Trenet (1967) par AgoraVoxFrance
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