Inaltérable Guy Bedos
Le temps a beau passer inéluctablement, il ne semble pas avoir le moindre effet sur l’esprit critique et dénonciateur de Guy Bedos. Lui, qui constate que : « plus je vieillis sur scène, plus ça rajeunit dans la salle », n’est pas prêt de mettre sa langue dans sa poche. Toujours à l’affût des travers de notre société, il ne manque jamais une occasion de blâmer l’aspect dérisoire des choses et de s’engager en faveur de causes auxquelles il croit et qu’il tient à défendre. Passant par la Lorraine pour participer à un spectacle de soutien au journaliste Denis Robert, l’humoriste qui « aime tout et veut tout », en a profité pour démontrer qu’il n’avait rien perdu de sa verve. « On ne donne la parole qu’à ceux qui veulent la prendre », après tout...
Bedos et Denis
Robert. « J’ai connu Denis à travers ses films et ses bouquins,
qui m’ont beaucoup intéressé », révèle celui qui ironisait pourtant sur
le fait que « le seul prix qui intéresse vraiment un écrivain, c’est le
prix du livre ». Ce qu’il apprécie avant tout chez l’écrivain messin,
c’est « sa liberté de ton, qui n’est
pas très courante, en particulier dans le milieu de la presse ». Guy
Bedos se retrouve aussi quelque part chez Denis Robert, parce qu’il a connu
cette situation de « tricard dans
une bonne partie des médias au cours des années 70 », lorsqu’il a
débuté sur scène en solo. De plus, il se considère « un peu comme un journaliste frustré, car l’exercice de revue de presse
que j’effectue pour mes spectacles s’apparente davantage à un travail
journalistique qu’à un travail d’acteur ». Et pour ce qui est du
travail d’acteur, l’homme sait de quoi il parle, lui qui compte plus d’une
trentaine de films à son actif, et qui a été dirigé, entre autres, par Marcel
Carné et Jean Renoir. Enfin, le comédien Guy et l’enquêteur Denis partagent le
sentiment « d’exister à travers ce
que l’on fait, et toujours dans le sens d’éclairer au maximum ses
contemporains ».
Bedos et
l’engagement. « Je suis un homme libre, je n’ai aucun
devoir de réserve vis-à-vis de quiconque, ni carte de parti », rappelle
le spécialiste des piques féroces contre la politique et ses conséquences sur
le fonctionnement de la société. « Aujourd’hui,
nous sommes tous dans la désillusion : on ne rêve plus de révolution, mais
on peut encore souhaiter une forte évolution ». A ses yeux, l’un des
principaux problèmes réside dans le fait que « l’argent est devenu une sorte de religion de nos jours. Et de tous les
intégrismes, le plus dangereux me paraît être l’intégrisme de l’argent ».
Que préconise alors le citoyen Bedos, qui affirme sans détours : « La
Bourse je m’en fous, j’ai choisi la vie » ? « Il faut arrêter le chacun pour soi et
réveiller les solidarités, partout et tout le temps. Il devient urgent de
fédérer davantage les gens ». C’est dans cette optique qu’il a « des tas d’activités dans diverses
associations qui paraissent aller dans
le bon sens », précisant au passage qu’ « il serait vivement souhaitable de supprimer
l’esprit de boutique de ces collectifs, qu’ils cessent de la jouer perso.
L’union fait encore et toujours la force ».
Bedos, son style et
son actu. « Il faut toujours taper sur du lourd »
conseille de façon radicale le professionnel de la satire. Politiquement
incorrect, volontiers provocateur et d’un cynisme perçant, le dérangeant Guy
avoue que cette attitude est souvent « coûteuse,
mais c’est justement cela qui est excitant ! » A propos de sa
liberté de parole, il clame qu’il « n’a
pas peur ; au contraire, plus c’est dangereux et plus je m’en
fous ! » Son prochain spectacle, « Hier, aujourd’hui,
demain », devait initialement s’appeler « Le Rire de
résistance », malheureusement le nom était déjà pris. Sans doute était-ce
un petit clin d’œil à l’une de ses citations l’impliquant
personnellement : « L’humour, c’est aussi une façon de
résister »... Sur plusieurs fronts à la fois, comme à son habitude, Bedos
s’est également lancé dans l’écriture d’un roman, et sera à l’affiche d’un long
métrage au début de l’année prochaine, « Survivre avec les loups ». Et afin de finir son livre dans les
meilleures conditions, l’Algérois de naissance confie : « Après la tournée de mon spectacle, je
partirai dans ma maison en Corse, qui est mon Algérie de
remplacement ».
Alors heureux, finalement, Guy Bedos ? « Je vais
bien. Et si tout le monde allait aussi bien que moi, j’irais beaucoup
mieux ».
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